Allemagne : les chiffres clés de l’énergie en 2024

Texte mis à jour le 13.12.2025

Temps de lecture : 2 min (résumé), 30 min (article entier)

Les 10 points essentiels 

  1. La consommation énergétique en Allemagne marque un recul de 1,1% par rapport à 2023 et atteint un niveau historiquement bas. La principale raison est la conjoncture toujours en berne ;
  1. Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) continuent de représenter plus de trois quarts de la consommation énergétique ;
  1. Principalement marquée par la baisse de production du couple lignite/houille et l’absence du nucléaire, la production brute d’électricité recule de 2% par rapport à 2023 ;
  1. Les énergies renouvelables sont en progression de presque 4% par rapport à 2023 et atteignent – lissées sur l’année – environ 58% de la production brute d’électricité et 55% de la consommation intérieure brute ;
  1. Avec 457 heures à prix négatif sur le marché de gros de l’électricité le record de 2023 (301 pas horaires) a été battu. D’autre part, pendant un court épisode pratiquement sans vent ni ensoleillement en décembre, les prix sur les marchés de gros se sont envolés dans la soirée du 12 décembre 2024 à 936 €/MWh. L’Allemagne, jouant un rôle clé dans la formation des prix de l’électricité en Europe, a fait s’envoler les prix spot non seulement au niveau national mais aussi chez certains de ses voisins, notamment les pays scandinaves ;
  1. L’Allemagne a été à nouveau importatrice nette d’électricité. En 2024, le solde des échanges transfrontaliers s’est encore creusé par rapport à 2023 : importations principalement de la France et des pays scandinaves ;
  1. L’approvisionnement en gaz a été assuré en 2024. La Norvège est de loin le principal fournisseur de gaz naturel par gazoduc, le GNL (Gaz Naturel Liquéfié) provient principalement des États-Unis ;
  1. La part des véhicules « 100% électrique » au parc de véhicules de tourisme immatriculés en Allemagne (~ 49,3 millions) est actuellement d’environ 3,3%. L’atteinte de l’objectif de 15 millions véhicules « 100% électrique » d’ici 2030 semble inaccessible ;
  1. Les prix de l’électricité et du gaz pour le consommateur résidentiel ont baissé par rapport à 2023, sans toutefois retrouver les niveaux d’avant-crise ;
  1. Selon les données provisoires de l’Agence Fédérale de l’Environnement, les émissions de gaz à effet de serre ont baissé de 3,4% par rapport à 2023, principalement en raison du recul de consommation du charbon.
Umspannwerk Strom Leitung
Source : Bundesnetzagentur

Sommaire

Consommation énergétique

Secteur électrique

  • Production et consommation d´électricité
    • Deux courts épisodes pratiquement sans vent ni ensoleillement en novembre et décembre 2024
  • Parc de production
    • Besoin de moyens pilotables à l’horizon de 2030
    • Adaptation de la production industrielle en fonction de la météo
  • Relation entre capacité nette et production nette
  • Stockage de l’énergie
  • Échanges transfrontaliers d’électricité
  • Réseaux de transport
    • Gestion de la congestion du réseau de transport
  • Prix de l’électricité
    • Evolution des prix sur le marché de gros de l´électricité
    • Episodes de prix négatifs au marché journalier
    • Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Economie de l’hydrogène

Secteur de la chaleur et du froid

  • Réseaux de chaleur et de froid
  • Branche gazière
    • Consommation de gaz naturel
    • Evolution des volumes de vente de gaz naturel par groupe de consommateurs
    • Prix du gaz pour les clients résidentiels

Secteur des transports

Émissions de gaz à effet de serre

Nouvelle stratégie de la capture et du stockage du CO2

Références

Consommation énergétique

La consommation énergétique en Allemagne baisse en 2024 de 1,1% par rapport au niveau déjà historiquement bas de 2023 et se situe presque 30% sous le niveau de l’année 1990.

Selon AG Energiebilanzen (AGEB 2025b) la consommation d’énergie primaire s’élève à 2927 TWh ou 252 Mtep (2023 : 2959 TWh ou 254 Mtep).

Des températures plus chaudes par rapport à 2023 ont eu un effet sur la consommation de chaleur dans le secteur résidentiel.

En l’absence d’une reprise conjoncturelle, l’évolution économique n’a pas eu d’effets significatifs. En revanche, la croissance démographique et la baisse des prix de l’énergie ont contribué à l’augmentation de la consommation énergétique.

Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) continuent de représenter plus de trois quarts de la consommation énergétique. Le pétrole (36,5%) reste l’énergie fossile la plus importante en 2024, suivi par le gaz naturel (25,9%).

La consommation des produits pétroliers a connu une légère baisse de 0,9% par rapport à 2023. La consommation de gaz naturel a augmenté de 4% en 2024, principalement due à la baisse du niveau des prix.

Le charbon (couple lignite/houille) est à la baisse et atteint une part totale de 14,9% de la consommation d’énergie primaire contre 16,5% en 2023, cf. figure 1.

La consommation du lignite baisse de 10,2% par rapport à 2023 notamment en raison d’un recul des livraisons vers les centrales électriques.

La consommation de la houille baisse de 10,0% par rapport à 2023. Alors que la consommation de la houille dans l’industrie sidérurgique a augmenté d’environ 7%, son utilisation dans les centrales électriques a baissé d’environ 30% suite à l’augmentation de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables et notamment des importations accrues d’électricité.

En raison de la fermeture définitive des trois dernières centrales mi-avril 2023, le nucléaire ne contribue plus à l’approvisionnent énergétique en 2024. Pour plus d’informations sur le nucléaire voir aussi (Allemagne Energies 2).

Figure 1 : consommation d´énergie primaire selon AG Energiebilanzen

La part des énergies renouvelables à la consommation d’énergie primaire progresse de 1,1% et atteint 20% (2023 : 19,4%). Cause principale : augmentation significative de la production d’électricité à partir du photovoltaïque et de l’hydroélectricité. En revanche, la production électrique à partir de l’éolien a baissé de 2% en raison de mois d’automne relativement peu venteux et l’utilisation d’énergies renouvelables pour la production de chaleur a diminué d’environ 1% par rapport à l’année dernière en raison de la météo plus clémente.

La part « divers » a augmenté, principalement du fait que l’Allemagne a importé encore plus d’électricité qu’en 2023.

La part des énergies renouvelables dans la consommation énergétique  par usage (électricité, chaleur et froid, transports) et l’objectif de 2030 sont illustrés sur la figure 2 du texte « Énergies renouvelables : de nombreux défis »  (Allemagne Energies 3)

Pour une comparaison des bilans énergétiques entre l’Allemagne et la France, voir (Allemagne Energies 4).

Secteur électrique

Production et consommation d’électricité

La production brute d’électricité s’élève à 496 TWh (AGEB 2025a ; UBA 2025a) et enregistre ainsi un léger recul de 2% par rapport à 2023 (506 TWh).

La production a été influencée en 2024 notamment par la conjoncture toujours en berne et une météo plus clémente. A cela s’ajoute fin mars 2024 la fermeture ou la mise en réserve de centrales thermiques à flamme dont le fonctionnement a été temporairement prolongé suite à la crise énergétique.

Selon les chiffres provisoires environ 286 TWh bruts ont été produits par les énergies renouvelables, soit environ 58% de la production brute totale. Presque la moitié de la production renouvelable provient de l’éolien (terrestre et maritime). Plus d’informations sur le bilan 2024 de l’éolien en Allemagne se trouvent dans (Allemagne Energies 2025).

Figure 2 : Production brute d’électricité (hors STEP : Stations de Transfert d’Énergie par Pompage) en 2024

La production nette (hors STEP) mesurée/évaluée à la sortie d’une centrale, c’est-à-dire déduction faite de la consommation des services auxiliaires et des pertes dans les transformateurs des centrales, s’élève à 474 TWh en 2024 (AGEB 2025a).

La figure 3 montre l’évolution de la production nette des différentes filières depuis 2010 (AGEB 2025a). En 2018 la production renouvelable a dépassé la production du charbon (couple houille/lignite) et constitue depuis la principale source de production dans le mix électrique allemand.

La production du couple houille/lignite a diminué de 60% entre 2010 et 2024 et a atteint son niveau le plus bas depuis la réunification de l’Allemagne.

Le nucléaire ne contribue plus à l’approvisionnent électrique en 2024.

Figure 3 : évolution de la production nette des différentes filières depuis 2010

La figure 4 montre bien que la hausse célébrée de la production renouvelable ne saurait dissimuler qu’en chiffres absolus, la production nette d’électricité bas-carbone se retrouve en 2024 au même niveau que 2017.

Jusqu’à présent, les énergies renouvelables n’étaient pas en mesure de compenser la perte de production des centrales nucléaires (AGEB 2025a). Résultat : sept années perdues sur la route d’un approvisionnement en électricité climatiquement neutre.

Figure 4 : évolution de la production nette bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaire)

Le tableau 1 détaille la production brute en 2023/2024 pour chaque filière du secteur de l’électricité, y compris la production destinée aux propres besoins de l’industrie et l’autoconsommation individuelle et collective (AGEB  2025a ; UBA 2025a).

Tableau 1 : production et consommation d’électricité 2023 et 2024

* production brute hors STEP : la production brute est la quantité d’électricité mesurée aux bornes des alternateurs d’une centrale, elle inclut donc la consommation d’électricité par les auxiliaires de la centrale et les transformateurs ;

** Consommation intérieure brute hors STEP : la production brute plus le solde des échanges transfrontaliers d’électricité ;

La production d’électricité en 2024 a été principalement marquée par la baisse de production du couple lignite/houille et l’absence du nucléaire.  

Malgré le recul de la production éolienne en raison de l’automne 2024 relativement peu venteux, les filières renouvelables enregistrent une hausse de presque 4% notamment grâce au photovoltaïque et à l’hydro-électricité (AGEB  2025a ; UBA 2025a). 

Amplifiée par la baisse de la production brute, leur part passe – lissée sur l´année – à environ 58% (286TWh), contre 54% en 2023 (275 TWh). Toutefois, leur production reste 24 TWh sous l‘objectif de 310 TWh fixé pour 2024 par la Loi sur la promotion des énergies renouvelables. Pour plus d’informations sur les énergies renouvelables, voir aussi (Allemagne Energies 3).

La consommation intérieure brute d’électricité s’élève à 522 TWh (hors STEP) soit une légère augmentation par rapport à 2023 (515 TWh). Le déficit entre la production brute nationale et la consommation brute a été comblé par des importations d’électricité qui ont atteint un nouveau record (voir plus loin).

Sous l’hypothèse que l’électricité produite à partir des énergies renouvelables serait entièrement consommée en Allemagne, leur part dans la consommation intérieure brute d’électricité atteint 55% contre 53% en 2023 (AGEB 2025a ; UBA 2025a). Conformément aux prescriptions du gouvernement fédéral, il s’agit du taux déterminant pour la réalisation des objectifs en matière d’énergies renouvelables.

La tendance baissière de la consommation électrique nationale depuis une dizaine d’années contraste avec les prévisions d’évolution de la demande : la stratégie bas carbone de l’Allemagne s’appuie en effet sur une électrification des usages, donc une hausse de la consommation brute à 750 TWh d’ici 2030.

Deux courts épisodes pratiquement sans vent ni ensoleillement en novembre et décembre 2024

Pendant deux courts épisodes pratiquement sans vent ni soleil en novembre et décembre 2024, l’Allemagne, jouant un rôle clé dans la formation des prix de l’électricité en Europe, a fait s’envoler les prix sur le marché spot non seulement au niveau national mais, notamment lors de l’épisode en décembre, aussi chez certains de ses voisins, cf. figure 5. La Norvège mais aussi la Suède ont fait part de leur mécontentement.

Grâce aux moyens pilotables en back-up (notamment centrales thermiques à flamme) et des importations massives d’électricité (jusqu’à 17 GW le 12.12.2024) la situation a pu être maitrisée. Par chance, la demande d’électricité était à ce moment-là bien inférieure à la demande lors de la pointe annuelle.

Toutefois, des prix de l’électricité élevés ont été enregistrés sur le marché spot (Day – Ahead) à deux reprises pendant quelques heures en novembre (820 €/MWh) puis en décembre (936 €/MWh). Le prix sur le marché intra-journalier ou « Intraday » a même atteint 1.158 €/MWh le 12.12.2024, cf. figure 5.

Fig 5 Dunlelflauten 11_12 2024
Figure 5 : épisodes hivernaux pratiquement sans vent ni ensoleillement en novembre et décembre 2024

Certaines entreprises électro-intensives, qui achètent sur le marché en temps réel, ont témoigné avoir dû limiter ou arrêter momentanément leur production. En revanche la plupart des particuliers et de nombreuses entreprises ont des tarifs fixes, qui les préservent de ces fluctuations. Et la situation est rapidement revenue à la normale.

En principe, les pics de prix de gros sont le résultat de la libre formation des prix entre l’offre et la demande et font partie du fonctionnement du marché de l’électricité à court terme. Toutefois, afin d’exclure tout abus, le régulateur a examiné les raisons et les causes de ces pics. Selon le rapport publié début novembre 2025, il n’y a aucune indication de comportement abusif au sujet des pics de prix de gros en automne 2024 (BNetzA 2025f).

Une contribution scientifique sur l’épisode en novembre 2024 sans vent ni soleil, appelé « Dunkelflaute » en allemand (Allemagne Energies 2024b), a été publiée par le Service météorologique allemand DWD (Deutscher Wetterdienst) en décembre 2024 (DWD 2024).

Conclusion : de manière générale, il faut s’attendre à une production éolienne inférieure à la moyenne en Allemagne lors d’une situation de haute pression (ou anticyclonique) en Europe centrale principalement en hiver. Le nombre de jours sans vent survenus jusqu’à présent en 2024 n’est pas inhabituel par rapport à l’occurrence de cette situation anticyclonique en Europe centrale observée depuis 1950/51.

Le « nombre moyen » de jours avec une telle situation météorologique était exactement de 8,19 par an. Le nombre maximal s’est produit durant l’hiver 2011/2012 avec 23 jours. Une absence de situation anticyclonique en Europe centrale ne s’est produite que pendant 6 hivers.

Il s’agit donc d’un évènement qui peut se produire relativement souvent et pour lequel un système électrique fonctionnant doit être préparé.

Parc de production

L’Allemagne exploite deux parcs de production en parallèle : un parc composé d’énergies renouvelables et un parc composé principalement de centrales thermiques à flamme.

Alors que le parc d’énergies renouvelables ne cesse d’augmenter, la capacité de centrales thermiques et donc des moyens pilotables est en recul, cf. tableau 2 (BDEW 2024a ; BNetzA 2024e ; UBA 2025a). Néanmoins, l’objectif de la sortie de la production d’électricité à partir de la houille et du lignite d’ici 2030 dans « l’idéal » est toujours maintenu.

Tableau 2 : Capacité de production au réseau, en réserve stratégique ou provisoirement arrêtée (hors les systèmes de stockage : STEP, batteries etc.)

Besoin de moyens pilotables à l’horizon de 2030

Pour atteindre l’objectif d’une production d’électricité de presque 100% à partir des énergies renouvelables à l’horizon de 2035 et pouvoir pallier la défaillance des énergies renouvelables variables quand c’est nécessaire, il faut, en l’absence de systèmes de stockage d’énergie suffisants, conserver un deuxième parc de production de centrales au gaz convertissables à l’hydrogène, pour prendre le relais.

En février 2024, la coalition gouvernementale avait annoncé qu’elle s’était mise d’accord sur les principaux éléments d’une stratégie de moyens pilotables à l’horizon de 2030/2035. Elle sera inscrite dans la loi sur la sécurisation des centrales électriques (Kraftwerkssicherheitsgesetz) dont le projet a été publié en juillet 2024 (Allemagne Energies 1 ; BMWK 2024f). Les points clefs sont les suivants :

  • Une capacité totale de 500 MW fera l’objet d’un appel d’offres afin de permettre l’expérimentation et la mise sur le marché de centrales électriques pouvant fonctionner immédiatement à 100% à l’hydrogène. Ce projet sera subventionné (investissement et coûts d’exploitation).
  • La mise en adjudication de 10 GW de nouvelles centrales à gaz « prêtes pour l’hydrogène » qui fonctionneront d’abord au gaz naturel et seront converties à l’hydrogène entre 2035 et 2040. De plus il est prévu de subventionner 500 MW de dispositifs de stockage d’énergie et de transformer à l’hydrogène 2 GW de centrales à gaz existantes.
  • La mise en place d’un mécanisme de capacité, lequel devrait être opérationnel d’ici 2028. Le mécanisme de capacité permet le maintien en fonctionnement de capacités existantes de production d’électricité nécessaires à la sécurité d’approvisionnement. Concrètement, des moyens de production peuvent être, après certification, rémunérés pour rester « disponibles » lors des périodes de pointe hivernale qui génèrent des situations de tension sur le réseau.

Suite à la dissolution du parlement allemand en décembre 2024 la loi citée ci-dessus n’est pas encore entrée en vigueur.

Néanmoins, on peut douter qu’un ajout de seulement 10,5 GW au parc de centrales à gaz existant soit suffisant pour gérer des épisodes hivernaux sans vent ni ensoleillement lors d’une situation de pointe annuelle de 80 GW ou plus.

Différentes analyses sur la sécurité d’approvisionnement ont mis en évidence une urgence d’agir à l’horizon 2030.  Selon le dernier rapport d’évaluation des progrès de la transition énergétique de la Commission d’experts indépendants (BMWK 2024b), la comparaison de différentes études à long terme montre de très grandes disparités au sujet de l’ajout de nouvelles capacités de moyens pilotables à l’horizon 2030, variant entre 27 et 70 GW. Les arguments qui se cachent derrière ces résultats ne sont que partiellement compréhensibles.

Dans ce contexte, la Commission estime qu’il est urgent de clarifier les résultats divergents des analyses de la sécurité d’approvisionnement, afin d’établir une base stratégique solide.

Adaptation de la production industrielle en fonction de la météo

Une autre approche pour pallier un déficit de production des énergies renouvelables variables en cas de forte demande d’électricité serait l’utilisation des sources de flexibilité et de la modulation de la demande (réduction ou déplacement temporaire de la consommation). Cela permettrait de réduire la capacité de moyens pilotables en backup.

Un document du Ministère de l’Economie et de la Protection du Climat publié en août 2024 a toutefois alarmé l’industrie allemande (BMWK 2024c).

Les intentions du gouvernement fédéral pour un « futur market design de l’électricité » prévoient que les entreprises devraient orienter leur production en fonction de l’offre quotidienne d’électricité éolienne et solaire afin de soulager les réseaux électriques.

Les entreprises seraient récompensées lorsqu’elles réduisent leur production s’il y a peu d’électricité éolienne ou solaire injectée au réseau et sanctionnées dans le cas contraire.

En fait, il s’agit d’un virage à 180 degrés du système d’incitation actuellement en vigueur. Depuis 2005, les grandes entreprises électro-intensives bénéficient de réductions sur leurs tarifs d’utilisation du réseau si elles consomment de grandes quantités d’électricité de manière continue, pendant au moins 7000 heures par an.

Selon le document du ministère ces réductions ne seront plus accordées à celles qui consomment en permanence de l’électricité, mais à celles dont le comportement de consommation suit de manière « flexible » les fluctuations de la production éolienne et solaire.

L’industrie devrait donc baser sa production sur la météo et devenir un consommateur d’électricité « flexible ». Selon le régulateur, cela serait indispensable pour éviter que les énergies renouvelables variables mettent en péril la sécurité de l’approvisionnement.

Selon l’industrie il s’agirait d’un « signal dévastateur » pour certaines entreprises du pays si une production 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 n’était plus possible ou seulement avec des coûts d’électricité très élevés.

L’Agence fédérale des réseaux a essayé d’apaiser l’industrie et souligne que la nouvelle réglementation « ne surchargera pas les consommateurs finaux ». Il est prévu de « réaliser le potentiel de flexibilité effectivement disponible et réalisable à l’avenir ».

Toutes les parties prenantes intéressées avaient jusqu’au 6 septembre 2024 pour faire part de leurs réactions sur les options présentées. L’Agence allemande de l’Energie (dena) a publié les résultats de la consultation en octobre 2024 (dena 2024).

Une décision finale est attendue courant 2025.

Relation entre capacité nette et production nette

La figure 6 montre pour chaque filière la relation entre la capacité nette et la production nette en 2024 (BDEW 2024a ; AGEB 2025a). Les énergies renouvelables variables (éolien et photovoltaïque) représentent environ 64% de la capacité nette et 44% de la production nette.

Figure 6 : capacité nette et production nette des différentes filières en pourcentage en 2024 (hors installations de stockage d’énergie)

Stockage d’énergie

L’Allemagne dispose fin 2024 d’une capacité de stockage totale d’environ 60 GWh. STEP et batteries ensemble pourraient théoriquement couvrir la demande en électricité en Allemagne pendant une heure. Des épisodes pratiquement sans vent ni soleil peuvent toutefois durer jusqu’à deux semaines et se produire plusieurs fois pendant la période hivernale (Allemagne Energies 3).

Les STEP (Stations de Transfert d’Énergie par Pompage) en Allemagne y compris les installations au Luxembourg et en Autriche qui injectent de l’électricité directement dans le réseau allemand ont une puissance nette totale de près de 10 GW réversible (BNetzA 2024e) et une capacité de stockage d’environ 40 GWh par cycle de charge.

En 2024, le pompage s’élevait à 8,3 TWh, contre un turbinage de 6,3 TWh (AGEB 2025a), soit un rendement d’environ 76% (ratio turbinage – pompage).

De plus, 12,6 GW de stockage stationnaire sur batterie d’une capacité totale de 18,5 GWh sont répertoriés en Allemagne fin 2024. La plus grande part revient aux batteries d’une capacité de stockage inferieure à 1 MWh (RWTH Aachen University 2024).

Tab 3 : stockage stationnaire sur batterie en Allemagne

Outre la puissance de stockage (GW), la capacité de stockage (GWh) est un paramètre important. Il convient de faire la distinction entre la capacité de stockage théorique et réelle. En effet, de nombreux systèmes de stockage par batterie ne sont pas entièrement déchargeables en mode de fonctionnement normal. Le rapport entre la capacité de stockage (en kWh) et la puissance de stockage (en kW) est en moyenne d’environ 1,5, ce qui signifie qu’une batterie peut fournir sa puissance nominale pendant 1,5 heure en moyenne. 

