Transition énergétique allemande, Energiewende Deutschland, sortie du nucléaire, énergies renouvelables, économies d´énergie, réduction des émissions de gaz à effet de serre
Depuis 2017, le montant du soutien aux énergies renouvelables n’est plus fixé comme auparavant par l’État mais par le biais d’appels d’offres. Outre la mise en place des appels d´offres, l´État a ralenti le développement des énergies renouvelables en limitant les volumes annuellement mis aux enchères pour qu´elles suivent mieux le développement du réseau. L’amendement de 2017 stipule pour l´éolien terrestre un objectif de 2,8 GW par an entre 2017 et 2019 et 2,9 GW par an à partir de 2020 /1/
L’Agence fédérale des réseaux (Bundesnetzagentur) a publié les résultats du 3ème appel d’offres 2018 pour l’éolien terrestre en août 2018 /2/. Les offres précédentes ont fait l’objet des publications sur le BLOG /3 /, /4 /.
Le tableau résume les résultats des appels d´offres de mai 2017 à août 2018.
Après une baisse continue du montant moyen de l’adjudication en 2017, on observe en 2018 à nouveau une augmentation importante. Selon l’Agence fédérale des réseaux cette progression est essentiellement due à l’absence d´une pression concurrentielle.
En mai 2018 les offres soumises n´ont même pas atteint le volume mis en adjudication. Avec 91 offres d´un volume total de 709 MW, l´appel d´offres d´août 2018 était légèrement souscrit mais 5 offres d´un volume de 42 MW ont été refusées pour des raisons de forme.
Brandebourg a obtenu la plupart des adjudications pour un volume de 136 MW, suivi de Rhénanie-Westphalie (100 MW9 et Schleswig-Holstein (95 MW). Néanmoins 23% des adjudications ont été accordés aux offrants situés au sud du Main.
Selon l´agence fédérale la hausse du montant de l’adjudication pourrait stimuler la concurrence pour les deux derniers appels d´offres en 2018.
Pour limiter le réchauffement des cours d’eau pendant la canicule, les exploitants des centrales thermiques en circuit ouvert ont été obligés ces dernières semaines de procéder à des baisses de régime. La situation fut particulièrement tendue pour les centrales des bords du Rhin et du Neckar.
Ainsi EdF a mis entre autres l’unité de production n° 1 de Fessenheim en arrêt temporaire début aout 2018 pour respecter les autorisations de rejets thermiques dans le Grand Canal d’Alsace, la production de l´unité n° 2 avait été réduite pour les mêmes raisons, toutefois sans inquiétude concernant l’approvisionnement du réseau /1/.
La situation en Allemagne du Sud était nettement plus tendue. Les exploitants en Bade-Wurtemberg ont demandé une dérogation auprès du ministère responsable pour pouvoir faire fonctionner leurs centrales thermiques le cas échéant jusqu´à 0,5 °C au-delà du seuil autorisé de 28°C en aval des sites. La dérogation temporaire a été accordée le 27 juillet 2018 afin d´assurer la sécurité d´approvisionnement du Land /2/, /3/.
Le ministre de l´environnement et de l´énergie de Bade-Wurtemberg, M. Untersteller (Les Verts) explique dans le communiqué de presse du 27 juillet 2018 la nécessité de cette mesure mais ajoute que le photovoltaïque assure presque 40% de la consommation d´électricité en journée en Bade-Wurtemberg et souligne « … la canicule actuelle fournit une preuve supplémentaire qu’il est important de se rendre indépendant des centrales conventionnelles et de développer les énergies renouvelables. Après tout les éoliennes et le photovoltaïque n´ont pas besoin d´eau pour le refroidissement ».
A première vue certes un argument plausible. Cependant d’après les chiffres de production et consommation d´électricité en Allemagne dans la période du 20 au 27 juillet 2018 /4/ on peut avoir quelques doutes. Le photovoltaïque a fourni en effet jusqu´à presque 30 GW en journée, mais on note une défaillance de la production éolienne (voir figure 1)
Figure 1 : Production et consommation d’électricité par filière dans la période du 20 au 27 juillet 2018 selon Agorameter /4/ [en vert : bioénergies, en bleu clair : hydroélectricité, en bleu foncé : éolien, en jaune : photovoltaïque, en gris : centrales conventionnelles, ligne rouge : consommation d´électricité]A titre d´exemple, le 24 juillet vers 5 heures, l’éolien et le photovoltaïque, totalisant une capacité installée de plus de 100 GW, ont fourni seulement 1,4 GW. La demande d´électricité étant de 54 GW à ce moment, les filières fatales n´ont assuré que 2,6% de la demande.
Bien que les résultats lissés sur le premier semestre 2018 des énergies renouvelables intermittentes soient remarquables /5/, c’est l´instant T qui compte pour sécuriser l´approvisionnement en électricité et non pas la production lissée sur une période donnée.
Les défaillances répétitives des éoliennes par manque de vent pendant plusieurs jours en juillet 2018 démontrent une fois de plus qu´en l´absence de solutions de stockage massif d´énergie, la variabilité des éoliennes et du solaire nécessite le maintien en backup des centrales conventionnelles pour suppléer aux carences de ces énergies renouvelables intermittentes. Notamment les centrales à lignite n´ont eu aucune restriction de régime lors de la canicule car leur refroidissement est assuré en majeure partie par les eaux d’infiltration des mines à ciel ouvert /6/.
La France elle aussi a connu une défaillance de la production éolienne par manque de vent fin juillet et début aout 2018 /7/ donc même l´interconnexion avec les pays voisins n´aurait pas beaucoup amélioré la situation en Allemagne du Sud.
Éolien et photovoltaïque n´ont certes pas besoin d´eau pour le refroidissement, mais contrairement aux aspirations de certains politiciens, les énergies renouvelables intermittentes ne sont pasen mesure d´assurer à elles seules la sécurité d´approvisionnement. Une technologie complémentaire, soit centrales conventionnelles backup soit accumulateurs d’énergie, reste indispensable (voir aussi : Énergies renouvelables : de nombreux défis ).