
Le contrat de coalition entre les chrétiens – démocrates (CDU/CSU) et les sociaux – démocrates (SPD) a été signé le 12 mars 2018 /1/ et le nouveau gouvernement a pris ses fonctions le 14 mars 2018 . Ce contrat de coalition de 177 pages traite les objectifs en matière de climat et d´énergie dans différents chapitres, notamment aux chapitres VI.3 « Energie », VI.4 « Transport », IX.4 « Bâtiments » et XI.1 « Environnement et climat ».
Voici quelques extraits:
Réduction des émissions de gaz à effet de serre
Les partenaires de la coalition s´engagent à tenir les objectifs nationaux, européens et de l´accord de Paris en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 2020, 2030 et 2050. Partant de la constatation qu’il n´est plus possible d’atteindre d´ici 2020 l´objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40% par rapport à 1990, il est prévu de combler l´écart au mieux par rapport à l´objectif national pour 2020.
L’objectif 2030 de réduction des émissions (- 55% par rapport à 1990) doit être atteint de toute manière. Tous ces objectifs supposent l´absence de dommages structurels et le respect du triangle énergétique, c´est-à-dire : sécurité d’approvisionnement, lutte contre le réchauffement climatique et compétitivité.
Energies renouvelables
Une part de 65% d´énergies renouvelables à la consommation d´électricité est visée d´ici 2030 (Pour mémoire: selon le concept initial de 2011, le quota de 65% était prévu pour 2040) sous condition que le réseau puisse accueillir la capacité supplémentaire.
Commission « Croissance, mutation structurelle et emploi »
Une commission intégrant les différents acteurs de la politique, de l´industrie, des organisations non gouvernementales, des syndicats ainsi que des régions et des Länder doit proposer jusqu’à fin 2018 un programme d´action concernant les mesures à prendre pour :
- atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre, à savoir réduire l´écart par rapport à l´objectif 2020 et assurer l’objectif 2030
- sortir progressivement de la production d’électricité à base de charbon/lignite et fixer une date butoir
- développer des mesures compensatoires d’aide à la restructuration des régions concernées
Nucléaire
- sortir du nucléaire d´ici 2022 tout en exerçant une influence sur les questions de sureté du nucléaire en Europe
- s’investir pour adapter le contrat EURATOM aux enjeux futurs concernant l´utilisation du nucléaire et obtenir la suppression des subventions de l´UE pour de nouvelles centrales nucléaires.
- sélectionner d´ici 2031 le site de stockage de stockage définitif des déchets radioactifs « exothermiques » : HA (Haute activité) et MA – VL (Moyenne activité à vie longue)
- mettre en service aussi vite que possible l’ancienne mine de fer de Konrad pour le stockage des déchets radioactifs « non exothermiques » : FMA – VC (Faible et moyenne activité à vie courte)
De plus, le futur gouvernement souhaite lancer des initiatives pour la promotion de l´efficacité énergétique, des solutions de stockage d´électricité, de cogénération et l’utilisation renforcée des énergies renouvelables en mettant en lien les trois secteurs: chaleur et refroidissement (bâtiment), transport et électricité. Le contenu précis des initiatives n´est pas encore connu.
Il est prévu que le ministère de l´économie et de l´énergie, responsable pour la mise en œuvre de la transition énergétique, passe sous la responsabilité des chrétiens – démocrates (M. Peter Altmaier, CDU).
Le ministère de l´environnement restera sous la responsabilité des sociaux – démocrates (SPD). Svenja Schulze succède à Barbara Hendricks en tant que nouvelle ministre. Mme Schulze fut durant sept ans ministre pour « l´innovation, la science et la recherche » en Rhénanie-Westphalie. Elle s´est mise en difficulté en 2011 dans l´affaire des « boules de combustible disparues » du réacteur de recherche de Jülich. Il a fallu quelques jours avant que le gouvernement du Land de Rhénanie-Westphalie atteste que les boules n´avaient jamais disparu.
Réactions partagées
La réaction du secteur énergétique sur la politique du climat et de l´énergie du futur gouvernement est partagée.
Selon la fédération des entreprises de l’énergie BDEW / 2/, le contrat de coalition ne donne pas de réponses quant au financement des investissements indispensables dans de nouvelles centrales pour garantir la sécurité d´approvisionnement.
(Pour mémoire : La plupart des centrales thermiques sont actuellement exploitées dans un « Energy-only-Market » soit une rémunération de la production électrique au prix du marché, sans tenir compte des frais de mise à disposition de la capacité. Le prix de gros de l’électricité est aujourd’hui trop bas pour inciter à la construction de nouveaux moyens de production conventionnelle)
Le contrat de coalition ne prévoit pas d’allègement de la fiscalité de l´électricité. Cela aurait été important notamment pour rendre l´électricité renouvelable compétitive dans les secteurs du transport et de chaleur/refroidissement. Le document ne contient pas non plus de proposition concernant un renchérissement des émissions CO2 dans les secteurs du transport, chaleur/refroidissement et de l´agriculture. Cela aurait été indispensable pour réduire les émissions notamment du secteur transport.
Le think tank PROGNOS a publié sur son site web des commentaires /3/ sur le contrat de coalition et la politique du climat et de l´énergie du futur gouvernement. Selon Prognos l´Allemagne risque, sans de conséquents efforts supplémentaires, très vraisemblablement un échec des objectifs à court et moyen terme de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Le contrat de coalition ne traite pas le thème du climat et de l´énergie de façon transparente. Les thèmes liés en la matière sont traités dans des chapitres différents. Le chapitre « énergie » traite principalement le secteur de l´électricité. La sortie du charbon, l´efficacité énergétique ou le transport sont traités ailleurs. Il n’apparaît pas encore clairement dans le texte qu´il faut accélérer la mise en œuvre des actions de protection du climat et de l´efficacité énergétique dans tous les secteurs.
Une analyse de Deutsche Bank Research /4/ résume le chapitre politique énergétique avec les mots « l´existence des problèmes a été détectée mais sans les nommer explicitement « . Un vrai examen des problèmes du passé n´a pas eu lieu. Le triangle énergétique est sollicité sans mentionner le fait que l´objectif « compétitivité » jouait un rôle mineur dans le passé et sans indiquer d´instruments pour l´atteindre.
Les partenaires de la coalition réaffirment les objectifs de réduction des gaz à effet de serre sans faire d´analyse approfondie sur l´échec de l´objectif 2020. La commission déjà citée fera des propositions, c´est une méthode pour gagner du temps et déléguer la responsabilité.
Références
/1/ Contrat de coalition SPD, CDU/CSU : koalitionsvertrag_2018
/2/ Communiqué de presse du BDEW du 7.2.2018 : « Stefan Kapferer zu den Ergebnissen der Koalitionsverhandlungen », https://www.bdew.de/presse/presseinformationen/stefan-kapferer-zu-den-ergebnissen-der-koalitionsverhandlungen/
/3/ Prognos : « Der Koalitionsvertrag aus Sicht der Zukunfts- und Wirtschaftsforscher der Prognos AG » Thema 7/15 : Klimaschutz und Energiewende, https://www.prognos.com/fileadmin/images/Newsletter/Sonder_NL_Extrablatt_TL_KoaVertrag/180213_7_Klimaschutz_und_Energiewende_Prognos_GroKo_Kommentierung.pdf
/4/ Deutsche Bank Research, Koalitionsvertrag – Zukunft geht anders, 5 mars 2018, https://www.dbresearch.de/PROD/RPS_DE-PROD/PROD0000000000464120/Koalitionsvertrag_%E2%80%93_Zukunft_geht_anders.PDF