Échanges transfrontaliers d’électricité

Pour un pays donné, le solde total des échanges physiques et commerciaux devrait, dans l’idéal, être le même. Il convient toutefois de noter qu’en raison de la situation centrale de l’Allemagne en Europe, une certaine partie des flux physiques transfrontaliers sont des flux de transit et des flux en boucle.

Les échanges transfrontaliers dépendent non seulement de l’offre et de la demande, mais aussi des prix de l’électricité dans les pays voisins. Les prix sur les marchés de gros journaliers (Day – Ahead) de chaque pays sont le résultat de cette interaction.

En 2023 l’Allemagne a été importatrice nette d’électricité pour la première fois depuis 2002. En 2024, le solde des échanges transfrontaliers pour l’Allemagne s’est encore creusé (AGEB 2025a). Le solde importateur net est de 26,3 TWh (cf. figure 7) ce qui représente environ 5% de la consommation nationale d’électricité. Les importations proviennent principalement de la France et des pays scandinaves.

Le régulateur allemand a souligné que le fait d’être importatrice nette d’électricité ne permet pas de conclure à un manque de capacités de production. De nombreux pays européens voisins produisent leur électricité à un prix nettement inférieur, ce qui signifie qu’il peut être plus judicieux d’importer de l’électricité non seulement en raison du manque de capacité des centrales, mais aussi pour des raisons économiques.

Figure 7 : solde des échanges transfrontaliers d’électricité en TWh

Néanmoins, ces données indiquent que le mix de production allemand est cher par rapport à d’autres pays européens. Au cours de l’année 2024, le prix moyen du marché de gros de l’électricité en Allemagne était supérieur de presque 10% à celui des pays riverains, tandis que la différence n’était que de 2,2% en 2023 (BNetzA 2025a).

L’Agence Fédérale des Réseaux fournit approximativement les différentes sources d’électricité des importations en provenance des pays voisins (BNetzA 2025c).

Bien entendu, une fois l’électricité injectée dans le réseau, il n’est plus possible de l’attribuer à une source d’électricité particulière. Les données disponibles pour chaque quart d’heure sur le mix de production électrique et les échanges commerciaux pour tous les pays du marché intérieur européen permettent néanmoins de calculer approximativement la part des différentes sources d’électricité dans les importations d’électricité.

Selon le régulateur, le nucléaire représente désormais une part importante des importations d’électricité, cf. figure 7a. En 2024, la première année au cours de laquelle l’Allemagne a dû totalement se passer de sa propre énergie nucléaire, la part d’importation d’électricité d’origine « nucléaire » atteint presque 28%. Il s’agit principalement des importations d’énergie nucléaire de la France.

Figure 7a : sources d’électricité des importations en provenance des pays voisins en 2024

Si, selon les déclarations du régulateur (voir plus haut), les importations dépendent des prix de l’électricité dans les pays voisins, l’énergie nucléaire s’avère donc très compétitive en 2024.

Réseaux de Transport

Un approvisionnement électrique basé sur des sources d’énergies renouvelables recèle de nouveaux défis pour les réseaux de transport et de distribution. En effet, le nombre d’installations à raccorder aux réseaux augmente significativement avec la transition énergétique aussi bien côté producteurs que consommateurs.

Dorénavant, une grande partie de l’électricité sera injectée de manière décentralisée dans les réseaux électriques et transportée en partie sur de longues distances. Le développement des réseaux de transport et de distribution est crucial pour la transition énergétique. Les gisements de vent, dans le nord du pays, étant géographiquement distants des grands centres de consommation dans l’ouest et sud industriel, l’épine dorsale est constituée par plusieurs tracés nord – sud en courant continu afin de limiter les congestions (Allemagne Energies 1).

Au total 128 projets à terre (nouvelles lignes, renforcement des lignes existantes) sont en cours soit environ 16.800 km dont 5.400 km en courant continu. Seulement 18,4%, soit 3085 km étaient réalisés à la fin du 3e trimestre 2024 (BNetzA 2024b).

En mars 2024 le régulateur a donné son accord final au plan de développement du réseau 2037/2045 (BNetzA 2024d). Il porte sur les années 2037 et 2045 (année cible de la neutralité climatique) et tient compte pour la première fois des objectifs de la loi sur la promotion des énergies renouvelables de 2023 (EEG 2023). Le besoin d’extension du réseau de transport augmentera considérablement d’ici 2045 par rapport aux projets en cours.

L’amendement à la Loi sur le besoin de développement du réseau de transport à terre visant à inclure les projets du plan de développement du réseau 2037/2045 est en cours d’examen législatif.

Selon la Loi sur l’éolien en mer (Windenergie-auf-See-Gesetz – WindSeeG), il est prévu que la capacité totale soit portée à au moins 30 GW d’ici 2030 et à 40 GW d’ici 2035 (BNetzA 2024b ; BMWK 2024 d).

Le « réseau de départ »  comprend environ 12,6 GW dans la mer du Nord et environ 2,2 GW dans la mer Baltique. Le « réseau additionnel » comprend toutes les connexions, qui ont été confirmées dans les plans de développement du réseau jusqu’à l’année 2031 incluse, soit une trajectoire de développement de 34 GW.

Au 3e trimestre 2024, 13 projets de raccordement ont été achevés en mer du Nord pour une capacité totale d’environ 8 GW et 8 projets en mer Baltique pour une capacité totale d’environ 1,8 GW

Gestion de la congestion du réseau de transport

La transition énergétique se traduit par une augmentation continue de la part des énergies renouvelables dans le mix électrique allemand.

Notamment l’injection accrue d’électricité éolienne dans le nord du pays a provoqué un net déséquilibre géographique entre la production éolienne dans le nord et les centres de consommation du sud et de l’ouest du pays. Les installations photovoltaïques au sol sont également de plus en plus souvent construites loin de centres à forte consommation. De plus, la production du photovoltaïque constitue un défi de plus en plus important pour la stabilisation du système électrique en raison de l’injection incontrôlée au réseau des petites installations < 100 kW (voir plus loin).

Suite à l’arrêt du nucléaire mi-avril 2023 et la fermeture programmée des centrales à charbon on constate en outre une diminution progressive des moyens pilotables sur le réseau.

La réforme du marché européen de l’électricité a entrainé une augmentation du volume d’échanges d’électricité entre les pays de l’UE. Le réseau de transport allemand est particulièrement sollicité par les importations d’électricité en provenance des pays scandinaves et par les exportations vers les pays voisins du sud et du sud-ouest.

Ce fait se superpose à l’injection accrue d’électricité éolienne dans le nord du pays, déjà mentionnée, associé à des retards dans la modernisation du réseau de transport, et provoque des forts flux nord – sud d’électricité.

Les risques de congestion du réseau de transport sont actuellement évités grâce aux mesures d’équilibrage (Allemagne Energies 3) comme le redispatching : si un goulet d’étranglement menace certaines lignes électriques, l’injection au réseau d’une installation de production d’électricité est réduite en amont mais augmentée en aval du goulet d’étranglement par une autre installation de production. Cela permet de modifier les flux physiques afin de réduire les congestions des lignes électriques concernées.

Pour des raisons de droit européen et parce que l’Allemagne importe de l’électricité à d’autres moments, il n’est pas question d’empêcher les exportations vers les pays voisins.

Pour améliorer l’équilibrage du réseau, l’Agence Fédérale des Réseaux avait décidé en 2017 (BNetzA 2024g) la mise en service de turbines à combustion (4 sites dans le sud du pays d’une puissance totale de 1200 MW). De telles installations de stabilisation du réseau sont nécessaires, selon l’Agence Fédérale des Réseaux, pour faire face aux défis particuliers de la période entre l’arrêt des dernières centrales nucléaires et l’achèvement des grandes lignes de courant continu.

Afin de garantir la stabilité du réseau même dans des situations dégradées, les gestionnaires de réseau de transport font appel, en cas de besoin, à des centrales électriques ciblées pour le redispatching. L’expérience montre que le besoin de redispatching est le plus élevé pendant l’hiver.

Si la capacité de production sur le marché d’électricité est insuffisante pour effectuer le redispatching necessaire, les gestionnaires de réseau de transport font appel à des centrales de réserve. Le tableau 4 montre les besoins de centrales en réserve qu’il convient de se procurer pour les hivers jusqu’à 2027/2028 (BNetzA 2025e).

Tableau 4 : besoin identifié de centrales de réserve jusqu’à 2027/2028

Dans la mesure où le besoin en centrales de réserve ne peut pas être couvert exclusivement par des centrales de réserve nationales, il est nécessaire de se procurer de la puissance de réserve supplémentaire dans les pays voisins.

Depuis les dix dernières années, on observe une flambée des coûts des mesures d’équilibrage (i.e. redispatching, countertrading et centrales de réserve) pour éviter la surcharge de certaines sections des réseaux.  

L’augmentation de la capacité d’énergies renouvelables variables oblige les gestionnaires de réseau à écrêter plus souvent leur production dans le nord et augmenter la production thermique pilotable dans le sud du pays  (Allemagne Energies 3).

La figure 8 montre depuis 2015 l’évolution des coûts des mesures d’équilibrage des réseaux et les volumes d’électricité écrêtés (incitation ou obligation donnée à un certain nombre de centrales de réduire ou arrêter leur production).

Figure 8 : évolution des coûts d’équilibrage des réseaux et des volumes d’électricité écrêtés

Après un record enregistré en 2022 avec plus de 4 Md€, les coûts des mesures d’équilibrage des réseaux ont baissé à environ 3,3 Md€ en 2023, principalement en raison de la baisse du prix de gros (BNetzA 2024c).

En 2024, selon les données provisoires du régulateur (BNetzA 2025d), ces coûts ont baissé à environ 2,9 Md€, cf. figure 8. Raison principale : baisse du prix des combustibles et recul des besoins de redispatching.

Au total, environ 6% de la production brute de l’Allemagne, soit un volume d’électricité de 30,3 TWh a été écrêté en 2024, dont environ 31% (~ 9,4 TWh) relèvent de la production renouvelable. Les éoliennes maritimes et terrestres ont été la source de production renouvelable la plus écrêtée.

Prix de l’électricité

Evolution des prix sur le marché de gros de l’électricité

Suite à la crise énergétique née de la guerre en Ukraine, le prix de gros de l’électricité en Allemagne avait flambé en 2022, cf. figure 9. En 2023 le prix de gros de l’électricité est redescendu au niveau de 2021.

En 2024 le prix de gros a de nouveau baissé à 78,51 €/MWh. Par rapport au prix en 2023 de 95,18 €/MWh, cela représente une réduction de 17,5%. La part plus élevée des énergies renouvelables dans la production d’électricité y a contribué, mais aussi la baisse des prix du gaz.

Le remplacement du gaz russe, moins onéreux, par le GNL (Gaz Naturel Liquéfié), conduira vraisemblablement à un maintien des prix de gros de l’électricité à un niveau supérieur à l’avant crise énergétique.

La figure 9 montre les moyennes annuelles de 2019 à 2024 des prix journaliers (dit « Day – Ahead ») sur le marché de gros pour la zone Allemagne/Luxembourg (BNetzA 2025a).

Fig 9 Prix spot 2019_2024
Figure 9 : moyennes annuelles de 2019 à 2023 des prix journaliers (Day – Ahead) sur le marché de gros de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

Le tableau 5 montre, pour la période de 2019 à 2024, les prix de gros extrêmes pour la zone Allemagne/Luxembourg.

Tab 5 prix spot 2024
Tableau 5 : moyennes annuelles des prix de gros (day-ahead) de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

En 2024, des prix de gros supérieurs à 100 €/MWh ont été enregistrés pendant 2.296 heures contre 4.106 heures en 2023. Ce net recul des heures supérieures à 100 €/MWh a eu un impact positif sur les prix de gros moyens.

Le prix de gros le plus élevé de 2024 a été enregistré le jeudi 12 décembre entre 17h et 18h avec 936,28 €/MWh. Dans cette plage horaire, une consommation d’électricité élevée a coïncidé avec une très faible production des énergies renouvelables variables (voir plus haut).

Episodes de prix négatifs au marché de spot journalier

Depuis plusieurs années le marché de gros de l’électricité en Allemagne est confronté à une hausse des épisodes de prix négatifs. Les prix négatifs se produisent lorsque la quantité d’énergies renouvelables injectées est élevée, que la consommation est faible et que la production thermique à flamme inflexible est importante (epexspot 2024).

Les prix négatifs sont observés principalement lors des périodes de surproduction d’énergies renouvelables variables en raison des régimes de soutien. Bien que le coût marginal de la production renouvelable soit nul, dans le cas d’un régime de soutien tel que l’obligation d’achat (OA) les producteurs sont incités à maintenir leur production. Les exploitants de réseau sont tenus par la loi sur les énergies renouvelables d’absorber les kilowattheures sans valeur et de les vendre sur le marché de l’électricité. Dans ces situations, les acheteurs reçoivent effectivement des paiements et de l’électricité de la part des vendeurs.

Il faut toutefois concéder que, malgré leur hausse, les prix négatifs sont un phénomène relativement rare. Dans l’année 2023, l’Allemagne avait connu 301 heures de production électrique à prix négatif. En 2024, le record de 2023 a été encore battu. Au total 457 pas horaires à prix négatif ont été atteints, cf. figure 10. Cela signifie que 5,2% des heures en 2024 étaient négatives contre 3,4% en 2023.

Fig 10 Nombre heures prix negatif 2019_2024
Figure 10 : nombre de pas horaires à prix négatifs par trimestre sur le marché journalier (Day – Ahead) entre 2019 et 2024 (BNetzA 2025a)

En 2017 le gouvernement allemand avait pris des mesures contre la surproduction des grands parcs éoliens et solaires. La réglementation de 2017 a été durcie avec les avenants de la loi sur les énergies renouvelables (EEG).

La loi EEG 2023 prévoit, dès 2024, une suspension de la rémunération pour des installations ≥ 400 kW à partir de 3 heures de prix négatifs sans interruption. Le nombre d’heures sera progressivement réduit jusqu’à 2027 de sorte que les heures de prix négatifs ne seront plus rémunérées. Cette réglementation s’applique toutefois exclusivement aux nouvelles installations à partir de l’entrée en vigueur de l’amendement de la Loi EEG. Les installations préexistantes, les petites installations < 400 kW et les éoliennes pilotes ne sont pas encore concernées en 2024.

Selon une étude de l’institut de recherche de Munich d’octobre 2024 (FfE 2024) trois quarts des installations photovoltaïques et deux tiers des éoliennes continuaient à injecter dans le réseau sans suspension de leur rémunération en cas de prix négatifs.

Selon la Fédération allemande des industries de l’énergie et de l’eau (BDEW) l’État devrait agir afin que ces installations prennent leur part dans la gestion de la flexibilité en temps réel du système (BDEW 2024b).

Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

En 2024, le prix de l’électricité pour les clients résidentiels a baissé de 8% par rapport à l’année précédente, pour atteindre en moyenne 41,59 ct€/kWh (BNetzA 2024f) sans toutefois retrouver les niveaux d’avant-crise.

La cause principale en est la baisse des prix de gros de l’électricité. Même si cet effet ne se répercute sur les tarifs des clients résidentiels qu’avec un certain décalage et ne suit pas la même dynamique, la part de l’approvisionnement et de la distribution dans le prix de l’électricité, largement influencée par les prix de gros, a baissé de 52% à près de 44% ce qui correspond à une réduction de 5,5 ct€/kWh.

Cette réduction a été quelque peu contrecarrée par une augmentation des tarifs d’utilisation du réseau. Ils sont passés en moyenne de 9,35 ct€/kWh à 11,62 ct€/kWh, de sorte que leur part dans le prix de l’électricité des clients résidentiels est passée à 28%. La raison principale de cette augmentation fulgurante était la suppression des subventions de l’État qui ont été déclarées anticonstitutionnelles par la Cour Constitutionnelle Fédérale.  

Fig 11 Haushaltskundenpreis
Figure 11 : évolution et décomposition des prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Malgré cette baisse, le prix du kWh payé par les clients résidentiels en Allemagne était en 2024 le plus élevé d’Europe selon la base de données Eurostat (Allemagne Energies 4).

Les composants de prix réglementés par l’Etat (taxes, redevances et tarif d’utilisation des réseaux) représentent 56% du prix total, malgré la suppression de la charge de soutien des énergies renouvelables en 2022.

La charge de soutien aux énergies renouvelables, financée jusqu’à mi-2022 par le consommateur d’électricité, est dorénavant entièrement financée par l’État, soit in fine le contribuable, et n’apparait donc plus sur la facture d’électricité. 

Le besoin de financement des énergies renouvelables par l’État est estimé à presque 20 Md€ en 2024. La baisse des prix de gros de l’électricité en 2024 a conduit à une hausse des charges de soutien car la commercialisation de l’électricité verte a généré des recettes plus faibles (Allemagne Energies 3).

En tenant compte de cette charge de soutien, la facture d’électricité des clients résidentiels serait donc plus élevée.

Economie de l’hydrogène

L’hydrogène « vert » est pour l’instant quasiment absent du marché allemand, même si des projets pilotes ont été lancés. La majeure partie des quelque 40 TWh d’hydrogène produits en 2023 (BDEW 2024) provient de sources fossiles, principalement par le reformage du gaz naturel à la vapeur d’eau et la gazéification à partir de charbon. Environ 6% de la production totale de l’hydrogène « gris » sont générés comme sous-produit dans l’industrie chimique (ammonique, méthanol). Seulement 0,4% de l’hydrogène « vert » ont été produits par électrolyse, cf. figure 12.

Fig 12 Wasserstoff 2024
Figure 12 : production d’hydrogène en 2023 et développement de la capacité des électrolyseurs à l’horizon de 2030

Conscient de l’importance de l’hydrogène pour la réussite de la transition énergétique, le gouvernement allemand avait adopté en 2020 la « Stratégie nationale pour l’hydrogène ». L’objectif était de faire de l’hydrogène une technologie clé pour la décarbonation, pouvant remplacer les énergies fossiles et résoudre la variabilité de l’éolien et du solaire en stockant et restituant de l’énergie.

La stratégie nationale a été actualisée en 2023. Les principaux objectifs : une capacité nationale d’électrolyseurs d’au moins 10 GW d’ici 2030, le déploiement des infrastructures de transport d’hydrogène et le développement d’une stratégie d’importation d’hydrogène « vert ».

En 2024, l’Allemagne a porté sa capacité d’électrolyseurs à environ 110 MW. Une capacité d’environ 1 GW est en construction (EWI 2024).

La demande totale en hydrogène « vert » et ses dérivés est estimée entre 95 et 130 TWh par an en 2030. Le gouvernement prévoit d’en importer entre 50% et 70% (45 à 90 TWh). La pierre angulaire du futur approvisionnement en hydrogène est donc le développement renforcé de partenariats internationaux.

Actuellement il n’existe pratiquement pas d’importation ou d’exportation d’hydrogène vers ou depuis l’Allemagne. L’importation se concentre en grande partie sur les dérivés de l’hydrogène comme le méthanol et l’ammoniac.

Pour réaliser des importations, il faut que des infrastructures en Allemagne et dans les pays exportateurs potentiels soient disponibles.

En octobre 2024 l’Agence Fédérale des Réseaux (Bundesnetzagentur) a autorisé la mise en place du « réseau de démarrage » d’hydrogène d’une longueur de 9.040 km (Allemagne Energie 1). Il doit relier entre eux les principaux centres industriels du pays, les sites de stockage et les centrales électriques. De plus des points de connexion sont prévus aux frontières.

Le réseau de démarrage consisterait pour environ 60% en gazoducs existants reconvertis pour transporter de l’hydrogène et pour 40% en canalisations nouvellement construites. Les coûts d’investissement sont estimés à environ 19 Md€, l’achèvement du réseau est prévu pour 2032.

Secteur de chaleur et de froid

Le secteur du chaud et du froid représente plus de la moitié de la consommation d´énergie finale. Répondre à ces besoins grâce aux énergies renouvelables constitue un enjeu essentiel pour la réussite de la transition énergétique.

Pour atteindre cet objectif, il faut entre autres que les conditions-cadres soient réunies pour les champs de développement suivants :

  • Augmentation du taux de rénovation énergétique des bâtiments
  • Développement des réseaux de chaleur et décarbonisation du chauffage urbain
  • Utilisation efficace de la biomasse
  • Accroissement du parc de pompes à chaleur (PAC)

La nouvelle loi sur la rénovation énergétique des bâtiments (Gebäudeenergiegesetz) est entrée en vigueur en janvier 2024 (Allemagne Energies 1). Avec cette loi le gouvernement souhaite faire progresser le passage aux énergies renouvelables pour le chauffage des bâtiments car près de trois quarts des chauffages existants fonctionnent encore aux combustibles fossiles. L’obligation de remplacer les chaudières à combustibles fossiles sera mise en œuvre progressivement. Il n’y a pas d’obligation de remplacement immédiat des systèmes de chauffage existants mais il existe des dates butoirs : au plus tard en 2028, l’utilisation d’au moins 65% d’énergie renouvelable sera obligatoire pour les nouveaux systèmes de chauffage et à partir de 2045, plus aucune chaudière à gaz ou à mazout ne pourra fonctionner.

Les propriétaires de bâtiments actuellement équipés de chauffages au mazout, au gaz naturel ou au gaz liquide devront, dans de nombreux cas, passer à un autre système lors d’un prochain changement de chauffage.

La disponibilité et surtout les capacités en personnel des artisans spécialisés jouent aussi un rôle décisif dans la réalisation des objectifs.

Pour réussir la transition énergétique dans le secteur du chaud et du froid, il faut progresser dans la rénovation énergétique des bâtiments existants (1,3% à 2% par an). Cependant, le taux de rénovation réel a été bien inférieur à 1% en 2024 (Agora Energiewende 2025).

Le nombre de pompes à chaleur installées (PAC) s’élève à environ 2 millions fin 2024. L’objectif est d’augmenter leur nombre à au moins 6 millions d’ici 2030. C’est pour cela qu’il est prévu de mettre en service au moins un demi-million de PAC chaque année à partir de 2024.

Alors qu’en 2023, 356 000 PAC étaient encore vendues, ce chiffre a chuté de 44% pour atteindre seulement 200 000 appareils. L’objectif politique d’installer 500 000 PAC par an à partir de 2024 n’a donc pas été atteint (Agora Energiewende 2025).

Réseaux de chaleur et de froid

La Loi, entrée en vigueur début 2024, crée la base pour la consommation de chaleur et de froid et la décarbonation via des réseaux urbains (BMWK 2024a ; BMWSB 2023).

L’objectif est d’alimenter les réseaux urbains à 50% par des énergies renouvelables et de récupération d’ici 2030 et de rendre l’approvisionnement en chaleur et froid climatiquement neutre à l’horizon de 2045.

En 2024, selon des chiffres provisoires, les réseaux urbains de chaleur et de froid ont livré environ 127 TWh. Cela correspond à une baisse de 2,5 % par rapport à l’année précédente (BDEW 2024).

La part des énergies renouvelables et de récupération (EnR & R) au mix énergétique s’est élevée à 19,3%, cf. figure 13.

Fig 13 Nettowaermeerzeugung
Figure 13 : mix énergétique des réseaux de chaleur en 2024

Branche gazière

Consommation de gaz naturel

Selon les premières données de 2024 (BDEW 2024), la consommation de gaz naturel a légèrement augmenté par rapport à 2023 pour atteindre 835 TWh, cf. tableau 6.

Tab 6 Bilanz Erdgasversorgung
Tableau 6 : Approvisionnement en gaz naturel en Allemagne de 2021 à 2024

La consommation des clients résidentiels, de l’artisanat et du secteur  tertiaire représente environ 42% et celle de l’industrie, fournisseurs d’électricité et de chauffage urbain 58% en 2024.

L‘Allemagne est fortement dépendante des importations. Elle dispose seulement d’un petit nombre de gisements nationaux de gaz naturel qui ont fourni 40 TWh en 2024 (2023 : 41,5 TWh). A cela s’ajoute l’injection de biogaz dans le réseau.

De ce fait, l’industrie gazière a été fortement marquée par les conséquences de la crise énergétique née de la guerre en Ukraine. L’Allemagne, sevrée du gaz russe dont elle était fortement dépendante, s’est trouvé confrontée à une envolée des prix de l’énergie, générant un problème de compétitivité globale de l’industrie.

Alors qu’en 2021 plus de 60% du gaz naturel consommé en Allemagne provenaient encore de la Russie, ces importations ont fortement diminué à 21% courant 2022 (BNetzA 2024h). En 2023, la quantité de gaz russe livrée par gazoduc vers l’Allemagne était de 0 TWh.

Entre-temps, la Norvège est de loin le plus grand fournisseur de gaz naturel par gazoduc, avec une part de plus de 45%. Des quantités importantes de gaz naturel continuent d’arriver par la frontière néerlandaise. Il s’agit toutefois majoritairement des quantités en transit en provenance d’autres pays, dont l’origine ne peut pas être déterminée avec précision.

En outre, l’infrastructure gazière a été complétée par des terminaux méthaniers destinés à accueillir le gaz naturel liquéfié (GNL). Fin 2024, quatre terminaux étaient en service (Wilhelmshaven, Brunsbüttel, Lubmin et Mukran), d’autres terminaux sont prévus.

Au total, 65 TWh ont été importés en 2024 via les terminaux méthaniers en Allemagne. Cela correspond à une part de 7,5% des importations totales de gaz naturel. Parmi les 4 pays d’origine du GNL, les États-Unis dominaient avec une part de 91 %. Les 3 autres pays, à savoir la Norvège, l’Angola et l’Égypte représentaient chacun entre 2 et 4 % (BDEW 2024a).

Selon des données provisoires, environ 40 TWh de gaz naturel ont été produits sur le territoire national en 2024, soit 4,8% de la consommation totale de gaz naturel. Par rapport à l’année précédente, cela représente une baisse de près de 4 %. Les quantités extraites au niveau national sont en baisse constante depuis le début des années 2000 et ne sont pas exportées.

Evolution des volumes de vente de gaz naturel par groupe de consommateur

Selon les premiers chiffres, la vente de gaz naturel aux consommateurs finaux a augmenté de près de 3% en 2024 (voir aussi tableau 6). Tous les groupes de consommateurs ont enregistré des hausses, mais l’augmentation de la consommation a été la plus marquée dans l’industrie (BDEW 2024a).

Malgré une conjoncture toujours morose, la demande de l’industrie a augmenté, principalement en raison d’une baisse des prix du gaz, même si les prix du gaz de gros sont encore environ deux fois plus élevés qu’avant la crise énergétique. La consommation de gaz naturel par les entreprises minières et manufacturières en tant que source d’énergie, mais aussi en tant que matière première, a augmenté de près de 6% en 2024 pour atteindre 301 TWh.

Tab 7 vente gaz par groupe
Tableau 7 : évolution des volumes de vente de gaz naturel par groupe de consommateurs

La consommation du gaz naturel dans les centrales électriques et thermiques des fournisseurs d’électricité et de chaleur a augmenté de  près de 2% par rapport à 2023 pour atteindre 106 TWh. Cette évolution a été favorisée par les changements dans le mix de production électrique (recul du couple houille/lignite, hausse de la production à partir d’énergies renouvelables ainsi que des importations accrues d’électricité), cf. figure 2. 

Prix du gaz pour les clients résidentiels

En Allemagne, il n’y a pas de régulation étatique des prix du gaz. Le prix du gaz se forme par le marché et se compose de facteurs dépendant du fournisseur, tels que, entre autres, les coûts d’approvisionnement en gaz, les coûts de distribution et la marge, et de facteurs ne dépendant pas du fournisseur, tels que les tarifs d’utilisation des réseaux et les prélèvements et taxes.  Plus de 1.100 fournisseurs de gaz sont chargés d’approvisionner les consommateurs finaux en gaz.

Le prix moyen du gaz pour les clients résidentiels était de 12,5 ct/kWh à la date de référence du 1er avril 2024, contre 14,8 ct/kWh en 2023, cf. figure 14 (BNetzA 2025b).

Fig 14 Gaspreise Haushaltskunden 2016_2024
Figure 14 : évolution des prix du gaz pour les clients résidentiels en Allemagne

Toutefois, par rapport à 2021, l’année de référence avant la crise énergétique, les prix du gaz pour les clients résidentiels sont en 2024 encore 87% plus élevés.

Les clients résidentiels ont pu profiter de la baisse des prix de gros du gaz naturel en 2024, mais la baisse des prix pour l’approvisionnement et la distribution a été contrecarrée par la hausse de la taxe carbone nationale début 2024 à 45 €/t CO2 et le retour de la TVA au taux normal à partir d’avril 2024. Les taxes et redevances pour les clients résidentiels ont augmenté de plus de 60% par rapport à 2023, passant de 2,14 ct€/kWh à 3,44 ct€/kWh.

La taxe carbone nationale augmente à partir de 2025 à 55 €/t CO2 et influencera les prix du gaz en conséquence (Allemagne Energies 1).

Secteur des transports

Selon la Loi sur la Protection du Climat, les émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des transports devraient être réduites de presque 44% d’ici 2030 par rapport à 2020 (Allemagne Energies 1). Pour atteindre cet objectif, un parc de 15 millions de véhicules « 100% électrique » est prévu d’ici 2030 (BT 2024). Il n’existe pas d’objectif correspondant pour les véhicules hybrides rechargeables (plug-in hybrid).

Selon les données de l’Office Fédéral de l’Automobile, au total 49,3 millions de véhicules de tourisme ont été immatriculés en Allemagne début 2025. La part des véhicules « 100% électrique » était de 3,3% et des véhicules hybrides rechargeables de 2% (KBA 2025).

La subvention fédérale à l’achat des hybrides rechargeables a été supprimée début 2023. De plus, la subvention à l’achat des véhicules « 100% électrique » a été arrêtée prématurément en décembre 2023, après que la Cour constitutionnelle fédérale avait déclaré la politique budgétaire du gouvernement fédéral anticonstitutionnelle en novembre 2023.

En raison de la fin des subventions, la progression des voitures « 100% électrique » dans le parc de véhicules de tourisme allemand s’est ralentie en 2024, cf. figure 15.

Figure 15 : nombre de véhicules « 100% électrique » et hybrides rechargeables dans le parc de véhicules de tourisme allemand début 2025 et l’objectif à l’horizon de 2030

Selon le gouvernement fédéral (BT 2024), pour atteindre l’objectif de 15 millions de véhicules « 100% électrique » d’ici 2030, les coûts d’achat de ces véhicules doivent être réduits et la diversité des modèles doit être accrue. Plusieurs constructeurs automobiles auraient annoncé le lancement de nouveaux modèles à bas prix. La diversité des modèles de véhicules électriques augmenterait également.

En outre, le gouvernement fédéral encourage l’électromobilité en développant l’infrastructure de recharge.

Toutefois, en l’état actuel des choses, l’atteinte de l’objectif de 15 millions véhicules « 100% électrique » d’ici 2030 semble inaccessible.

Émissions de gaz à effet de serre

Selon les données provisoires de l’Agence Fédérale de l’Environnement (UBA 2025c), les émissions de gaz à effet de serre s’élèvent en 2024 à 649 Mt CO₂éq , soit une baisse de 3,4% (~ 23 Mt CO₂éq) par rapport à 2023. La réduction est notamment due à la forte diminution de la consommation de la houille et du lignite (cf. figure 1) et un solde net d’importations d’électricité (cf. figure 16).

La courbe de réduction des émissions s’est nettement aplatie en 2024, après un recul très marqué de 10,3% en 2023.

Le secteur de l’énergie atteint 185 Mt CO2éq en 2024. Avec – 8,7% par rapport à 2023 ce secteur représente la plus grande part de la réduction des émissions globales (-17,6 Mt CO₂éq). La baisse des émissions dans ce secteur s’explique principalement par la diminution de la production d’électricité et de chaleur à partir de sources d’énergie à fortes émissions, cf. figure 1.

Les émissions du secteur de l’industrie stagnent au niveau de 2023. Malgré cela il reste sur la trajectoire cible de réductions d’ici 2030.

En revanche les secteurs du bâtiment et des transports s’éloignent des objectifs de 2030, malgré une légère baisse en 2024, soit – 2,4 Mt CO₂éq dans le secteur du bâtiment et – 2,1 Mt CO₂éq dans le secteur des transports.

Les autres secteurs (agriculture, déchets/divers) ne contribuent que peu à la réduction des émissions totales. Ils restent toutefois sur la trajectoire cible de réductions d’ici 2030.

Figure 16 : évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2éq par an (hors puits de carbone) et objectifs 2030

Pour respecter l’engagement de l’UE de – 55% nets, l’Allemagne devra absorber dans des puits de carbone environ – 25 Mt CO2éq d’ici 2030 (Allemagne Energies 1). En revanche, en raison des années de sécheresse dans le passé, les puits de carbone ne contribuent actuellement pas à la baisse des émissions de gaz à effet de serre. Au contraire, selon l’Agence Fédérale de l’Environnement (UBA 2025c), ils ont émis en 2024 environ + 51 Mt CO2éq.

Les émissions du secteur de l’électricité font partie du secteur de l’énergie. Selon les données provisoires, les émissions de CO2 de l’ensemble des installations de production d’électricité ont baissé en 2024 de 8,6% par rapport à 2023.

La baisse des émissions de CO2 s’est accompagnée d’une diminution (lissée sur l’année) de l’intensité carbone de la production d’électricité de 386 g CO2éq/kWh en 2023 à environ 363 g CO2éq/kWh en 2024 (UBA 2025d).

Depuis 2023 l’Allemagne est importatrice nette d’électricité (voir plus haut). Les émissions générées par l’excédent d’importations ne sont pas comptabilisées dans la production d’électricité en Allemagne, car elles proviennent d’autres pays. La réduction de l’intensité carbone du mix électrique allemand à partir de 2023 n’est donc qu’un indicateur partiel de la durabilité des mesures visant à réduire les émissions du secteur électrique.

Figure 17 : émissions de CO2éq de la production d’électricité et intensité carbone du mix électrique

De plus, l’évolution de l’intensité carbone au cours de l’année montre bien que la valeur lissée sur l’année est peu significative. En hiver, lorsque la production du photovoltaïque est généralement plus faible, l’intensité carbone dépasse les 400 g CO2eq /kWh si cela coïncide avec un épisode de faible production éolienne comme par exemple en novembre 2024, cf.figure 18 (Electricity Maps 2024).

Figure 18 : évolution de l’intensité carbone du mix électrique au cours de l’année 2024

Les données définitives concernant les émissions de gaz à effet de serre pour l’année 2024 seront publiées par l’Agence Fédérale de l’Environnement début 2026.

Nouvelle stratégie de la capture et du stockage du CO2

Le gouvernement a pris conscience qu’il serait impossible d’atteindre l’objectif de neutralité carbone d’ici 2045 en Allemagne sans CSC, CCUS (Carbon Capture, Utilization and Storage).

Le cabinet des ministres a approuvé en mai 2024 les points clés d’une stratégie de gestion du carbone (BMWK 2024e). Il est prévu de créer un cadre juridique pour la mise en place d’une infrastructure de canalisation de CO2 et d’un stockage définitif de CO2 au large des côtes allemandes.

Dans le passé, sous la pression des ONG, le gouvernement d’Angela Merkel avait adopté en 2012 une loi qui interdisait de facto le stockage du CO2 pour une durée indéterminée sur le sol allemand. Il s’agit donc d’un virage stratégique surmontant ainsi une opposition de longue date au sein des milieux politiques contre le CSC. 

Il est prévu d’autoriser le captage du CO₂ uniquement là où d’autres options ne sont pas disponibles. Seules les industries très polluantes du ciment/de la chaux ainsi que de l’incinération des déchets sont explicitement mentionnées. La question de savoir si l’industrie chimique pourrait également utiliser le CSC reste encore ouverte.

Le captage et le stockage du CO2 dans le secteur de l’électricité ne sont pas interdits pour les centrales à biomasse et les centrales à gaz qui servent à la stabilisation du réseau électrique dans la mesure où ces centrales ne peuvent pas être raccordées ou ne peuvent pas être raccordées à temps au réseau d’hydrogène.

En revanche, pour les émissions provenant de la production d’énergie à partir du charbon (centrales électriques et centrales de cogénération), l’accès à la future infrastructure de transport de CO2 par canalisation et au stockage de CO₂ est exclu.

Le stockage du CO2 ne sera autorisé que sous la mer, dans la partie allemande de la mer du Nord et la mer Baltique. Les zones marines protégées seront exclues du stockage.

Le stockage souterrain de CO2 restera interdit sous terre. Toutefois, les régions (Länder) ont la possibilité d’opter pour un stockage de CO₂ à terre. Cela pourrait devenir une option pour les régions du sud de l’Allemagne comme la Bavière et le Bade-Wurtemberg, car les trajets de transport du CO₂ jusqu’aux côtes sont longs et coûteux.

Suite à la dissolution du parlement allemand en décembre 2024 une modification de la Loi, autorisant le captage et stockage du CO2, n’est pas encore entrée en vigueur.

Références

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epexspot (2024) Prix négatifs – Questions – Réponses. EPEX SPOT SE. En ligne : https://www.epexspot.com/sites/default/files/download_center_files/Q%26A%20Prix%20n%C3%A9gatifs.pdf.

EWI (2024) Datengrundlage für die H2Bilanz 2024. 2. Halbjahr. Energiewirtschaftliche Institut an der Universität zu Köln (EWI). En ligne : https://www.ewi.uni-koeln.de/de/publikationen/datengrundlage-fuer-die-h2bilanz-2024-2-halbjahr/.

FfE (2024) Negative Strompreise – Wie viele Anlagen erneuerbarer Energien fahren durch? Forschungsstelle für Energiewirtschaft e.V. En ligne : https://www.ffe.de/veroeffentlichungen/negative-strompreise-wie-viele-anlagen-erneuerbarer-energien-fahren-durch/.

KBA (2025) Der Fahrzeugbestand am 1. Januar 2025. Communique de presse Nr 10/2025 du 04.03.2025. KBA Kraftfahrt-Bundesamt. En ligne : https://www.kba.de/DE/Presse/Pressemitteilungen/Fahrzeugbestand/2025/pm10_fz_bestand_pm_komplett.html?snn=3662144.

RWTH Aachen University (2024) Battery Charts. RWTH Aachen: Institut für Stromrichtertechnik und Elektrische Antriebe (ISEA) und Institute for Power Genration and Storage Systems (PGS). En ligne : https://battery-charts.rwth-aachen.de/.

Stromdatenanalyse (2024) CO2 – Analysetool. En ligne : https://www.stromdaten.info/ANALYSE/emissions/index.php.

UBA (2024a) Entwicklung der spezifischen Treibhausgas-Emissionen des deutschen Strommix in den Jahren 1990 – 2023. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/publikationen/entwicklung-der-spezifischen-treibhausgas-10.

UBA (2025a) Monatsbericht zur Entwicklung der erneuerbaren Stromerzeugung und Leistung in Deutschland. Stand 14.04.2025. UBA Arbeitsgruppe Erneuerbare Energien -Statistik (AGEE-Stat) 04-2025_agee-stat_monatsbericht

UBA (2025b) Finale Daten für 2023: klimaschädliche Emissionen sanken um zehn Prozent. Die deutschen Treibhausgasemissionen sanken im Vergleich zum Vorjahr um 77 Millionen Tonnen – stärkster Rückgang seit 1990. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/finale-daten-fuer-2023-klimaschaedliche-emissionen.

UBA (2025c) Klimaziele bis 2030 erreichbar. Communiqué de presse N° 11/2025 du 14.03.2025. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/klimaziele-bis-2030-erreichbar.

UBA (2025d) Entwicklung der spezifischen Treibhausgas-Emissionen des deutschen Strommix in den Jahren 1990 – 2024. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/publikationen/entwicklung-der-spezifischen-treibhausgas-11.

 

 

 

Allemagne : La consommation énergétique baisse de nouveau au premier semestre 2024

Le bilan du premier semestre 2025 est disponible ici

Texte mis à jour le 10.08.2024

Temps de lecture : 10 min

Les 7 points essentiels

  1. La consommation énergétique en Allemagne affiche à nouveau un recul de 3,4% au 1er semestre 2024, après avoir atteint un niveau historiquement bas en 2023. Près de la moitié de cette baisse est due à des températures globalement plus douces. Les autres raisons sont le climat économique terne et le niveau élevé des prix de l’énergie ;
  1. La production brute d’électricité a enregistré une baisse de presque 5% par rapport au 1er semestre 2023 ;
  1. La production à partir des énergies renouvelables est en hausse de presque 10% par rapport à la même période de l’année précédente et représente, lissée sur les premiers six mois, une part de presque 60% ;
  1. Le solde allemand des échanges d’électricité a été à nouveau importateur au 1er semestre 2024 ;
  1. Une forte augmentation des épisodes de prix négatifs a été observée au marché de gros notamment au 2e trimestre 2024 ;
  1. Le prix moyen de gros constaté sur le marché journalier est globalement inférieur à celui du 1er semestre 2023. En revanche, le prix de l’électricité pour les clients résidentiels se situe toujours parmi les plus élevés en Europe bien qu’il ait baissé de près de 10% par rapport à la même période en 2023 ;
  1. Malgré le volume important de production des énergies renouvelables, les émissions moyennes de CO2 pour la production allemande par kWh d’électricité restent toujours à un niveau élevé.
Bild Smard BNetzA
Source : Bundesnetzagentur/SMARD

Sommaire

Consommation énergétique

Consommation et production d´électricité

  • Développement des parcs d’énergies renouvelables

Échanges transfrontaliers d´électricité

Prix de l´électricité

  • Evolution des prix de l’électricité sur le marché de gros
  • Episodes de prix négatifs
  • Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Intensité carbone du mix électrique allemand

Références

Consommation énergétique

Après avoir atteint un niveau historiquement bas en 2023 /9/, la consommation énergétique affiche à nouveau un recul de 3.4% en 2024 selon AG Energiebilanzen /1/.

Près de la moitié de cette baisse est due à des températures globalement plus douces. Le volume de consommation énergétique (corrigée des aléas météorologiques) sur le 1er semestre de 2024 a baissé d’environ 1,5% à celui de la même période de l’année précédente.

Les autres raisons sont le climat économique terne et un niveau élevé des prix de l’énergie notamment suite à l’augmentation de la taxe carbone à 45 € par tonne de CO2 en 2024, contre 30 € en 2023. Dans le cadre du système national de tarification du CO2, la taxe carbone s’applique entre autres au prix final de l´essence, du gazole, du fioul et du gaz naturel /12/.

La consommation d’énergie primaire atteint 1508 TWh au 1er semestre 2024 (1er semestre 2023 : 1561 TWh). Les raisons principales sont la forte diminution de l’utilisation du charbon (houille et lignite) notamment pour la production électrique, cf. figure 1.

Fig 1 Conso energie primaire 1 sem 2024
Figure 1 : consommation d’énergie primaire par filière au 1er semestre 2024 et évolution en pourcentage par rapport au 1er semestre 2023

Le solde des échanges d’électricité a été importateur au 1er semestre 2024, tandis qu’au 1er semestre 2023 le solde des échanges était encore légèrement exportateur (voir plus loin).

Consommation et production d’électricité

Le Centre de Recherche sur l’Énergie solaire et l’Hydrogène de Bade-Wurtemberg (ZSW) et la Fédération des Industries de l’Énergie et de l’Eau (BDEW) ont publié les résultats préliminaires du 1er semestre 2024 /2/. 

La figure 2 montre la production brute d’électricité aux premiers semestres 2023 et 2024.

Fig 2 Bruttostromerzeugung sem 1 2023_2024
Figure 2 : production brute d’électricité aux premiers semestres 2023 et 2024

Avec 252 TWh, l’Allemagne a enregistré une baisse de la production brute de presque 5% par rapport à la même période de l’année précédente (1er semestre 2023 : 264,5 TWh).

La production nette totale s’est élevée à 242 TWh contre 253 TWh au 1er semestre 2023, cf. tableau 1.

Tableau 1
Tableau 1 : production et consommation d’électricité en Allemagne aux premiers semestres 2023 et 2024

* production brute : la production brute est la quantité d’électricité mesurée aux bornes des alternateurs d’une centrale, elle inclut donc la consommation d’électricité par les auxiliaires de la centrale et les transformateurs ;

** production nette : la production nette d’électricité est celle mesurée/évaluée à la sortie d’une centrale, c’est-à-dire déduction faite de la consommation des services auxiliaires et des pertes dans les transformateurs des centrales. La production nette désigne la quantité d’électricité réellement fournie par la centrale au réseau ;

*** Consommation intérieure brute : la production brute plus le solde des échanges transfrontaliers d’électricité.

Le volume de la production brute à partir des énergies renouvelables de 150 TWh représente donc, lissée sur les premiers six mois, une part de presque 60%. Les raisons pour la hausse de presque 10% par rapport à la même période de l’année précédente (1er semestre 2023 : 136,9 TWh) sont notamment l’augmentation de la production du photovoltaïque de presque 4,2 TWh, de l’éolien terrestre de presque 3,8 TWh et de l’hydraulique de plus de 2,5 TWh (cf. tableau 1).

Pour rappel : la Loi EEG 2023 (§4a) fixe des objectifs indicatifs annuels pour les volumes de production d’électricité à partir de sources renouvelables. L’objectif cible s’élève à 310 TWh pour fin 2024. Il faudrait donc produire un volume d’au moins 160 TWh au 2e semestre 2024 pour atteindre cet objectif.

Le parc conventionnel a produit 102 TWh bruts contre 127,6 TWh au cours de la même période de l’année dernière, cf. tableau 1. La baisse de production conventionnelle de 20% s’explique notamment par la réduction de la production du parc thermique à flamme (centrales à houille et au lignite). Le nucléaire fournissait encore 7,2 TWh au 1er semestre 2023. Suite à l’arrêt définitif des trois dernières centrales en avril 2023, le nucléaire n’a donc plus contribué à la production d’électricité en 2024 /8/, /9/.

La figure 3 montre la consommation brute d’électricité. Elle stagne par rapport à la même période de l’année dernière pour atteindre 261 TWh (1er semestre 2023 : 262 TWh).

Sous l’hypothèse que l’électricité produite à partir des énergies renouvelables est entièrement consommée en Allemagne, leur part dans la consommation intérieure brute est avec 58%, lissée sur les premiers six mois, en hausse de 6 points par rapport au premier semestre 2023 (52%).

Fig 3 Bruttostromverbrauch 2023_2024
Figure 3 : consommation brute d´électricité et parts des énergies renouvelables aux premiers semestres 2023 et 2024

Développement des parcs d’énergies renouvelables

La figure 4 montre les parcs éoliens, photovoltaïques et de la biomasse à mi-2024 par rapport aux objectifs de fin 2024 et de 2030 selon la Loi sur la promotion des énergies renouvelables de 2023 (EEG 2023) /11/.

Fig 4 Zubau ENR 2024
Figure 4 : parc d’énergies renouvelables à mi-2024 par rapport aux objectifs 2024 et 2030 de la Loi EEG 2023

Parc éolien terrestre

Au cours du 1er semestre 2024, 1308 MW ont été raccordés au réseau, soit 250 éoliennes y compris le repowering (remplacement d´anciennes machines par des turbines plus puissantes et plus productives). En tenant compte de la mise hors service définitive de 277 éoliennes (379 MW), l’ajout net s’élève à 929 MW.

Fin juin 2024, le parc comptait 28 611 éoliennes terrestres en service, soit 27 de moins que fin juin 2023, d’une capacité totale de 61,9 GW /14/.

L’ajout réalisé est actuellement trop faible pour atteindre l’objectif intermédiaire de développement fixé par la loi EEG 2023 à 69 GW fin 2024 /11/.

En 2030 la Loi vise une capacité installée de 115 GW. Pour atteindre cet objectif il faudrait désormais ajouter en moyenne 22 MW par jour, soit 5 à 6 éoliennes d’une puissance nominale de 4 MW.

Parc éolien en mer

Fin juin 2024, le parc comptait 1 602 éoliennes en service, d’une capacité totale de près de 8,9 GW. Parmi elles, 36 éoliennes d’une puissance totale de 377 MW nets ont injecté sur le réseau pour la première fois au cours du 1er semestre 2024. De plus, une augmentation de la puissance (16 MW nets) a été effectuée sur 78 éoliennes existantes. En outre, de nouvelles fondations ont été installées et la mise en place des éoliennes correspondantes commencée.

Il est prévu de porter la capacité totale des éoliennes en mer à 11 GW jusqu’à fin 2025 et à au moins 30 GW d’ici 2030 /11/, /14/.

Parc photovoltaïque

Au premier semestre 2024 une capacité photovoltaïque de 7 535  MW a été installée portant la capacité cumulée à 89,7 GW /7/. L’objectif intermédiaire fixé pour fin 2024 par la loi EEG 2023 à 88 GW /11/ est déjà dépassé.  

Il est prévu de porter la capacité totale à 215 GW d’ici 2030. En partant d’une puissance crête moyenne de 450 Wc par panneau solaire, il faudrait donc ajouter en moyenne plus de 117 000 panneaux par jour. C’est un défi considérable pour l’industrie du solaire photovoltaïque /16/.

Parc biomasse

Au premier semestre 2024 une capacité de la biomasse de 74 MW a été installée portant la capacité cumulée à 9,6 GW /7/. L’ajout réalisé comprend aussi bien des nouvelles installations ainsi que de l’augmentation de puissance des installations existantes.

Toutefois, une utilisation accrue de la biomasse dans le secteur électrique n’est pas une priorité pour le gouvernement. La Loi sur la promotion des énergies renouvelables vise une capacité de 8,4 GW en 2030 soit une réduction nette par rapport à la capacité actuellement installée /11/.

Parc hydraulique

Le potentiel de développement du parc hydraulique étant faible, la loi EEG 2023 n’indique aucun objectif à l’horizon de 2030 /11/. Selon le régulateur /15/, la capacité installée s’élève à environ 18 GW y compris les STEP (Stations de Transfert d’Énergie par Pompage).

Échanges transfrontaliers d’électricité

Le solde des échanges d’électricité allemand a été importateur au premier semestre 2024, avec un solde net de 8,6 TWh /1/.

Au 1er semestre 2023, le solde des échanges a été avec 2,9 TWh encore légèrement exportateur, mais l’Allemagne a été importatrice nette d’électricité sur l’année 2023 pour la première fois depuis 2002.

Le moment où l’électricité est importée ou exportée dépend non seulement de l’offre et de la demande dans le pays concerné, mais aussi des prix de l’électricité des pays voisins.

La plus grande partie des importations d’électricité provient de la France. Les coûts de production d’électricité en Allemagne sont le double de ceux de la France.

Prix de l’électricité

Evolution du prix de l´électricité sur le marché de gros

La figure 5 montre aux premiers et deuxièmes trimestres des années 2021 à 2024 des prix journaliers moyens de l’électricité (dit « day-ahead ») sur le marché de gros pour la zone Allemagne/Luxembourg

La crise énergétique, débutée en 2021 et amplifiée de façon considérable en 2022, se résorbe progressivement en 2023, en laissant des traces durables. Les prix ont baissé de plus d’un quart au deuxième trimestre 2024 par rapport à la même période de l’année précédente, sans toutefois retrouver les niveaux d’avant crise.

Avec 67,48 €/MWh dans la zone Allemagne/Luxembourg au 2e trimestre 2024, les prix étaient environ 15% supérieurs à la moyenne des prix de gros des pays voisins /4/.

Fig 5 prix de gros
Figure 5 : Evolution des prix de gros constatés sur le marché journalier (day-ahead) de la zone Allemagne/Luxembourg

Le 25 juin 2024, des difficultés techniques sont survenues à la bourse de l’électricité EPEX Spot à Paris (filiale de EEX AG à Leipzig, qui appartient elle-même au Deutsche Börse Group) /13/.

Suite à un bug informatique, l’opérateur n’a pas pu participer au couplage du marché européen des prix journaliers (day-ahead) du marché de gros.

Durant cette période, l’Allemagne a dû couvrir la majeure partie de ses besoins en électricité à partir de sources nationales, ce qui a fait flamber les prix de l’électricité à 2 325,83 €/MWh par moments. Ces prix n’étaient pas visibles sur le site web du régulateur (SMARD), car les prix journaliers du marché de gros des bourses EXAA (Energy Exchange Austria) et Nord Pool, non concernées par la défaillance de l’EPEX Spot, y étaient affichés /4/.

Episodes de prix négatifs

Les prix négatifs sont observés principalement lors des périodes de surproduction d’énergies renouvelables variables (solaire et éolien).

Déjà en 2020, les prix négatifs se sont accumulés sur le marché de gros (day -ahead) : avec 212 pas horaires au cours du 1er semestre 2020, l’année a enregistré une nette augmentation suite à la faible demande d’électricité due de la crise sanitaire.

Au 1er semestre 2024, l’Allemagne a connu 224 pas horaires à prix négatif surpassant déjà le record de 2020. Ces épisodes se sont concentrés en particulier en mai 2024 (78 pas horaires) du fait de la production photovoltaïque et éolienne élevée et une demande d’électricité relativement faible en raison des nombreux jours fériés /3/, /4/, /5/.

Fig 6 prix negatif 2024
Figure 6 : Nombre de pas horaires avec prix négatif aux premiers semestres de 2019 à 2024

Les gestionnaires de réseau sont tenus d’acheter l’électricité renouvelable indépendamment de la demande et de la vendre au marché spot.

Depuis 2023 la charge de soutien des énergies renouvelables est entièrement financée par l’État, c’est-à-dire in fine par le contribuable.

Si les gestionnaires de réseau ne réalisent pas de recettes suffisantes, l’État doit satisfaire les droits légaux à la charge de soutien des producteurs d’électricité renouvelable.

Pour l’année 2024 le montant a été initialement estimé à 10,6 Mds€. Selon un communiqué de presse du parlement allemand /16/, un besoin supplémentaire non planifié de 8,8 Mds€ serait nécessaire en 2024 pour couvrir cette charge de soutien, car la commercialisation de l’électricité verte a généré des recettes plus faibles qu’initialement prévues.

Pour réduire les coûts, la loi EEG 2023 /11/ prévoit à partir de 2024 une suspension de la rémunération pour des installations renouvelables ≥ 400 kW à partir de 3 heures de prix négatifs sans interruption. A partir de 2027, les heures de prix négatifs ne seront en règle générale plus remboursés, hors petites installations < 400 kW et éoliennes pilotes.

Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Le prix moyen de l’électricité pour les clients résidentiels a baissé de près de 10% en 2024 par rapport à la même période en 2023 /6/. Il est toutefois supérieur au niveau d’avant crise énergétique et se situe parmi les plus élevés en Europe.

Fig 7 prix menages
Figure 7 : prix de l’électricité en cts€/kWh en avril 2021 – 2024 pour les consommateurs résidentiels (consommation annuelle : 2500 à 5000 kWh)

Les coûts associés à la fourniture d’électricité représentent environ 43% de la facture d’électricité des clients résidentiels en avril 2024.

Malgré la suppression de la charge de soutien des énergies renouvelables mi-2022, les composants de prix réglementés par l’Etat (taxes et prélèvements, tarif d’utilisation des réseaux) représentent en 2024 plus de la moitié du prix de l’électricité, soit presque 57%.

Les coûts associés à l’acheminement par les réseaux de transport et distribution correspondent à environ 28% du prix total. Ils sont en avril 2024 presque 20% supérieurs par rapport à la même période de l’année précédente. La raison principale : en 2023 le tarif d’utilisation du réseau de transport était subventionné par l’État pour atténuer l’impact de la crise énergétique empêchant ainsi une augmentation significative /17/. En 2024 le gouvernement allemand a décidé de supprimer la subvention initialement prévue de 5,5 Mds€ /18/.

Les taxes et prélèvements sont à un niveau similaire à celui de 2023 et correspondent à presque 29% du prix total. 

Intensité carbone du mix électrique allemand

Malgré une part de presque 60% des énergies renouvelables à la production d’électricité, lissée sur les premiers six mois, les émissions moyennes de CO2 pour la production par kWh d’électricité restent toujours à un niveau élevé, soit autour de 300 g CO2éq/kWh /10/.

Fig 8 Intensite carbone 2024
Figure 8 : Intensité carbone du mix électrique allemand exprimée en grammes de CO2éq par kWh produit au 1er semestre 2024

Références

/1/ AGEB (2024) Primärenergieverbrauch 1. Halbjahr 2024, AG Energiebilanzen, en ligne : https://ag-energiebilanzen.de/daten-und-fakten/primaerenergieverbrauch/

 /2/ BDEW (2024) Erneuerbare Energien haben im ersten Halbjahr 58 Prozent des Stromverbrauchs gedeckt, Communiqué de presse commun ZSW et BDEW du 01.07.2024, Zentrum für Sonnenenergie- und Wasserstoff-Forschung Baden-Württemberg (ZSW) et Bundesverband der Energie- und Wasserwirtschaft (BDEW), en ligne : https://www.bdew.de/presse/erneuerbare-energien-haben-im-ersten-halbjahr-58-prozent-des-stromverbrauchs-gedeckt/

/3/ BNetzA/SMARD (2024) Der Strommarkt im 1.Quartal 2024, Bundesnetzagentur, en ligne : https://www.smard.de/page/home/topic-article/211784/213182

/4/ BNetzA/SMARD (2024) Der Strommarkt im 2.Quartal 2024, Bundesnetzagentur, en ligne : https://www.smard.de/page/home/topic-article/444/213848

/5/ FfE (2024) Negative Strompreise am Spotmarkt, Forschungsgesellschaft für Energiewirtschaft mbH, en ligne : https://www.ffe.de/veroeffentlichungen/negative-strompreise-am-spotmarkt/

/6/ BNetzA/SMARD (2024) Haushaltskundenpreise, Bundesnetzagentur, en ligne : https://www.smard.de/page/home/topic-article/211972/212170

/7/ UBA (2024) Monats- und Quartalsdaten der Arbeitsgruppe Erneuerbare Energien – Statistik (AGEE – Stat), Monatsbericht – Plus 16.07.2024, Umweltbundesamt, en ligne : agee-stat_monatsbericht_plus_2024-q2

/8/ Allemagne Energies (2023) Clap de fin pour l’électronucléaire en Allemagne, en ligne : https://allemagne-energies.com/2023/04/16/clap-de-fin-pour-lelectronucleaire-en-allemagne/

/9/ Allemagne Energies (2024) Allemagne : les chiffres clés de l’énergie en 2023, en ligne : https://allemagne-energies.com/2024/01/11/allemagne-les-chiffres-cles-de-lenergie-en-2023/

/10/ Stromdaten.info (2024), Stromdatenanalyse, en ligne : https://www.stromdaten.info/

/11/ BMJ (2023) Gesetz für den Ausbau erneuerbarer Energien (Erneuerbare-Energien-Gesetz – EEG 2023), Bundesministerium der Justiz, en ligne : https://www.gesetze-im-internet.de/eeg_2014/inhalts_bersicht.html

/12/ Allemagne Energies (2024) Le tournant énergétique allemand, en ligne : https://allemagne-energies.com/tournant-energetique/

/13/ EpexSpot (2024) Decoupling Session was run according to procedures of Single Day-Ahead Coupling, communiqué de presse du 26.06.2024, en ligne : https://www.epexspot.com/en/news/decoupling-session-was-run-according-procedures-single-day-ahead-coupling

/14/ Deutsche Windguard (2024) Windenergie-Statistik: 1. Halbjahr 2024, en ligne : https://www.windguard.de/Statistik-1-Halbjahr-2024.html

/15/ BNetzA (2024) Kraftwerksliste, 15.04.2024, Bundesnetzagentur, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/DE/Fachthemen/ElektrizitaetundGas/Versorgungssicherheit/Erzeugungskapazitaeten/Kraftwerksliste/start.html

/16/ Allemagne Energies (2024) Énergies renouvelables : de nombreux défis, en ligne : https://allemagne-energies.com/energies-renouvelables/

/17/ Allemagne Energies (2022) Allemagne : presque 300 milliards d´Euros pour atténuer l´impact de la crise énergétique. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/12/19/allemagne-presque-300-milliards-deuros-pour-attenuer-limpact-de-la-crise-energetique/.

/18/ BReg (2024) Gas- und Strompreisbremse. Fragen und Antworten zu den Energiepreisbremsen. Gouvernement allemand (Bundesregierung). En ligne : https://www.bundesregierung.de/breg-de/schwerpunkte/entlastung-fuer-deutschland/strompreisbremse-2125002.

Allemagne : les chiffres clés de l’énergie en 2023

L’édition 2024 est disponible ici

Texte mis à jour le 17.12.2024

Temps de lecture : 2 min (résumé), 30 min (article entier)

Les 10 points essentiels 

  1. La consommation énergétique en Allemagne marque un recul d’environ 8% par rapport à 2022 et atteint en 2023 un niveau historiquement bas. Les principales raisons sont le faible développement économique et les prix élevés de l’énergie ;
  1. Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) continuent de représenter plus de trois quarts de la consommation énergétique ;
  1. La production brute d´électricité recule de plus de 11% par rapport à 2022. Depuis mi-avril 2023 le nucléaire ne contribue plus à la production d’électricité en Allemagne ;
  1. Amplifiée par la baisse générale de la production brute d’électricité, la part des énergies renouvelables dépasse – lissée sur l´année – pour la première fois la moitié de la production d’électricité ;
  1. L’Allemagne a été en 2023 importatrice nette d’électricité pour la première fois depuis 20 ans ;
  1. La modernisation du réseau de transport n’avance que lentement. Seuls 20,2% des 14.000 km prévus à l´horizon de 2035 ont été réalisés en 2023. Le développement des énergies renouvelables, associé à des retards dans la modernisation du réseau provoque depuis 2015 une forte augmentation des coûts d’actions correctives ayant pour but d’éviter la congestion du réseau de transport ;
  1. L’approvisionnement en gaz naturel a été assuré en 2023 grâce à l’augmentation des livraisons en provenance d’Europe occidentale et à l’achat de GNL (Gaz Naturel Liquéfié) ;
  1. Actualisation en 2023 de la stratégie nationale pour l’hydrogène, adoptée en 2020. Les principaux objectifs : une capacité d’électrolyse de 10 GW d’ici 2030, le déploiement des infrastructures de transport d’hydrogène et le développement d’une stratégie d’importation d’hydrogène « vert » ;
  1. Les émissions de gaz à effet de serre ont diminué d’environ de 10%. Cependant, il ne s’agit pas d’un succès en matière de politique climatique mais plutôt du résultat de la baisse inédite de la consommation énergétique suite à l’affaiblissement de l’industrie allemande et des prix élevés de l’énergie. Les émissions moyennes de CO2 pour la production nationale dʼ1 kWh d’électricité restent toujours à un niveau élevé ;
  1. Le prix de gros moyen de l’électricité s’est situé en 2023 à moins de la moitié de celui de 2022 et a atteint à nouveau le niveau de 2021. En revanche, le prix d’électricité pour le consommateur résidentiel a encore augmenté en 2023. Il est supérieur au niveau d’avant crise énergétique et se situe parmi les plus élevés en Europe.
Anfang
Source : Bundesnetzagentur

Sommaire

Consommation énergétique

Consommation et production d´électricité

  • Parc de production
  • Relation entre puissance installée et production réalisée
  • Stockage de l’énergie

Échanges transfrontaliers d´électricité

Réseaux de transport

  • Réseaux en mer
  • Coûts d´interventions pour éviter la congestion du réseau de transport

Prix de l´électricité

  • Evolution des prix sur le marché de gros de l´électricité
  • Episodes de prix négatifs au marché journalier
  • Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Approvisionnement en gaz naturel

Economie de l’hydrogène en 2023

Émissions de gaz à effet de serre

  • Révision de la Loi sur la Protection du Climat        

Perspectives 2024  

Références

Consommation énergétique

La consommation énergétique en Allemagne atteint en 2023 un niveau historiquement bas. Selon AG Energiebilanzen (AGEB 2024a) la consommation d´énergie primaire s’élève à 2982 TWh (256 Mtep) en 2023, cela correspond à une baisse de 8,1% par rapport à l´année précédente (2022 : 3243 TWh ou 279 Mtep).

La principale raison est l’impact de la crise énergétique sur l’industrie allemande. En raison des coûts élevés de l’énergie, des charges administratives importantes et de la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, de nombreuses entreprises ont fortement réduit leur production en 2022.

Les températures légèrement plus chaudes par rapport à 2022 n’ont eu qu’un faible effet. Corrigée de l´aléa météorologique la consommation énergétique baisse de 7,4%.

Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) continuent de représenter plus de trois quarts de la consommation énergétique. Le pétrole reste l’énergie fossile la plus importante en 2023, suivi par le gaz naturel.  

La consommation des produits pétroliers a connu une baisse de 6,8% par rapport à 2022 notamment à cause de la réduction de consommation du gazole, du fioul et des livraisons d’essence « brute » à l’industrie chimique.

La consommation de gaz naturel baisse de 2,4% en 2023, principalement due à des économies réalisées par les consommateurs.

Compte tenu de la baisse de la consommation énergétique, le gaz naturel et le pétrole ont enregistré malgré tout une légère augmentation de leur part, cf. figure 1.

Le charbon (couple lignite/houille) atteint une part totale de 17,0% de la consommation d’énergie primaire contre 19,8% en 2022, cf. figure 1

La consommation du lignite baisse de 23,4% en 2023 par rapport à 2022 notamment en raison d’un recul des livraisons vers les centrales électriques.

La consommation de la houille baisse de 18,5 % en 2023 par rapport à 2022. Alors que la baisse de la consommation dans l’industrie sidérurgique est restée relativement modérée (-1,8 %), son utilisation dans les centrales électriques a baissé d’environ un tiers. 

La part du nucléaire a baissé de près de 80% en 2023, en raison de la fermeture définitive des trois dernières centrales le 15 avril 2023. Depuis, le nucléaire ne contribue plus à la production d’électricité en Allemagne. Pour plus d’informations sur le nucléaire voir aussi (Allemagne Energies 2).

Fig 1 Energie primaire 2023
Figure 1 : consommation d´énergie primaire selon AG Energiebilanzen (AGEB 2024a)

La part des énergies renouvelables à la consommation d´énergie primaire atteint 19,6% (2022 : 17,5%). Cause principale : une production d’électricité élevée des éoliennes terrestres, surtout au second semestre, grâce à une météo favorable.

La part « divers » a augmenté, principalement du fait que l’Allemagne a été importatrice nette d’électricité en 2023.

Pour une comparaison des bilans énergétiques entre l’Allemagne et la France, voir (Allemagne Energies 4).

Consommation et production d’électricité

La consommation intérieure brute d´électricité recule à 515 TWh (2022 : 545 TWh) suite aux tendances conjoncturelles au ralentissement, une hausse des prix de l´électricité et une météo légèrement plus clémente (AGEB 2024b).

Sous l’hypothèse que l’électricité produite à partir des énergies renouvelables serait entièrement consommée en Allemagne, leur part dans la consommation intérieure brute d’électricité augmente à plus de 52% contre 46% en 2022 (UBA 2024b). Conformément aux prescriptions du gouvernement fédéral, il s’agit du taux déterminant pour la réalisation des objectifs en matière d’énergies renouvelables.  La baisse générale de la consommation d’électricité amplifie statistiquement l’effet de l’augmentation de la part des énergies renouvelables.

La production brute d’électricité a enregistré un recul de plus de 11% par rapport à 2022 (cf. figure 2) et s’élève à 506 TWh (2022 : 572 TWh).

Le mix électrique en 2023 a été principalement influencé par la mise hors service des trois dernières centrales nucléaires mi-avril 2023 (Allemagne Energies 2) et une baisse de production d’électricité du couple lignite/houille.

Les filières renouvelables enregistrent une hausse de production de plus de 7%. Amplifiée par la baisse générale de la production brute de 66 TWh, leur part passe – lissée sur l’année – à presque 54% (273 TWh), contre moins de 45% en 2022 (255 TWh). Toutefois, leur production en 2023 n’a pas atteint son objectif de 287 TWh fixé par la Loi sur la promotion des énergies renouvelables. Pour plus d’informations sur les énergies renouvelables, voir aussi (Allemagne Energies 3).

Environ 55% de la production brute ont été assurés par des sources décarbonées (renouvelables et nucléaire). Toutefois, les énergies fossiles continuent à contribuer pour 45% à la production brute.

Fig 2 Stromproduktion brutto 2023
Figure 2 : Production brute d’électricité (hors STEP : Stations de Transfert d’Énergie par Pompage) en 2023

Le tableau 1 ci-dessous détaille la production brute pour chaque filière en 2023 pour l´ensemble du secteur de l´électricité, y compris la production destinée aux propres besoins de l´industrie et l´autoconsommation individuelle et collective (AGEB 2024b).

Tabelle 1 evolution production electricite 2022-2023
Tableau 1 : production et consommation d’électricité 2022 et 2023

* production brute hors STEP : la production brute est la quantité d’électricité mesurée aux bornes des alternateurs d’une centrale, elle inclut donc la consommation d’électricité par les auxiliaires de la centrale et les transformateurs ;

** production nette hors STEP : la production nette d’électricité est celle mesurée/évaluée à la sortie d’une centrale, c’est-à-dire déduction faite de la consommation des services auxiliaires et des pertes dans les transformateurs des centrales ;

*** Consommation intérieure brute hors STEP : la production brute plus le solde des échanges transfrontaliers d’électricité.

Grâce à des conditions météorologiques favorables, notamment au deuxième semestre, l’éolien terrestre a produit environ 17% de plus par rapport à 2022.

En revanche, la production des éoliennes maritimes est en baisse par rapport à 2022. Cela s’explique notamment par le manque d’interconnexions et des travaux de maintenance sur les parcs éoliens. 

Bien que le photovoltaïque ait connu en 2023 une augmentation de la puissance installée de l’ordre de 20% (cf. tableau 2), la production n’a augmenté que de 5,5% : grâce à la forte augmentation de la puissance installée en 2023, le temps moins ensoleillé après l’année record de 2022 a été donc compensé.

La production à partir de la biomasse solide, liquide et gazeuse recule légèrement par rapport à 2022. Malgré cela les sources d´énergies biogènes, en ajoutant la production des centrales à partir de déchets biogènes, ont contribué environ 18% à la production renouvelable en 2023.

La production d´hydroélectricité, qui a une importance limitée outre-Rhin, a augmenté en raison d’une pluviométrie plus importante qu’en 2022. La production hydroélectrique a ainsi pu se normaliser quelque peu.

La figure 3 montre l’évolution de la production nette des différentes filières depuis 2010 (AGEB 2024b). La production renouvelable a augmenté d’un facteur 2,6 depuis 2010. Elle a dépassé en 2018 la production du charbon (couple houille/lignite). Après une hausse en 2021 et 2022, la production du charbon a fortement diminué en 2023.

Fig 3 evolution production electricite 2010-2023
Figure 3 : évolution de la production nette des différentes filières depuis 2010

La figure 4 montre bien que la hausse célébrée de la production renouvelable ne saurait dissimuler que la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaire) est en baisse depuis 2020 (AGEB 2024b).

Fig 4 Production co2frei 2023
Figure 4 : évolution de la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaires)

Le bilan s´est encore s´aggravé depuis l´arrêt des trois dernières centrales nucléaires mi-avril 2023. En chiffres absolus, la production d’électricité bas-carbone est retombée à son niveau de 2015, les énergies renouvelables n’ayant pas été en mesure de compenser la perte de production des centrales nucléaires.

Parc de production

L´Allemagne exploite deux parcs de production en parallèle pour une pointe de consommation hivernale entre 80 et 83 GW.

L’augmentation de capacité du parc de production en 2023 a été tirée à la hausse notamment par la progression des filières éolienne et solaire  photovoltaïque. Au 31.12.2023, la puissance installée a atteint environ 266 nets y compris les systèmes de stockage (STEP, batteries etc.), soit une augmentation de 19 GW en un an.

Les centrales thermiques à flamme disposaient d’environ 85 GW et les installations renouvelables d’environ 172 GW, cf. tableau 2 (BNetzA 2024d).

Au 15.4.2024 une capacité de production de 245 GW était activement au réseau et 12,3 GW (gaz, fioul, houille) sont maintenus en réserve stratégique ou provisoirement arrêtés. Les centrales en réserve ne peuvent injecter de l’électricité que sur demande des gestionnaires de réseau.

Tabelle 2 Puissance installee 2022_2023
Tableau 2 : Puissance installée à fin 2022 et 2023 y compris les systèmes de stockage (STEP, batteries etc.)

Le gouvernement maintient actuellement son objectif de sortie de la production d´électricité à partir de la houille et du lignite d´ici 2030 dans « l´idéal ».

Pour pallier la variabilité des énergies renouvelables la capacité des centrales à gaz existantes est insuffisante pour se substituer au charbon. C’est pour cela que le gouvernement fédéral prévoit jusqu’à 30 GW de moyens pilotables bas carbone supplémentaires à l’horizon de 2035 en incluant des centrales à biomasse et des grandes batteries de stockage d’électricité (Allemagne Energies 2023b ; BT 2023a ; EWI 2023). Les investisseurs prêts à se lancer dans de tels projets n’ont pas encore été trouvés : les risques sont trop importants. Le gouvernement voulait présenter une « stratégie » pour leur financement. Mais aucune décision n’a été prise en 2023.

Relation entre puissance installée et production réalisée

La figure 5 montre pour chaque filière la relation entre la puissance au réseau et la production réalisée en 2022 (BDEW 2023a ; BDEW 2023b ; AGEB 2024b). Les énergies renouvelables intermittentes (éolien et photovoltaïque) représentent environ 63% de la puissance nette totale au réseau.

Cependant, leur contribution à la production nette d´électricité – lissée sur l´année – s´élève à 40% seulement. Cela correspond aux facteurs de charge moyen suivants : photovoltaïque  ~ 9%, éolien terrestre  ~ 22% et éolien maritime ~ 32% sans toutefois apporter une contribution durable à la sécurité d´approvisionnement car la production est très variable au cours de l´année.

Fig 5 Capacite_production en pourcent 2023
Figure 5 : puissance nette installée et production nette en pourcentage en 2023 (hors installations de stockage d´énergie) Le nucléaire est pris en compte au prorata temporis jusqu’au 15.04.23

A titre de comparaison, les trois dernières centrales nucléaires (puissance nette 4,055 GW) ont produit en prolongation du cycle 6,7 TWh net jusqu’au 15 avril 2023. Cela correspond à un facteur de charge moyen d’environ 66%.

Stockage d’énergie

L´Allemagne dispose fin 2023 d´une capacité de stockage totale d´environ 16,5 GW (Agora Energiewende 2024).

Les STEP (Stations de Transfert d´Énergie par Pompage) en Allemagne y compris les installations au Luxembourg et en Autriche qui injectent de l´électricité directement dans le réseau allemand ont une capacité nette totale de 9,4 GW. Leur potentiel est largement exploité.

La durée de fonctionnement à pleine charge des stations de pompage-turbinage est limitée dans le temps en fonction du niveau de remplissage lorsqu´elles sont appelées. La quantité d´énergie stockée maximale actuellement disponible des STEP connectées au réseau allemand correspond à environ 40 GWh par cycle de charge.

La capacité des batteries industrielles et domestiques s´élève à environ 7,2 GW. Outre la capacité de stockage (GW), la quantité d´électricité stockée (GWh) est un paramètre important. Il convient de faire la distinction entre la quantité de stockage théorique et la quantité réelle. En effet, de nombreux systèmes de stockage par batterie ne sont pas entièrement déchargeables en mode de fonctionnement normal. Ces données ne sont malheureusement pas suffisamment connues. La quantité de stockage des batteries est estimée en 2023 à environ 11 GWh par cycle de charge (Agora Energiewende 2024 ; ISEA und PSG RWTH Aachen University 2023).

STEP et batteries ensemble pourraient théoriquement couvrir la demande moyenne en électricité en Allemagne pendant une heure environ.

Échanges transfrontaliers d’électricité

Pour un pays donné, le solde total des échanges physiques et contractuels devrait, dans l´idéal, être le même. Il convient toutefois de noter qu´en raison de la situation centrale de l´Allemagne en Europe, une certaine partie des flux physiques transfrontaliers sont des flux de transit et des flux en boucle.

Les échanges transfrontaliers dépendent non seulement de l´offre et de la demande, mais aussi des prix de l’électricité dans les pays voisins. Les prix de gros sur le marché journalier (day-ahead) de chaque pays sont le résultat de cette interaction.

L’Allemagne a été importatrice nette d’électricité pour la première fois depuis 2002 (AGEB 2024a). Le solde des échanges s’est creusé en particulier pendant l’été.

Le régulateur allemand a souligné que le fait d’être importatrice nette d’électricité ne permet pas de conclure à un manque de capacités de production. De nombreux pays européens voisins produisent leur électricité à un prix nettement inférieur, ce qui signifie qu’il peut être plus judicieux d’importer de l’électricité non seulement en raison du manque de capacité des centrales, mais aussi pour des raisons économiques.

Néanmoins, ces données indiquent que le mix de production allemand est comparativement cher par rapport à d’autres pays européens.

Le solde de la France a été légèrement exportateur (2,4 TWh) à la frontière avec l’Allemagne et la Belgique (région Core), contrairement aux années 2021 et 2022 (RTE 2024).

Fig 6 export _ import 2023
Figure 6 : solde des échanges physiques d´électricité en TWh

Réseaux de Transport

Le développement des réseaux de transport et de distribution est crucial pour la transition énergétique. Les gisements de vent, dans le nord du pays, étant géographiquement distants des grands centres de consommation dans l´ouest et sud industriel, l´épine dorsale est constituée par plusieurs tracés nord – sud en courant continu afin de limiter les congestions (Allemagne Energies 1).

Les besoins en réseaux (nouvelles lignes, renforcement des lignes existantes) sont évalués à environ 14.000 km à l´horizon de 2035 dont environ 5.600 km en courant continu (BMWK 2023e). Seuls 2822 km (environ 20,2%) étaient réalisés en 2023, 1.846 km ont reçu l´autorisation de construction ou sont en construction (BNetzA 2023b).

Le plan de développement du réseau 2037/2045 dont la confirmation finale est prévue en 2024 décrit pour la première fois un réseau qui permet d’obtenir un système électrique climatiquement neutre d’ici 2037 et la neutralité carbone d’ici 2045. Ce plan à l’horizon de 2037/2045 nécessite un développement considérable de lignes électriques supplémentaires sur terre et en mer par rapport au plan actuel de 2035 (Allemagne Energies 1).

Réseaux en mer

Le gouvernement a fixé un objectif de développement des parcs éoliens en Mer du Nord et Mer Baltique d’ici 2050, pour atteindre 30 GW de puissance en service à l’horizon 2030, 40 GW d’ici 2035 et 70 GW à l’horizon de 2045. Les besoins en réseaux à l’horizon de 2030 sont évalués à environ 6400 km.

Coûts d´intervention pour éviter la congestion du réseau de transport 

L’injection accrue d’électricité éolienne dans le nord du pays a provoqué un net déséquilibre géographique entre la production éolienne dans le nord et les centres de consommation du sud et de l´ouest du pays. De forts flux nord – sud d´électricité apparaissent en cas d´injection importante d´électricité éolienne dans le nord de l´Allemagne et, parallèlement, d´une forte demande d´électricité et d´une très faible injection de photovoltaïque dans le sud du pays.

En raison du développement des énergies renouvelables variables loin des centres de forte consommation, associé à des retards dans la modernisation du réseau de transport, cette situation conduit fréquemment depuis 2015 à une congestion du réseau de transport et entraîne une flambée des coûts des actions correctives (i.e. redispatching, countertrading et centrales de réserve). Ces coûts sont supportés par le consommateur par le biais du tarif d´utilisation du réseau.

Fig 7 Netzengpassmassnahmen
Figure 7 : évolution des coûts de stabilisation du réseau de transport

Un record a été enregistré en 2022, soit plus de 4,2 Mds€ et deux fois plus qu’en 2021. Pour plus d’informations, cf. (Allemagne Energies 2023a).

Pour 2023, selon l’estimation du régulateur (BNetzA 2023c), le volume total des actions correctives s’élève à environ 34 TWh, soit presque 5% de plus par rapport à 2022. Malgré cela les coûts totaux de stabilisation du réseau de transport ont baissé à environ 3,1 Mds€ en 2023, principalement en raison de la baisse du prix de gros.

Les éoliennes maritimes et terrestres ont été la source de production la plus écrêtée en 2023. Les couts totaux de redispatching de la production renouvelable s’élèvent à environ 600 M€.

Deux des trois centrales nucléaires arrêtées mi-avril 2023 se situent en Allemagne du sud. A cela se rajoutera à terme la fermeture programmée des centrales à houille dans le centre et le sud.  Le manque de moyens pilotables dans le sud de l´Allemagne risque donc d´accroitre encore le volume des actions correctives à l´avenir.

Pour améliorer l’équilibrage du réseau en situation dégradée, l’Agence Fédérale des Réseaux (BNetzA 2017) a décidé la mise en service de turbines à combustion (4 sites dans le sud du pays d’une puissance totale de 1200 MW).

Prix de l’électricité

Evolution des prix sur le marché de gros de l’électricité

Suite à la crise énergétique en 2022, née de la guerre en Ukraine, le niveau des prix de gros de l´électricité en Allemagne avait plus que doublé par rapport à 2021, alors que les prix avaient déjà triplé en 2021 par rapport à 2020.

En 2023 le prix de gros moyen d’électricité s’est élevé à 95,18 €/MWh (BNetzA 2024a). Il représentait ainsi moins de la moitié de la valeur de 2022 (235,45 €/MWh) et a chuté au niveau de 2021, cf. figure 8.

La tension sur le prix de gros de l’électricité s’est résorbée en 2023 sous l’effet de deux dynamiques : d’une part le prix du gaz a sensiblement baissé avec la diversification des approvisionnements (voir figure 10) et d’autre part la réduction de la consommation d’électricité résultant des prix élevés.

Le prix reste toutefois largement supérieur à la moyenne des dix dernières années. Le remplacement du gaz russe, moins onéreux, par le GNL (Gaz Naturel Liquéfié), conduira vraisemblablement à un maintien des prix à des niveaux plus élevés que ceux observés avant la crise énergétique.

La figure 8 montre les moyennes annuelles de 2019 à 2023 des prix journaliers (dit « day-ahead ») sur le marché de gros pour la zone Allemagne/Luxembourg (BNetzA 2024a).

Fig 8 Prix spot 2019_2023
Figure 8 : moyennes annuelles de 2019 à 2023 des prix journaliers sur le marché de gros de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

Le tableau 3 montre, pour la période de 2019 à 2023, les prix de gros extrêmes pour la zone Allemagne/Luxembourg.

Tabelle 3 prix spot 2023
Tableau 3 : Moyennes annuelles des prix de gros de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

En 2023, le prix de gros le plus élevé de l´année a été enregistré le lundi 11 septembre entre 19h et 20h avec 524,27 €/MWh. Dans cette plage horaire, la forte consommation d´électricité a coïncidé avec une faible production des énergies renouvelables variables, rendant nécessaire une production conventionnelle accrue.

Le prix de gros le plus bas a été enregistré le dimanche 2 juillet 2023 entre 14h et 15h. Dans cette plage horaire, la production renouvelable a été supérieure à la consommation. Le prix de gros est tombé à – 500 €/MWh, soit à la valeur la plus basse autorisée par epexspot (EPEX SPOT 2023).

Bien que le niveau de prix sur le marché spot ait diminué en 2023, le prix d’électricité pour le consommateur reste supérieur au niveau d’avant crise énergétique et se situe parmi les plus élevés en Europe (Allemagne Energies 4).

Episodes de prix négatifs au marché journalier

Depuis plusieurs années le marché de gros en Allemagne est confronté à des épisodes de prix négatifs. Dans ces situations, les vendeurs payent les acheteurs, ce qui constitue une situation de marché singulière. Ces situations apparaissent en particulier en cas de forte production d´électricité d´origine renouvelable mais de faible demande, situations au cours desquelles certains moyens de production conventionnelle ne peuvent pas fonctionner en deçà d´un minimum technique.

En 2019 et 2020, l´augmentation des épisodes à prix négatifs a été un sujet majeur. En 2020 le nombre de pas horaires à prix négatif a battu un record avec 298.

Depuis 2021, le nombre de pas horaires à prix négatif a diminué en raison d´une flexibilité croissante du système électrique allemand et de la forte augmentation des prix de gros de l´électricité. Mais en 2023 une forte hausse du nombre de pas horaires à prix négatif a été observée à nouveau et le record de 2020 a été battu.

Fig 9 Nombre heures prix negatif 2019_2023
Figure 9 : pas horaires à prix négatif par trimestre sur le marché journalier entre 2019 et 2023 (BNetzA 2024a)

Alors que les exploitants d’une centrale conventionnelle doivent prendre à leur charge les frais des prix négatifs, la situation des producteurs d´énergies renouvelables dépend de la taille et de la date de mise en service des installations. 

Dans le cadre de l´avenant à la Loi sur les Énergies Renouvelables, entré en vigueur début 2021 (EEG 2021), la suspension de la rémunération des nouvelles installations d´énergies renouvelables > 500 kW (exception faite des éoliennes pilotes) intervient si le prix de gros affiche une valeur négative pendant au moins quatre heures sans interruption. Il s´agit d´un durcissement de la réglementation de 2017 qui reste toutefois en vigueur pour les installations mises en service avant 2021.

La loi EEG 2023 prévoit, dès 2024, une suspension de la rémunération pour des installations ≥ 400 kW à partir de 3 heures de prix négatifs sans interruption. A partir de 2027, les heures de prix négatifs ne seront en règle générale plus remboursées, hors petites installations < 400 kW et éoliennes pilotes.

Au total, 260 des 301 pas horaires à prix négatif sont tombés sous la « règle de 4 heures » en 2023, c’est-à-dire aucune rémunération n’a été versée et les exploitants des installations d’énergies renouvelables ont dû prendre à charge les frais des prix négatifs pour l’injection de leur électricité au réseau (FFE 2024).

Prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Malgré la baisse du prix sur le marché de gros en 2023, le prix de l’électricité pour les clients résidentiels a augmenté de 25% par rapport à 2022 (BNetzA 2024c). Il est supérieur d’environ 40% par rapport au niveau d’avant crise énergétique et se situe parmi les plus élevés en Europe (Allemagne Energies 4).

Les composants de prix réglementés par l’Etat (taxes, redevances et tarif d’utilisation des réseaux) représentent presque la moitié, même après la suppression de la charge de soutien des énergies renouvelables en 2022.

Fig 10 Haushaltskundenpreis
Figure 10 : évolution et décomposition des prix de l’électricité pour les clients résidentiels

Approvisionnement en gaz naturel

Selon les premières données (BNetzA 2024b), la consommation de gaz naturel a diminué de 4,3% en 2023 pour atteindre 810 TWh, soit le niveau le plus bas depuis la première moitié des années 90, cf. tableau 4.

Tabelle 4 Bilanz Erdgasversorgung
Tableau 4 : Approvisionnement en gaz naturel en Allemagne en 2022 et 2023

La consommation des clients résidentiels, de l’artisanat et du secteur  tertiaires représente environ 41% et celle de l’industrie 59% en 2023.

L‘Allemagne est fortement dépendante des importations. Elle dispose seulement d’un petit nombre de gisements nationaux de gaz naturel qui ont fourni 37 TWh en 2023 (2022 : 44 TWh). A cela s’ajoute l’injection de biogaz dans le réseau.

De ce fait, l’industrie gazière a été fortement marquée par les conséquences de la crise énergétique, née de la guerre en Ukraine. Cela a provoqué une importante modification dans l’origine des importations. Alors que jusqu’à 2022 plus de 60% du gaz naturel consommé en Allemagne provenaient encore de la Russie, ces importations ont fortement diminué courant 2022 (BNetzA 2023d).

Depuis septembre 2022, l’Allemagne n’importe plus de gaz naturel de la Russie. Ces livraisons ont été compensées par une augmentation des importations notamment en provenance de Norvège, des Pays-Bas et de la Belgique, cf. figure 11.

Fig 10 Gasimporte
Figure 11 : Importations annuelles et origine des importations du gaz naturel consommé en Allemagne

En outre, l’infrastructure gazière a été complétée par des terminaux méthaniers destinés à accueillir le gaz naturel liquéfié (GNL). En décembre 2023, trois terminaux étaient en service, trois autres sont en projet.

Au total, 69,7 TWh ont été importés en 2023 via les terminaux méthaniers en Allemagne. Cela correspond à une part de 7,2% des importations totales de gaz naturel.

Parmi les 6 pays d’origine du GNL, les États-Unis dominaient avec une part de 84 %. Les 5 autres pays, à savoir la Norvège, l’Angola, l’Égypte, les Émirats Arabes Unis et Trinité-et-Tobago, représentaient chacun entre 1 et 5 % (BDEW 2023a).

Bien que l’approvisionnement en gaz naturel ait été assuré en 2023, la situation de l’approvisionnement reste soumise à des risques (facteurs de risque : hiver froid, défaillance des importations norvégiennes ou d’une partie des importations de GNL).

Economie de l’hydrogène en 2023

L’hydrogène fait l’objet d’une attention croissante ces dernières années. Conscient de l’importance de l’hydrogène, le gouvernement allemand avait adopté en 2020 la « Stratégie nationale pour l’hydrogène ». L’objectif était de faire de l’hydrogène une technologie clé dans le cadre de la transition énergétique en particulier dans les industries qui ne peuvent pas utiliser directement l´électricité.

La stratégie nationale a été actualisée en 2023 dans le but de mettre à disposition suffisamment d’hydrogène « vert » et ses dérivés à l’horizon de 2030 (Allemagne Energies 1 ; BMWK 2023a). Les principaux objectifs : une capacité d’électrolyse de 10 GW d’ici 2030, le déploiement des infrastructures de transport d’hydrogène et le développement d’une stratégie d’importation d’hydrogène « vert ».

Jusqu’à présent, l’hydrogène « vert » ne joue pratiquement aucun rôle en Allemagne. La majeure partie des environ 57 TWh d’hydrogène actuellement produits provient de sources fossiles, principalement par le reformage du gaz naturel à la vapeur d’eau et la gazéification à partir de charbon. En outre, de l’hydrogène est généré comme sous-produit dans l’industrie chimique (actuellement 9,4% de la production totale).

Pour l’année 2030, la demande totale en hydrogène et ses dérivés est estimée à 95 – 130 TWh. Le gouvernement met particulièrement l’accent sur le développement de la capacité d’électrolyse nationale.

La capacité d’électrolyse en Allemagne s’élève actuellement à environ 110 MW, selon les estimations de la Fédération des Industries de l’Énergie et de l´Eau (BDEW 2023a). Il est prévu de mettre en place au moins 10 GW d´électrolyseurs d´ici 2030 pour la production d’hydrogène « vert ». Près de 20 % de la capacité visée de 10 GW seraient déjà en construction ou en projet, avec l’objectif d’une mise en service d’ici 2030. La production nationale de l’hydrogène « vert » pourrait se situer entre 22 et 28 TWh en 2030.

Actuellement, l’importation ou l’exportation d’hydrogène vers et depuis l’Allemagne est quasiment inexistante, notamment en raison du manque d’infrastructures nécessaires à cet effet – par exemple des canalisations ou des terminaux d’importation.  Le gouvernement prévoit la mise en place d´ici 2032 d’un premier réseau d´hydrogène d’une longueur d’environ 9.700 km. Environ 60% du réseau consisteraient en canalisations reconverties et 40% de canalisations nouvellement construites (Allemagne Energies 1 ; BMWK 2023c).

L’hydrogène n’est pas une source d’énergie mais un vecteur énergétique, il doit être créé. Le processus de production d´hydrogène « vert » est électro-intensif et les pertes de transformation par électrolyse sont élevées. La production nationale étant insuffisante pour couvrir la demande en 2030, il est également prévu de mettre en place une stratégie d’importation d’hydrogène « vert ».

La question de savoir sur quelles quantités d’hydrogène « vert » les parties prenantes (producteurs, fournisseurs et acheteurs) peuvent compter et à quel prix il sera négocié à l´avenir est d´une importance fondamentale pour évaluer son rôle dans le futur mix énergétique. Selon les études actuelles, l’hydrogène serait en 2030 encore 3 à 5 fois plus cher que le gaz naturel en Allemagne (EWI 2023).

Émissions de gaz à effet de serre

Le gouvernement allemand prévoit une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 65% d’ici 2030 par rapport à 1990 (Allemagne Energies 1). Fin 2023 la réduction atteint 46% par rapport à 1990.

Selon les premières estimations de l’Agence Fédérale de l’Environnement (UBA 2024c), les émissions de gaz à effet de serre ont diminué en 2023 d’environ 10% à 674 Mt CO2éq soit une réduction de l’ordre de 76 Mt CO2éq par rapport à 2022, cf. figure 12. Cependant, il ne s’agit pas d’un succès en matière de politique climatique mais plutôt du résultat de la baisse inédite de la consommation énergétique suite à l’affaiblissement de l’industrie allemande et des prix élevés de l’énergie.

Le secteur de l’énergie atteint 205 Mt CO2éq en 2023, soit une réduction d’environ 20% (52 Mt CO2éq) par rapport à l’année précédente, en raison d’une baisse de l’utilisation de combustibles fossiles pour la production d’électricité et de chaleur.  

Dans le secteur de l’industrie, les émissions ont diminué pour la deuxième année consécutive, pour atteindre environ 155 Mt CO2éq, soit une baisse de près de 13 Mt ou de presque 8% par rapport à l’année précédente. La baisse des émissions est déterminée par la diminution de l’utilisation des combustibles fossiles, en particulier du gaz naturel et du charbon. Les principales raisons sont l’évolution conjoncturelle négative et l’augmentation des coûts de fabrication, qui ont entraîné une baisse de la production.

Dans le secteur du bâtiment, une réduction des émissions de 7,5% (8,3 Mt) a pu être obtenue pour atteindre environ 102 Mt CO2éq. Malgré cette réduction, le secteur du bâtiment manque son objectif 2023 (cf. Loi de Protection du Climat) d’environ 1,2 Mt CO2éq. Les raisons de la baisse des émissions sont les économies d’énergie dues aux conditions climatiques douces en hiver 2023 et la hausse des prix à la consommation. L’installation de pompes à chaleur a également eu un effet positif sur l’évolution des émissions dans ce secteur. En revanche  les chauffages fossiles se sont vendus environ 2,5 fois plus que les systèmes de chauffage climatiquement neutre.

Le secteur des transports a émis environ 146 Mt CO2éq, soit une baisse de 1,2% par rapport à l’année précédente. Malgré cela, le secteur dépasse de 13 Mt CO2éq son objectif 2023 (cf. Loi de Protection du Climat). La raison principale est la lenteur de l’électrification du secteur. Les voitures électriques représentent à peine 20% des nouvelles immatriculations, comme c’était déjà le cas en 2022. Pour atteindre l’objectif de 15 millions de voitures électriques en 2030, leur part aux nouvelles immatriculations devrait passer à 90% dans les prochaines années.

Fig 11 emission 2023
Figure 12 : évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2 éq par an (hors secteur des terres et forêts – UTCATF) et objectif 2030 (UBA 2024a ; UBA 2024c)

Dans le secteur de l’électricité (part du secteur de l’énergie), la reprise économique après la crise sanitaire en 2020, combinée à une baisse de la production éolienne due aux conditions météorologiques défavorables, a entraîné en 2021 un recours accru à la production d’électricité à base de charbon, cf. figure 13.

Cet effet s’est encore accéléré en 2022, en raison de la crise du gaz née de la guerre en Ukraine, mais aussi de la réduction de production nucléaire française, laquelle a entraîné une augmentation des exportations d’électricité vers la France.

En 2023, outre ces effets déjà mentionnés, l’Allemagne a été importatrice nette d’électricité pour la première fois depuis 2002 (voir plus haut) et la reprise économique a continué à faire du surplace. Cela a un effet réducteur sur les émissions de CO2. Toutefois cette baisse sous le niveau de 2019 ne peut pas être considérée comme durable.

Les émissions pour la production d’électricité représentent en 2023 autour de 26% des émissions totales en Allemagne (UBA 2024d) contre environ 5% en France (RTE 2024).

En raison de la baisse de production d’électricité (notamment à base de lignite/houille) ainsi que de l’augmentation de la part des énergies renouvelables et du surplus d’importation d’électricité dont les émissions de CO2 ne peuvent pas être attribuées à la production d’électricité nationale (cf. tableau 1 et figure 6), les émissions moyennes de CO2 pour la production nationale d’électricité dʼ1 kWh (intensité carbone) ont légèrement baissé pour s’établir à environ 380 g CO2/kWh en 2023 (2022 : 429 g CO2/kWh), cf. figure 13.

Fig 13 Emissionen Strommix
Figure 13 : Émissions de CO2 de la production d’électricité

Malgré le développement massif des énergies renouvelables, l’intensité carbone de la production d’électricité est toujours élevée et largement supérieure au niveau européen : 0,26 kg CO2/kWh en 2021 selon (MTE 2023). Bien que très variable en termes de production d’électricité et de CO2 par heure, la moyenne allemande est environ 7 fois supérieure à la moyenne française.

Révision de la Loi sur la Protection du Climat

La loi en vigueur depuis 2021 avait fixé des objectifs annuels en matière d´émissions de gaz à effet de serre pour chaque secteur entre 2020 et 2030. L’objectif est de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 65% d’ici 2030 par rapport à 1990. Si les objectifs ne sont pas atteints dans certains secteurs, les ministères compétents doivent présenter des mesures immédiates pour y remédier.

En juin 2023 le gouvernement a adopté une révision de la Loi sur la Protection du Climat (BReg 2023a). Les objectifs sectoriels ont été supprimés et remplacés par le bilan global couvrant tous les secteurs. Cela signifie qu’il sera possible de compenser entre les secteurs. Si, par exemple, le secteur des transports n’atteint pas ses objectifs, cela peut être compensé par d’autres secteurs ayant dépassé leurs objectifs. L’essentiel est que l’objectif global de réduction annuelle des émissions de gaz à effet de serre soit atteint.

La révision de la loi est critiquée par des associations de protection du climat craignant une érosion des objectifs climatiques de l’Allemagne. Le parlement a finalement donné son feu vert en avril 2024. 

En lien avec la révision de la Loi sur la Protection du Climat, un programme de protection du climat (Klimaschutzprogramm 2023) a été adopté par le gouvernement en octobre 2023 (BMWK 2023b) pour se rapprocher de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ce programme regroupe de nombreuses nouvelles mesures notamment dans les secteurs du bâtiment et des transports. En revanche, même si toutes les mesures étaient mises en œuvre de manière conséquente, les émissions ne baisseraient pas assez vite et occasionneraient un gap d’environ 200 Mt CO2éq d´ici 2030 par rapport à la Loi sur la Protection du Climat (Allemagne Energies 1).

Perspectives 2024

En tant qu’instrument de financement, le Fonds pour le Climat et la Transformation (Klima- und Transformationsfonds) apporte une contribution essentielle à la réalisation des objectifs de l’Allemagne en matière de politique énergétique et climatique. Un total environ 212 Mds€ a été prévu entre 2024 et 2027 pour promouvoir le tournant énergétique et la protection du climat (BReg 2023c). Après la suppression, le 1er juillet 2022, de la « EEG-Umlage » payée jusqu’à cette date par le consommateur, le Fonds permet entre autres de refinancer le soutien aux énergies renouvelables (Allemagne Energies 3), ainsi que le programme fédéral pour la rénovation énergétique du bâtiment. Il est principalement alimenté par les recettes tirées des systèmes d´échanges de quotas d´émission européens (ETS) et de la taxe carbone nationale (Allemagne Energies 1).

Dans le but de soutenir les entreprises lors de la pandémie de coronavirus le Fonds de Stabilisation Economique (Wirtschaftsstabilisierungsfonds) a été créé en 2020. Ce Fonds a été réorienté en 2022 afin d’atténuer les conséquences de la crise énergétique née de la guerre en Ukraine. Il a été doté d’un nouveau crédit de 200 Mds€ notamment pour financer les boucliers tarifaires pour l’électricité et le gaz dans le but d´atténuer la hausse des coûts de l´énergie et donc de soulager les clients résidentiels et les entreprises (Allemagne Energies 2022).

Suite au jugement de la Cour Constitutionnelle de Karlsruhe de novembre 2023, la réaffectation de 60 Mds€, initialement destinés à la lutte contre la pandémie de coronavirus, au Fonds Climat et Transformation est considérée comme incompatible avec la Loi Fondamentale de l’Allemagne (BVerfG 2023).

Avec le verdict de Karlsruhe, qui supprime purement et simplement une partie du budget prévu, le financement en matière d’investissements verts devient un casse tête pour 2024. Le gouvernement doit maintenant, tout en respectant l’obligation de « frein à l’endettement » inscrite dans la Constitution, faire des économies ailleurs pour trouver cette somme supplémentaire.

Etant donné que le jugement pourrait mettre en péril d’autres fonds, les boucliers tarifaires pour l’électricité et le gaz, financés par le Fonds de Stabilisation Economique, ont expiré à la fin de 2023. Initialement une prolongation a été prévue jusqu’à fin mars 2024 (BT 2023b). Dans le même contexte, la subvention de 5,5 Mds€, prévue pour la stabilisation des tarifs du réseau de transport en 2024, a été supprimée (Agora Energiewende 2024) ce qui conduit à une hausse des tarifs du réseau de transport à partir de 2024 pour les consommateurs. L’État a également décidé de mettre fin aux aides à l’achat d’une voiture électrique à partir de mi-décembre 2023.

De plus la taxe carbone nationale a été augmentée à 45 € par tonne de CO2 en 2024 ce qui renchérit pour le consommateur final les prix des produits énergétiques tels que l’essence, le gazole, le fioul et le gaz naturel (Allemagne Energies 1). Le gouvernement fédéral revient ainsi sur sa décision de 2022 de n’augmenter que modérément les prix de la tonne de CO2 à 35 € en 2024 pour atténuer les effets de la crise énergétique (BMWK 2022).

L’année 2023 a été marquée par certains progrès en matière de politique climatique, notamment dans les secteurs du bâtiment (BMWK 2023d ; Missions allemandes en France 2023) et de l’électricité.

Toutefois, le débat sur la nouvelle Loi sur les économies d’énergie dans les bâtiments a laissé des traces au sein de la population en ce qui concerne la confiance dans la mise en œuvre pratique et l’équilibre social des mesures climatiques. Le chauffage aux énergies renouvelables étant un pilier majeur de la protection du climat, le gouvernement doit donc assurer durablement le financement des mesures adoptées.

Un autre dossier brûlant est la construction de nouveaux moyens pilotables bas carbone annoncée par le gouvernement en 2023 (voir plus haut). Compte tenu du fait que ces nouvelles centrales ne fonctionneront que lors d’épisodes de production d’origine renouvelable insuffisante, leur rentabilité est loin d’être acquise. À cela s’ajoutent les incertitudes sur la disponibilité suffisante de l’hydrogène « vert » à un prix raisonnable. Pour l’instant, les investisseurs potentiels attendent que le gouvernement présente sa stratégie pour faciliter le déploiement de nouvelles centrales

Le temps presse. La stratégie pour leur financement doit être établie au plus tard au premier semestre 2024 afin de garantir la mise en place d’une capacité suffisante de moyens pilotables supplémentaires à la fin de la décennie.

Références

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ISEA und PSG RWTH Aachen University (2023) Battery charts. The development of battery storage systems in Germany: A market review. ISEA – Institut für Stromrichtertechnik und elektrische Antriebe. En ligne : https://www.battery-charts.de.

Missions allemandes en France (2023) Se chauffer sans nuire au climat : mise en place d’une nouvelle loi sur les économies d’énergie dans les bâtiments. Missions allemandes en France. En ligne : https://allemagneenfrance.diplo.de/fr-fr/actualites-nouvelles-d-allemagne/03-Economie/-/2594522.

MTE (2023) Chiffres clés du climat France, Europe et Monde. Édition 2023. Ministère de la Transition Énergétique. En ligne : https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-du-climat-2023/avant-propos.

RTE (2024) Bilan électrique 2023. Réseau de Transport d’Électricité. En ligne : https://analysesetdonnees.rte-france.com/bilan-electrique-2023/synthese.

UBA (2024a) Detaillierte Treibhausgas-Emissionsbilanz 2022: Emissionen sanken um 40 Prozent gegenüber 1990 – EU-Klimaschutzvorgaben werden eingehalten. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/detaillierte-treibhausgas-emissionsbilanz-2022.

UBA (2024b) Erneuerbare Energien in Zahlen. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/themen/klima-energie/erneuerbare-energien/erneuerbare-energien-in-zahlen.

UBA (2024c) Klimaemissionen sinken 2023 um 10,1 Prozent – größter Rückgang seit 1990. Communiqué de presse du 15.03.2024. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/klimaemissionen-sinken-2023-um-101-prozent.

UBA (2024d) Entwicklung der spezifischen Treibhausgas-Emissionen des deutschen Strommix in den Jahren 1990 – 2023. Umweltbundesamt. En ligne : https://www.umweltbundesamt.de/publikationen/entwicklung-der-spezifischen-treibhausgas-10.






Allemagne : les chiffres clés de l´énergie en 2022

L’édition 2023 est disponible ici

Texte mis à jour le 13.07.2023

Temps de lecture : 6 min (résumé), 35 min (article entier)

Résumé 

La nouvelle coalition gouvernementale en Allemagne en fonction depuis décembre 2021, composée par les Sociaux-démocrates (SPD), les Verts (Bündnis 90/Die Grünen) et les Libéraux (FDP), voulait apporter un nouveau rythme à la transition énergétique.

L´atteinte des objectifs de l´accord de Paris sur le climat a été considérée comme la priorité absolue. Une part de 80% d´énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité est visée d´ici 2030 contre 65% par le gouvernement sortant et un approvisionnement en électricité quasi climatiquement neutre d´ici 2035. Le gouvernement a aussi souhaité accélérer la sortie de la production d´électricité à partir du charbon, actuellement prévue pour 2038, et l´avancer à 2030 « dans l´idéal ».

La crise énergétique, née de la guerre en Ukraine, a changé la donne car l´Allemagne a été sevrée du gaz russe dont elle était fortement dépendante. Les prix de l´énergie ont atteint des niveaux records et favorisé considérablement l´inflation qui a dépassé les 10%. Des mesures de presque 300 Mds€ ont été adoptées pour soutenir les citoyens et l´industrie pendant cette période difficile. Face à la menace d´une pénurie d´énergie, le gouvernement a appelé à la mobilisation générale en faveur de la sobriété énergétique. La consommation d´énergie primaire a ainsi baissé de presque 5% par rapport à 2021. La consommation de gaz a chuté de presque 15%, en revanche celle des autres énergies fossiles a augmenté, soit 3% pour le pétrole, 4,8% la houille et 5,1% le lignite (environ 90% de la consommation ont contribué à la production d´électricité). 

La gestion de la crise à court terme a déterminé l´agenda politique en faveur de la sécurité énergétique, en partie au détriment des objectifs climatiques. En conséquence, les émissions de gaz à effet de serre stagnent au niveau de 2021 malgré une baisse de la consommation énergétique et le développement des énergies renouvelables ne décolle pas.

Selon les données statistiques provisoires, les résultats énergétiques 2022 se résument comme suit :

  • Les émissions de gaz à effet de serre baissent légèrement et se situeraient à 746 Mt CO2éq (2021 : 760 Mt CO2éq). L´objectif national pour 2022, fixé par la Loi sur la Protection du Climat à 756 Mt CO2éq, a été atteint malgré une augmentation des émissions du secteur de l´énergie de presque 11 Mt CO2éq par rapport à 2021. La raison est l´utilisation accrue de la houille et du lignite pour la production d´électricité ;
  • La consommation d´énergie primaire recule de 5,4% (- 4,0% corrigée des variations climatiques) par rapport à 2021 et s´élève à 3 269 TWh (281 Mtep). Elle atteint son niveau le plus bas dans l´Allemagne réunifiée. Au total, les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) comptent pour près de 79% de la consommation d´énergie primaire (contre environ 77% en 2021) ;
  • La consommation intérieure brute d´électricité recule à 549 TWh (2021 : 569 TWh) suite aux tendances conjoncturelles au ralentissement et les effets de la hausse des prix ;
  • La production brute d´électricité baisse d´environ 2% à 571 TWh (2021 : 582 TWh). La tendance à la hausse des prix du gaz naturel, déjà perceptible depuis la mi-2021, s´est renforcée de manière significative avec la guerre en Ukraine. Cela a entraîné des changements dans le mix électrique : La  production brute d´électricité à partir du gaz baisse à 80 TWh (2021 : 90 TWh), en revanche la production du couple lignite/houille augmente à 181 TWh contre 165 TWh en 2021. Cela s´explique en partie par la réactivation courant 2022 des centrales à charbon en réserve. La part du nucléaire baisse à 35 TWh contre 69 TWh en 2021 suite à la fermeture programmée de 4 GW de capacités nucléaires fin 2021 ;
  • Grâce aux bonnes conditions météorologiques, les filières renouvelables marquent une augmentation record. Leur part à la production brute d´électricité atteint 44,5% (2021 : 40,2%) et, en conséquence, leur part dans la consommation brute augmente à 46,2 % contre 41,2% en 2021.
  • Malgré ce record la crise du développement de l´éolien terrestre persiste, l´ajout net atteint seulement 2,1 GW en 2022. Le double aurait été nécessaire pour se rapprocher de l´objectif d´une puissance installée de 69 GW fin 2024. Au total, neuf appels d´offres éoliens et solaires sur dix ont été sous-souscrits en 2022. L´attribution du volume mis aux enchères étant loin d´être atteinte, leur développement risque de rester en deçà des besoins dans les années à venir. Les mesures décidées par le gouvernement en 2022 ne suffiront pas à atteindre l´objectif de 80% d´énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité d´ici 2030 ;
  • Le solde exportateur d´électricité augmente à 28 TWh (2021 : ~19 TWh) en hausse pour la première fois depuis 2017. Les principales raisons sont l´augmentation de la production d´électricité à partir des filières renouvelables et du charbon en Allemagne ainsi que les changements dans le mix de production d´électricité en Europe. A titre d´exemple : le solde exportateur des échanges commerciaux entre l´Allemagne et la France a plus que doublé en faveur de l´Allemagne en passant à 15,3 TWh en 2022 contre 6,5 TWh en 2021 selon l´Agence Fédérale des Réseaux ;
  • Sur le marché de gros de l´électricité le prix journalier double en 2022 par rapport à 2021 pour atteindre 235 €/MWh. Il a été fortement influencé par le prix du gaz.

Les projets phares de la transition énergétique allemande en 2022 : 

  • Adoption courant 2022 d´un ensemble de mesures économiques urgentes, temporaires et exceptionnelles de presque 300 Mds€ pour atténuer la flambée des prix de l´énergie et l´impact de l´inflation. L´objectif : soutenir les citoyens et l´industrie pendant cette période difficile et préserver les emplois. La principale mesure, le plafonnement temporaire des prix du gaz, de la chaleur et de l´électricité, a reçu le feu vert en décembre 2022 ;
  • Adoption en juillet 2022 d´un paquet législatif de presque 600 pages visant à accélérer le développement des énergies renouvelables et à renforcer la sécurité d´approvisionnement en énergie. La mesure phare de ce paquet est l´amendement à la Loi sur les Énergies Renouvelables du secteur électrique (EEG 2023).
    Les objectifs à l´horizon de 2030 ont été fortement rehaussés par rapport
    au gouvernement sortant, soit 115 GW pour l´éolien terrestre, au moins 30 GW pour l´éolien marin et 215 GW pour le photovoltaïque. Les 360 GW visés nécessitent au cours des huit prochaines années presque un triplement de leur puissance installée fin 2022 ;
  • Suite à la menace de pénurie d´énergie, née de la guerre en Ukraine, des mesures en faveur de la sécurité de l´approvisionnement d´électricité ont été prises : prolongation du fonctionnement des 3 derniers centrales nucléaires jusqu´au mi-avril 2023 et réactivation temporaire des centrales à houille, lignite et fioul en réserve jusqu´à fin mars 2024, tout en maintenant l´objectif de l´abandon du charbon en 2030.

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Sommaire

Consommation énergétique

Consommation et production d´électricité

  • Parc de production installé
    • Centrales conventionnelles et stockage d´énergie
    • Energies renouvelables
  • Relation entre puissance installée et production réalisée
  • Faits marquants des énergies renouvelables intermittentes en 2022

Échanges transfrontaliers d´électricité

Modernisation des réseaux de transport

  • Coûts des interventions pour éviter la congestion du réseau de transport

Émissions de gaz à effet de serre

Evolution des prix sur le marché de gros de l´électricité

  • Episodes de prix négatifs au marché journalier

Projets phares de la transition énergétique allemande en 2022

  • Mesures de soutien de presque 300 Mds€ pour les citoyens et l´industrie
  • Paquet législatif visant à accélérer le développement des énergies renouvelables
  • Mesures d´urgence en faveur de la sécurité de l´approvisionnement d´électricité

Développement de la politique énergétique et perspectives 2023  

Références

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Consommation énergétique

Selon AG Energiebilanzen (AGEB 2023a) la consommation d´énergie primaire atteint 3269 TWh (281 Mtep) en 2022, cela correspond à une baisse de 5,4 % (~ 187 TWh) par rapport à l´année précédente (2021 : 3456 TWh ou 297 Mtep). Elle atteint son niveau le plus bas dans l´Allemagne réunifiée.

Les principales raisons sont des températures plus chaudes par rapport à 2021 et la forte hausse des prix de l´énergie, en particulier pour le gaz naturel, qui a déclenché une mobilisation générale en faveur de la sobriété énergétique. La tendance à la hausse des prix du gaz naturel, déjà perceptible depuis la mi-2021, s´est renforcée de manière significative avec la guerre en Ukraine et les efforts de l´Allemagne pour s´émanciper de sa forte dépendance au gaz russe. La baisse de la production dans certains secteurs économiques a également contribué à la réduction de la consommation énergétique.

Une raison de la hausse de la consommation énergétique est la reprise économique après la suppression des restrictions liées à la pandémie de la Covid.

Corrigée de l´aléa météorologique la consommation énergétique baisse seulement de 4,0% selon AG Energiebilanzen (AGEB 2023a).

Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) continuent de représenter près de 79% de la consommation énergétique. Le pétrole reste l´énergie fossile la plus importante en 2022 suivi par le gaz naturel.

La consommation des produits pétroliers a connu une hausse de 2,9% par rapport à 2021. La substitution du gaz naturel par le pétrole explique en partie l´augmentation de la part du pétrole dans la consommation d´énergie primaire à 35,3% (2021 : 32,5%).

La consommation de gaz naturel baisse de presque 15,7% en 2022. Cause principale : les températures temporairement plus chaudes et une vente réduite dans tous les secteurs de consommation due à la hausse du prix du gaz.  La part du gaz naturel dans la consommation d´énergie primaire s´est réduite à 23,6% contre 26,6% en 2021.

Les conséquences de la guerre en Ukraine se sont traduites par une nette modification de la structure des importations du gaz naturel. En 2021, environ 52% du gaz naturel provenait de Russie, alors qu´en 2022 ce chiffre est tombé à 22% (BNetzA 2023e). Depuis septembre 2022, plus aucun transport par gazoduc en provenance de Russie vers l´Allemagne n´a eu lieu. La cessation de ces livraisons a été partiellement compensée par une augmentation des importations entre autres via des gazoducs en provenance des Pays-Bas, de la Belgique et de la France. Les plus grandes importations provenaient de la Norvège (environ 33%).

Le charbon (couple lignite/houille) atteint une part totale de 19,8% de la consommation d´énergie primaire contre 18,0% en 2021.

La consommation du lignite augmente de 3,5% en 2022. Le lignite atteint une part de 10% (2021 : 9,1%) de la consommation d´énergie primaire. Environ 90% ont contribué à la production d´électricité. L´augmentation de la part du lignite a compensé la réduction d´autres sources d´énergie et notamment du gaz naturel pour la production de l´électricité et de la chaleur.

La consommation de la houille augmente de 4% en 2022. Son utilisation dans les centrales électriques augmente même de plus de 16%, favorisée par la réactivation courant 2022 des centrales à houille en réserve pour assurer la sécurité de l´approvisionnement d´électricité. En revanche, dans l´industrie sidérurgique l´utilisation de la houille a diminué de 6% en raison de l´évolution conjoncturelle. La houille atteint une part de 9,8% (2021 : 8,9%) de la consommation d´énergie primaire.

La part du nucléaire a baissé de près de la moitié en 2022 suite à la fermeture programmée de 4 GW de capacité nucléaire fin 2021. La production du nucléaire atteint une part de 3,2% (2021 : 6,1%) de la consommation d´énergie primaire.

Fig 1 Energie primaire 2022
Figure 1 : Consommation d´énergie primaire selon AG Energiebilanzen (AGEB 2023a)

La part des énergies renouvelables à la consommation d´énergie primaire a augmenté de 3,8% et atteint 17,2% (2021 : 15,7%). Cause principale : une météo favorable pour l´éolien et le photovoltaïque. La part de la biomasse représente 51% en 2022 (2021 : 53%) dans la consommation d´énergie primaire des énergies renouvelables.

Consommation et production d´électricité

La consommation intérieure brute d´électricité recule à 549 TWh (2021 : 569 TWh) suite aux tendances conjoncturelles au ralentissement, une météo plus clémente et une hausse drastique des prix de l´énergie notamment avec la guerre en Ukraine.

Grâce aux conditions météorologiques favorables, les filières renouvelables et notamment l´éolien et le photovoltaïque marquent une production record (UBA 2023a).

Sous l´hypothèse que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables serait entièrement consommée en Allemagne, leur part dans la consommation intérieure brute augmente à 46,2%% contre 41,2% en 2021. Conformément aux prescriptions du gouvernement fédéral, il s´agit du taux déterminant pour la réalisation des objectifs en matière d´énergies renouvelables.  La baisse générale de la consommation d´électricité amplifie statistiquement l´effet de l´augmentation de la part des énergies renouvelables.

La production brute d´électricité a également enregistré un net recul par rapport à 2021, cf. figure 2. En revanche le solde d´ exportation d´électricité de l´Allemagne a marqué une hausse (voir plus loin).

La production brute d´électricité baisse à 571 TWh (2021 : 582 TWh). La tendance à la hausse des prix du gaz naturel, déjà perceptible depuis la mi-2021, s´est renforcée de manière significative avec la guerre en Ukraine. Cela a entraîné des changements dans le mix électrique en faveur du charbon.

La production brute d´électricité à partir du gaz naturel diminue à 80 TWh en 2022 contre 90 TWh en 2021. La flambée des prix du gaz suite au manque de livraisons de gaz depuis la Russie a entraîné l´utilisation accrue du charbon en substituant la production à partir du gaz naturel.

La part de production d´électricité du couple lignite/houille a augmenté à 32% contre 28% en 2021. Les centrales au lignite ont produit 116 TWh, cela correspond à une augmentation de la production de 5,5% par rapport à 2021 (110 TWh).  Les centrales à houille ont fourni 64 TWh, soit une augmentation d´environ 18% par rapport à 2021 (55 TWh). La hausse de production s´explique en partie par la réactivation courant 2022 des centrales à houille en réserve (voir plus loin).

La part de production brute à partir du nucléaire baisse à 6,1% contre 11,8% en 2021 suite à la fermeture programmée de 4 GW de capacité nucléaire fin 2021. Les centrales nucléaires allemandes ont produit 35 TWh bruts, soit presque 50% de moins qu´en 2021 (69 TWh).

Les filières renouvelables enregistrent une hausse de production de plus de 8,5%. Leur part dans la production brute passe à 44,5%, soit à 254 TWh, contre 40,1% en 2021 (234 TWh). Le nombre élevé d´heures d´ensoleillement sur l´ensemble de l´année et la forte production des éoliennes en janvier et février 2022 ont largement contribué à cette hausse (voir plus loin).

Fig 2 Stromproduktion brutto 2022
Figure 2 : Production brute d´électricité en 2022 (AGEB 2023b ; BDEW 2022 ; UBA 2023a)

Le tableau 1 ci-dessous détaille la production brute pour chaque filière en 2022 par rapport à 2021 pour l´ensemble du secteur de l´électricité, y compris la production destinée aux propres besoins de l´industrie et l´autoconsommation individuelle et collective.

Bien que l´éolien et le photovoltaïque marquent une augmentation record et que la production des énergies conventionnelles baisse de presque 9%, celles-ci continuent à contribuer pour presque 56% à la production brute. Presque 51% de la production brute totale sont assurés par des sources décarbonées (renouvelables et nucléaire).

Le photovoltaïque contribue pour presque un quart à la production renouvelable totale. Cette quantité d´électricité comprend non seulement les injections dans le réseau public mais aussi l´autoconsommation.

La production à partir de la biomasse solide, liquide et gazeuse stagne au niveau de 2021. Malgré cela les sources d´énergies biogènes, en ajoutant la production des centrales à partir de déchets biogènes, ont contribué pour environ un cinquième à la production renouvelable en 2022.

La production d´hydroélectricité, qui a une importance limitée outre-Rhin, baisse d´environ 11% par rapport à 2021 suite à l´extrême faiblesse des précipitations en 2022.

Tabelle 1 evolution production electricite 2021-2022
Tableau 1 : production (hors transfert d´énergie par pompage) et consommation d´électricité 2021 et 2022 selon (AGEB 2023b ; Agora Energiewende 2023 ; BDEW 2022 ; UBA 2023a)

Depuis 2011 la production renouvelable a plus que doublé, tandis que la production du couple houille/lignite a reculé d´environ 31%. En revanche l´année 2021 marque une inversion de la tendance : le charbon (couple houille/lignite) est à nouveau en hausse, cf. figure 3.

Fig 3 evolution production electricite 2010-2022
Figure 3 : évolution de la production brute des différentes filières depuis 2010 (AGEB 2023b ; BDEW 2022 ; UBA 2023a)

La figure 4 montre bien que la hausse célébrée de la production renouvelable ne cache pas le fait que la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaire) est en baisse depuis 2020 (AGEB 2023b ; UBA 2023a).

Fig 4 Production co2frei 2022
Figure 4 : évolution de la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaires)

Après l´arrêt de la centrale nucléaire de Philippsburg unité 2 fin 2019, les énergies renouvelables n´ont pas été en mesure de pallier la perte de production du nucléaire. Le bilan de la production bas-carbone s´est encore s´aggravé depuis l´arrêt des trois centrales nucléaires fin 2021 et retombe au niveau de 2017.

Parc de production

L´Allemagne exploite deux parcs de production en parallèle pour une pointe de consommation autour de 82 GW.

Le pays disposait fin 2022 d´un parc de production d´environ 236 GW nets hors systèmes de stockage (STEP, batteries etc.) dont ~ 87 GW de moyens pilotables conventionnels et ~150 GW d´installations renouvelables (BDEW 2022 ; BNetzA 2022a ; Agora Energiewende 2023 ; UBA 2023a).

Pour réduire la consommation de gaz dans le secteur de l´électricité en cas de menace de pénurie de gaz, une « Loi de mise à disposition de centrales électriques de remplacement » (Ersatzkraftwerkebereithaltungsgesetz en allemand) est entrée en vigueur mi-2022.  Cette loi prévoit la réactivation, limitée dans le temps jusqu´au 31 mars 2024, des centrales thermiques à flamme (houille, lignite et fioul), situées dans la réserve stratégique, afin qu´elles puissent prendre le relais si l´approvisionnement en gaz est menacé par l´arrêt des livraisons de gaz russe (Allemagne Energies 2022a).

Face aux baisses de livraison de Gazprom, une capacité d´environ 7 GW (5,1 GW de centrales à houille et 1,9 GW de centrales à lignite) a été réactivée courant 2022. Au total environ 79 GW de centrales conventionnelles (y compris les centrales diverses mais hors systèmes de stockage) ont été activement sur le marché électrique fin 2022. La réserve stratégique restante s´élève à 5,6 GW (BNetzA 2022a) et environ 2 GW (gaz, fioul) sont provisoirement arrêtés.

Le tableau 2 détaille l´évolution de la puissance totale nette installée du secteur électrique en 2021 et 2022, hors installation de stockage de l´énergie (stations de transfert d´énergie par pompage (STEP), batteries, etc.).

Tabelle 2 Puissance installee 2021_2022
Tableau 2 : Puissance installée en 2021 et 2022 y compris les centrales de l´industrie servant principalement à l´autoconsommation

Centrales conventionnelles et stockage d´énergie

Centrales nucléaires

En 2022 la puissance installée a baissé à 4,055 GW par suite de l´arrêt de trois centrales nucléaires (4,058 GW) le 31.12.2021 (Allemagne Energies 2022b). Le fonctionnement des trois centrales nucléaires restantes a été prolongé jusqu’au 15 avril 2023 (Allemagne Energies 2022c).

Centrales à houille

Fin 2022 environ 18 GW ont été activement disponibles sur le marché de l´électricité. Courant 2022 une capacité de 5,1 GW a été réactivée et 1,4 GW sont maintenus en réserve stratégique.

Centrales à lignite

Fin 2022 environ 17 GW sont activement disponibles sur le marché de l´électricité. Courant 2022, une capacité de 1,9 GW a été réactivée ce qui correspond à la totalité de la réserve stratégique existante et ~ 0,3 GW ont été arrêtés définitivement.

Centrales à gaz

Fin 2022 environ 30 GW sont activement sur le marché de l´électricité. Une capacité de presque 2 GW a été mise en service.

Environ 1,7 GW ont été fermés ou retirés du marché et environ 2,6 GW sont en réserve stratégique ou font partie du mécanisme de capacité.

Centrales au fioul et divers

Début 2022 environ 8 GW de centrales au fioul et divers (déchets etc.) sont activement sur le marché de l´électricité. Centrales au fioul : sur les 4,8 GW installés environ 1,6 GW sont actuellement en réserve stratégique et 0,2 GW fermés ou retirés du marché.

Stockage d´énergie

L´Allemagne dispose fin 2022 d´une capacité de stockage totale d´environ 13 GW (Agora Energiewende 2023 ; BNetzA 2022a ; ISEA und PSG RWTH Aachen University 2022).

Les STEP (Stations de Transfert d´Énergie par Pompage) y compris les installations au Luxembourg et en Autriche qui injectent de l´électricité directement dans le réseau allemand ont une capacité nette totale de 9,8 GW. La capacité totale des batteries (domestiques et industrielles) s´élève à environ 3,4 GW.

Outre la capacité de stockage (GW), la quantité d´électricité stockée (GWh) est un paramètre important, car la capacité de puissance seule ne fournit pas d´informations sur la durée pendant laquelle cette capacité peut être mobilisée. Il convient de faire la distinction entre la quantité de stockage théorique et la quantité réelle. En effet, de nombreux systèmes de stockage par batterie ne sont pas entièrement déchargeables en mode de fonctionnement normal. Ces données ne sont malheureusement pas suffisamment connues. La quantité de stockage des batteries est estimée à 6 GWh maximal par cycle de charge (Agora Energiewende 2023).

La durée de fonctionnement à pleine charge des stations de pompage-turbinage est également limitée dans le temps en fonction du niveau de remplissage lorsqu´elles sont appelées. La quantité d´énergie stockée maximale actuellement disponible des STEP connectées au réseau allemand correspond à environ 40 GWh par cycle de charge.

Energies renouvelables

La puissance installée des énergies renouvelables a augmenté de 10 GW, soit 7% par rapport à 2021, pour passer à 150 GW (cf. tableau 2).  Ce résultat est décevant compte tenu de l´annonce en décembre 2021 par la nouvelle coalition gouvernementale, composée des Sociaux-démocrates (SPD), des Verts (Bündnis 90/Die Grünen) et des Libéraux (FDP), de vouloir apporter un nouveau rythme à la transition énergétique et au développement des énergies renouvelables intermittentes (Allemagne Energies 2021).

Comme ces dernières années, l´ajout de la capacité photovoltaïque a été nettement plus élevé que celle de l´éolien terrestre : sur les 10 GW installés en 2022, environ trois quarts sont dus au photovoltaïque. Notamment le développement de l´éolien terrestre reste avec 2,1 GW nets en 2022 loin des attentes (Windguard 2023).  Le double aurait été nécessaire pour se rapprocher de l´objectif d´une puissance installée de 69 GW fin 2024.

Les résultats des enchères en 2022 n´incitent pas non plus à l´optimisme pour l´avenir : neuf appels d´offres éoliens et solaires sur dix ont été sous-souscrits.

Éolien

Depuis 2019 sur 20 appels d´offres concernant l´éolien terrestre, 16 fois les volumes appelés n´ont pas été atteints. En 2022 un volume de 3,2 GW (70% du volume appelé de 4,5 GW) a été attribué, cf. figure 5. Trois sur quatre appels d´offres ont été sous-souscrits.

Partant du présupposé erroné que la production d´électricité renouvelable devient toujours moins chère en raison des développements technologiques et des effets d´échelle, la politique avait fait intégrer des plafonds pour la rémunération de référence qui ne devaient pas être dépassés.

La guerre en Ukraine, l´inflation, la hausse de prix pour les matières premières (i.e. le cuivre, le ciment) ont rendu la construction des éoliennes tellement plus coûteuse que le plafond de la rémunération de référence de 58 €/MWh, jusqu´à maintenant en vigueur, ne suffit plus. Les derniers appels d´offres montrent les résultats : l´intérêt des investisseurs s´est considérablement réduit.

Fig 5 Auschreibungen Wind Land 2019_2022
Figure 5 : volumes appelés/attribués lors des appels d´offres d´éolien terrestre 2019 à 2022 (Agora Energiewende 2023 ; BNetzA 2023b)

Avec un délai moyen de réalisation de 30 mois entre l´adjudication et la mise en service, les objectifs manqués dans le passé se font maintenant sentir sur leur développement (Allemagne Energies 2022d). Deutsche Windguard estime l´ajout à 2,7 – 3,2 GW en 2023 (Windguard 2023), bien au-dessous des 5,5 GW au moins nécessaires pour atteindre l´objectif de 2024 (69 GW).

Le développement de l´éolien en mer ne progresse pas non plus de manière optimale. La puissance installée atteint 8,1 GW en 2022. Seul le parc éolien « Kaskasi » en Mer du Nord a été connecté au réseau (342 MW nets).  Pour atteindre l´objectif de 2030 il faudrait installer 22 GW en mer en moins de huit ans.

Photovoltaïque

Aucun des six appel d´offres du photovoltaïque n´a permis d´atteindre le volume appelé en 2022, cf. figure 6. L´Agence Fédérale des Réseaux avait appelé un volume de 4,8 GWc (3,1 GWc au sol et 1,7 GWc sur toiture). Le volume attribué pour les installations au sol s´élève à 2,4 GWc et pour celles sur toiture à 0,5 GWc (30% du volume appelé). Pour atteindre l´objectif de la Loi EEG 2023 (88 GW en 2024) il faudrait ajouter au moins 11 GW en 2023.

Fig 6 Ausschreibungen solar 2019_2022
Figure 6 : volumes appelés/attribués lors des appels d´offres du photovoltaïque 2019 à 2022 (Agora Energiewende 2023 ; BNetzA 2023b)

Les objectifs manqués des enchères laissent présager un développement en deçà des besoins dans les années à venir. L´écart entre les objectifs ambitieux et le développement réel se creuse toujours plus. Les mesures décidées par le gouvernement en 2022 (Allemagne Energies (2022f) ne suffiront pas à atteindre l´objectif de 80% d´énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité d´ici 2030.

L´électricité verte devient plus chère

Dans le but de rendre plus attractive la participation aux enchères pour l´éolien terrestre et le photovoltaïque, le Parlement a donné mi-décembre 2022 le feu vert pour une augmentation de la rémunération de référence. A partir de 2023 elle sera augmentée de 25% pour chaque filière, soit 73,50 €/MWh pour l´éolien terrestre, 112,50 €/MWh pour le photovoltaïque sur toiture (BNetzA 2022b) et 73,70 €/MWh pour le photovoltaïque au sol (BNetzA 2023f).

C´est un revirement dans l´histoire de la transition énergétique : après plus de vingt ans de baisse constante du prix de l´électricité verte, elle augmente pour la première fois à partir de 2023. Après la suppression du soutien aux énergies renouvelables (EEG-Umlage) mi-2022, il n´est plus prélevé directement par le consommateur mais c´est l´État qui assure entièrement le financement.

L´avenir nous dira si suffisamment d´investisseurs s´intéresseront maintenant aux enchères.

Relation entre puissance installée et production réalisée

La figure 7 montre pour chaque filière la relation entre la puissance installée et la production réalisée en 2022 (BDEW 2022 ; AGEB 2023b; UBA 2023). Les énergies renouvelables intermittentes (éolien et photovoltaïque) représentent presque 57% de la puissance nette totale installée. Cependant, leur contribution à la production nette d´électricité – lissée sur l´année – s´élève à un tiers seulement. Cela correspond à un facteur de charge moyen [1] d´environ 16%, sans toutefois apporter une contribution durable à la sécurité d´approvisionnement car la production est très fluctuante au cours de l´année.

Fig 7 Capacite_production en pourcent 2022
Figure 7 : puissance nette installée et production nette en pourcentage en 2022 (hors installations de stockage d´énergie)

A titre de comparaison, le nucléaire allemand, représentant environ 1,7% de la puissance installée, a produit 6% nets de l´électricité. Cela correspond à un facteur de charge moyen de plus de 92%.

Faits marquants des énergies renouvelables intermittentes en 2022

Grace aux conditions météorologiques très favorables la production éolienne et photovoltaïque a augmenté en 2022 (voir tableau 1).  La forte production éolienne en janvier et février 2022 (voir figure 8) et le nombre élevé d´heures d´ensoleillement sur l´ensemble de l´année (voir figure 9) ont largement contribué à cette hausse (DWD 2022).

Fig 8 Jahresverlauf Wind_2022
Figure 8 : fluctuation mensuelle de la production éolienne en 2021 et variation en pourcentage par rapport à 2020 (BDEW 2022 ; UBA 2023a)

Avec 2025 heures d´ensoleillement en 2022 en moyenne sur l´ensemble du pays, l´Allemagne a connu une année record. C´est près de 30 % de plus que la moyenne historique 1961 – 1990 (1544 heures par an). Dans le sud-ouest du pays, l´ensoleillement a même dépassé les 2300 heures.

En revanche la production hydroélectrique a reculé de plus de 11% par rapport à 2021 en raison de la sécheresse exceptionnelle (UBA 2023a). L´été 2022, le déficit de pluie atteint près de 40% par rapport à la moyenne historique (DWD 2022).

Fig 9 Jahresverlauf Solar_hydro 2022
Figure 9 : fluctuation mensuelle de la production photovoltaïque et hydroélectrique en 2021 et variation en pourcentage par rapport à 2020 (BDEW 2022 ; UBA 2023a)

Outre de nombreux épisodes de faible production éolienne et photovoltaïque au cours de l´année, une forte variabilité inter-saisonnière et interannuelle des sources renouvelables intermittentes a été à nouveau mise en évidence en 2022.

Échanges transfrontaliers d´électricité

Pour un pays donné, le solde total des échanges physiques et contractuels devrait, dans l´idéal, être le même. Il convient toutefois de noter qu´en raison de la situation centrale de l´Allemagne en Europe, une certaine partie des flux physiques transfrontaliers sont des flux de transit et des flux en boucle.

Les échanges transfrontaliers dépendent non seulement de l´offre et de la demande, mais aussi des prix de l électricité dans les pays voisins. Les prix de gros sur le marché journalier (day-ahead) de chaque pays sont le résultat de cette interaction.

Le solde exportateur d´électricité de l´Allemagne augmente à 28 TWh (2021 : ~19 TWh) en hausse pour la première fois depuis 2017 (AGEB 2023b). Les importations marquent une légère baisse à 50 TWh tandis que les exportations augmentent de presque 11% à 78 TWh. Les principales raisons sont l´augmentation de la production d´électricité à partir des filières renouvelables et du charbon en Allemagne ainsi que les changements dans le mix de production d´électricité en Europe.

C´est vers l´Autriche que le solde exportateur a été le plus important, mais c´est surtout vers la Suisse et la France que les exportations ont augmenté, tandis que les importations ont augmenté en provenance du Danemark, de la Norvège et de la Suède.

Fig 10 export _ import 2022
Figure 10 : solde des échanges transfrontaliers d´électricité en TWh

Le solde exportateur des échanges commerciaux entre l´Allemagne et la France a plus que doublé en faveur de l´Allemagne en passant à 15,3 TWh en 2022 contre 6,5 TWh en 2021. Principalement en raison de la faible disponibilité des centrales nucléaires françaises en 2022 selon l´Agence Fédérale des Réseaux (BNetzA 2023a).

Modernisation des réseaux de transport

Le développement des réseaux de transport et de distribution est crucial pour la transition énergétique. Les gisements de vent, dans le nord du pays, étant géographiquement distants des grands centres de consommation dans l´ouest et sud industriel, l´épine dorsale est constituée par plusieurs tracés nord – sud en courant continu afin de limiter les congestions (Allemagne Energies 1).

Le plan actuel du réseau de transport prévoit 14.044 km terrestres (nouvelles lignes et renforcement des lignes existantes) à l´horizon de 2035, date à laquelle un approvisionnement en électricité quasi climatiquement neutre est visé par le gouvernement. Seuls 16,3% (2.292 km) étaient réalisés à la fin du troisième trimestre 2022, 1.178 km ont reçu l´autorisation de construction ou sont en construction (BNetzA 2023c).

La mise en service des tracés nord-sud en courant continu d´une capacité de 6 GW, initialement prévue en 2025/2026, a été reportée de deux ans à 2027/2028.

Le développement des réseaux de distribution est également d´une grande importance pour la mise en œuvre de la transition énergétique. La majorité des installations d´énergies renouvelables décentralisées y est raccordée. De plus, l´électrification des autres secteurs de l´économie conduit à la croissance rapide des nouveaux consommateurs connectés majoritairement au réseau de distribution. 

Coûts d´interventions pour éviter la congestion du réseau de transport

L´injection accrue d´électricité renouvelable intermittente dans le nord du pays a provoqué un net déséquilibre géographique entre la production éolienne dans le nord et les centres de consommation du sud et de l´ouest du pays. De forts flux nord – sud d´électricité apparaissent en cas d´injection importante d´électricité éolienne dans le nord de l´Allemagne et, parallèlement, d´une forte demande d´électricité et d´une très faible injection de photovoltaïque dans le sud du pays. Ces situations conduisent souvent à une congestion du réseau et entraînent une hausse des coûts des actions correctives depuis 2015 en raison de la lente modernisation du réseau électrique (Allemagne Energies 1).

Les coûts des actions d´équilibrage menées par les Gestionnaires du Réseau de Transport (GRT) étaient déjà en forte hausse en 2021, s´élevant à presque 2,3 Md€, cf. figure 11. En cause la sortie du nucléaire, l´injection accrue d´électricité renouvelable intermittente et l´augmentation des prix de gros au deuxième semestre 2021 (Allemagne Energies 2022e).

Fig 11 Netzengpassmassnahmen
Figure 11 : évolution des coûts de stabilisation du réseau

Les coûts de stabilisation du réseau ont augmenté au cours du premier semestre 2022 à environ 2,2 Mds€ et atteignent presque les coûts de l´année précédente (BNetzA 2023d). Cette forte augmentation des coûts est principalement due à la hausse significative des prix de gros (voir plus loin). Ces coûts sont supportés par le consommateur par le biais du tarif d´utilisation du réseau.

Les prix élevés du marché de gros ont entraîné une forte hausse des coûts du redispatching (réduction de la production d´électricité dans le nord et augmentation dans le sud de l´Allemagne dans le but de modifier les flux physiques afin de réduire les congestions du réseau de transport) et du countertrading (mesure commerciale consistant en la modification du plan de production de deux installations de façon symétrique – augmentation pour l´un et diminution pour l´autre – permettant également de modifier les flux physiques sur le réseau de transport).

Les coûts pour des centrales en réserve, réactivées ou en attente d´une réactivation pour fournir l´électricité de redispatching manquante, sont également en forte hausse au premier semestre 2022. En revanche, les coûts de compensation pour l´écrêtement de la production d´énergies renouvelables et de la cogénération sont en net recul. Cependant, au cours du premier semestre, environ 5,4 TWh de production renouvelable (notamment la production des éoliennes maritimes et terrestres) ont dû être écrêtés contre 3,4 TWh dans la même période de l´année précédente.

L´Agence Fédérale des Réseaux a publié début juillet 2023 les chiffres pour l´année 2022. Les coûts liés à l´équilibrage s´élèvent à 4,2 Mds€, soit presque deux fois plus qu´en 2021 (Allemagne Energies 2023b).

En attendant la mise en service des tracés nord – sud en courant continu, le manque de moyens pilotables dans le sud de l´Allemagne, nécessaire pour redispatching ou countertrading, risque d´accroitre encore les flux d´électricité entre le nord et le sud du pays dans l´avenir. De plus, la compensation de la puissance réactive manquante, nécessaire pour le maintien de la tension dans les réseaux de transport, doit être assurée.

Deux des trois centrales nucléaires encore au réseau jusqu`au 15 avril 2023 se situent en Allemagne du sud. A cela se rajoutera à terme la fermeture programmée des centrales à houille dans le centre et le sud.

Pour l´équilibrage du réseau en situation dégradée, l´Agence Fédérale des Réseaux a décidé la construction de turbines à combustion (4 sites dans le sud du pays d´une puissance totale de 1200 MW). Leur mise en service est prévue en 2023, cf. annexe 2 (Allemagne Energies 2). 

Émissions de gaz à effet de serre

Sevrée du gaz russe dont elle était fortement dépendante, l´Allemagne a recouru de façon accrue au charbon et au pétrole pour remplacer le gaz naturel ce qui a entrainé une hausse des émissions dans le secteur de l´énergie. Malgré cela les émissions totales de gaz à effet de serre baissent légèrement à 746 CO2éq (2021 : 760 Mt CO2éq) selon le pronostic de l´Agence Fédérale de l´Environnement (UBA 2023b). L´objectif national pour 2022, fixé par la Loi sur la Protection du Climat à 756 Mt CO2éq, a donc été atteint.

Le secteur de l´énergie enregistre une hausse des émissions de 4,4% et atteint 256 Mt CO2éq (2021 : 245 Mt CO2éq). Il atteint néanmoins sa cible sectorielle de 2022, fixée à 257 Mt CO2éq par la Loi sur la Protection du Climat.

Presque 90% des émissions du secteur de l’énergie proviennent du secteur électrique, soit 223 Mt CO2éq en 2022 (2021 : 215 Mt CO2éq) selon l´Agence Fédérale de l´Environnement (UBA 2023c). L´intensité carbone du mix électrique allemand en 2022 s´élevait à 434 g CO2éq /kWh (2021 : 410 g CO2éq /kWh ).

En cause le recours accru aux centrales à houille et au lignite qui a partiellement compensé le recul de la production nucléaire (arrêt de 4 GW fin 2021) et de la production à partir du gaz. En revanche la hausse des émissions a été atténuée par l´augmentation de la production renouvelable.

Pour les objectifs climatiques conformément à la loi sur la protection du climat, c´est le secteur de l´énergie et non pas le secteur électrique qui est déterminant. Outre les émissions de la production d´électricité, le secteur de l´énergie comprend les émissions du chauffage urbain, des raffineries et les émissions diffuses, par exemple des gazoducs.

Dans le secteur de l´industrie, les émissions ont baissé de plus de 10% par rapport à l´année précédente à 164 Mt CO2éq (2021 : 183 Mt CO2éq). Les prix élevés du gaz naturel dans plusieurs secteurs industriels ont été déterminants pour le bilan des émissions. Le secteur se situe en dessous de la limite fixée par la Loi sur la Protection du Climat (177 Mt CO2éq).

Dans le secteur de l´agriculture, les émissions de gaz à effet de serre ont légèrement diminué pour atteindre 62 Mt CO2éq (2021 : 63 Mt CO2éq). Le secteur reste ainsi bien en deçà de sa cible sectorielle de 2022, fixée à 67 Mt CO2éq par la Loi sur la Protection du Climat.

En revanche, les objectifs sectoriels fixés pour 2022 n´ont pas été atteints dans les secteurs du bâtiment et des transports.

Pour le secteur du bâtiment c´est la troisième fois consécutive. Bien que les émissions dans ce secteur aient reculé à 112 Mt CO2éq (2021 : 118 Mt CO2éq), l´objectif sectoriel de 108 Mt CO2éq  pour 2022 a été légèrement manqué. La baisse des émissions est essentiellement due à des effets météorologiques et à la réduction temporaire de la consommation du gaz naturel à cause de la flambée du prix et n´est vraisemblablement pas durable.

L´objectif fixé pour le secteur des transports de 139 Mt n´a pas été atteint en 2022. Le secteur a émis 148 Mt CO2éq (2021 : 147 Mt CO2éq). Encore influencée en 2020 et 2021 par des activités économiques réduites en raison de la Covid-19, l´augmentation des émissions en 2022 s´explique principalement par une normalisation du trafic routier et ferroviaire.

La figure 12 montre l´évolution entre 2010 et 2022 des émissions allemandes de gaz à effet de serre contenues dans le « panier de Kyoto » en millions de tonnes de CO2éq par an et les objectifs de 2030 selon la Loi sur la Protection du Climat. Source des valeurs : (UBA 2023b).

Fig 12 emission 2022
Figure 12 : évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2 éq par an (hors secteur des terres et forêts – UTCATF) et objectif 2030

La légère baisse des émissions en 2022 ne doit cependant pas faire oublier que ce sont les économies d´énergie consécutives à la crise énergétique et les conditions météorologiques très favorables qui ont contribué à la réalisation de l´objectif fixé par la Loi sur la Protection du Climat.

Pour atteindre l´objectif de 2030, il faudra désormais réduire les émissions de 41% dans les huit prochaines années. Entre 2010 et 2022 la réduction des émissions de gaz à effet de serre était d´environ 20% malgré des investissements importants dans les énergies renouvelables.

Suite à la réactivation des centrales à houille et lignite au moins jusqu´à fin mars 2024, conjuguée à l´arrêt des trois dernières centrales nucléaires mi-avril 2023 (production d´environ 5 TWh bas carbone en 2023), l´espérance d´une réduction des émissions de gaz à effet de serre en 2023 s´amenuise.

Evolution des prix sur le marché de gros de l´électricité

En 2022, le niveau des prix de gros de l´électricité en Allemagne a plus que doublé par rapport à 2021, alors que les prix avaient déjà triplé en 2021 par rapport à 2020 (BNetzA 2023a ; FFE 2023).

Dès septembre 2021, le prix sur le marché de gros de l´électricité avait augmenté. Cette tendance s´est poursuivie et s´est renforcée suite à la guerre en Ukraine.

La hausse du prix est liée à plusieurs facteurs : a flambée du coût des quotas de CO2 (le prix moyen a augmenté d´environ 50% en 2022 par rapport à 2021), mais aussi la forte montée du prix de gros du gaz naturel.

L´évolution du prix du gaz en 2022 a été largement tributaire de la politique russe de livraison de gaz vers l´Allemagne et l´Europe. Les réactions du marché n´ont pas toujours été rationnelles.

Ainsi, début mars, le prix de gros du gaz a connu un premier pic à 220 €/MWh. Par rapport au prix moyen d´un peu plus de 24 €/MWh entre 2019 et 2021, cela représente presque un décuplement du prix. Au cours des mois suivants, les livraisons de gaz russe ont été réduites à de nombreuses reprises, pour finalement être totalement interrompues début septembre 2022. Le prix de gros du gaz atteint son plus haut niveau fin août avec 316 €/MWh (BNetzA 2023e), ce qui a également entraîné le prix de l´électricité le plus élevé de l´année, cf. figure 13 et tableau 3.

En conséquence, l´avantage en termes de coûts des centrales à gaz, résultant de leur besoin moindre en certificats de CO2, a été masqué par l´envolée des prix du gaz et a augmenté leurs coûts marginaux de production selon le bureau d´études FfE (Forschungsgesellschaft für Energiewirtschaft mbH). La hausse du prix du gaz s´est donc répercutée sur celui de l´électricité (figure 13) car, selon la logique du « merit order », le prix de gros de l´électricité est déterminé par les coûts marginaux de la dernière centrale appelée pour assurer l´équilibre entre l´offre et la demande (FFE 2023).

En revanche, les coûts marginaux des centrales à gaz ne fixent pas à tout moment le prix journalier de gros de l´électricité. D´autres filières de production peuvent aussi influencer la logique du « merit order. »  En particulier, l´influence des énergies renouvelables intermittentes (éolienne et photovoltaïque) n´est pas négligeable avec des prix très faibles, voire négatifs, sur le marché. Par exemple, fin décembre 2022, lors d´une forte production éolienne et d´une faible demande d´électricité, le prix journalier de l´électricité sur le marché de gros a été nettement inférieur aux coûts marginaux des centrales à gaz, cf. figure 13.

Fig 13 GasPreis 2022
Figure 13 : évolution des coûts marginaux des centrales à gaz (rendement de 40 à 60%) et des centrales à houille (rendement de 35 à 45%) résultant des prix des combustibles et du prix du CO2, par rapport au prix journalier sur le marché de gros de l´électricité en 2022

Le prix de gros moyen a dépassé les 300 €/MWh en juillet et en septembre et a même atteint 465,18 euros/MWh en août (BNetzA 2023a). A partir d´octobre 2022, le prix de gros moyen a de nouveau baissé en raison d´une consommation d´électricité en baisse. De plus, les énergies renouvelables ont contribué pour une part plus importante à la production totale et, au dernier trimestre 2022, plusieurs centrales au charbon ont été réactivées sur le marché, augmentant ainsi l´offre sur le marché de gros.

La figure 14 montre les moyennes annuelles de 2019 à 2022 des prix journaliers (dit « day-ahead ») sur le marché de gros pour la zone Allemagne/Luxembourg (BNetzA 2023a).

Fig 14 Prix spot 2019_2022
Figure 14 : moyennes annuelles de 2019 à 2022 des prix journaliers sur le marché de gros de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

Le tableau 3 montre, pour la période de 2019 à 2022, les prix de gros extrêmes pour la zone Allemagne/Luxembourg selon (BNetzA 2023a).

En 2022, le prix de gros le plus élevé de l´année a été enregistré le lundi 29 août entre 19h et 20h avec 871,00 €/MWh. Dans cette plage horaire, la forte consommation d´électricité a coïncidé avec une faible production des énergies renouvelables intermittente, rendant nécessaires une production conventionnelle accrue et une importation nette de l´ordre de 5 GW.

Le prix de gros le plus bas a été enregistré avec – 19,04 €/MWh le dimanche 20 mars 2022 entre 13h et 14h. Dans cette plage horaire, la production renouvelable a couvert presque entièrement la consommation. De plus, l´Allemagne a exporté 15 GW nets.

Tabelle 3 prix spot 2022
Tableau 3 : Moyennes annuelles des prix de gros de l´électricité pour la zone Allemagne/Luxembourg

Bien que le volume négocié sur les bourses ne représente qu´une fraction du volume total des échanges commerciaux, les marchés journalier (day-ahead) de l´EPEX SPOT pour une livraison d´électricité le jour suivant sont considérés comme un indicateur des prix. Une fourchette de prix de -500 €/MWh à 4 000 €/MWh est définie pour le négoce « day-ahead » (EPEX SPOT 2022). 

Episodes de prix négatifs au marché journalier

Depuis plusieurs années le marché de gros en Allemagne est confronté à des épisodes de prix négatifs. Dans ces situations, les vendeurs payent les acheteurs, ce qui constitue une situation de marché singulière. Ces situations apparaissent en particulier en cas de forte production d´électricité d´origine renouvelable mais de faible demande, situations au cours desquelles certains moyens de production conventionnelle ne peuvent pas fonctionner en deçà d´un minimum technique.

En 2019 et 2020, l´augmentation des épisodes à prix négatifs a été un sujet majeur. En 2020 le nombre de pas horaires à prix négatifs a battu un record avec 298.

Depuis 2021, le nombre de pas horaires à prix négatifs a diminué en raison d´une flexibilité croissante du système électrique allemand et de la forte augmentation des prix de gros de l´électricité.

En 2022, il n´y eu que 69 heures de prix négatifs, cf. figure 15. Durant ces heures, le prix négatif moyen de -2 €/MWh était nettement plus faible que les années précédentes, où il se situait autour de -15 €/MWh (FFE 2023).

Fig 15 Nombre heures prix negatif 2019_2022
Figure 15 : pas horaires à prix négatifs par trimestre sur le marché journalier entre 2019 et 2022 (BNetzA 2023a)

Alors que les exploitants d´une centrale conventionnelle doivent prendre à leur charge les frais des prix négatifs, la situation des producteurs d´énergies renouvelables dépend de la taille et de la date de mise en service des installations.

La réglementation en vigueur depuis 2017 prévoit la suspension de la rémunération si le prix de gros affiche une valeur négative pendant au moins six heures sans interruption pour les éoliennes > 3 MW et les autres installations d´énergies renouvelables > 500 kW mises en service à partir de 2016. Dans ce cas les exploitants ne recevront plus le complément de rémunération rétroactivement à partir de la première heure de prix négatif.

Dans le cadre de l´avenant à la Loi sur les Énergies Renouvelables, entré en vigueur début 2021 (EEG 2021), la suspension de la rémunération des nouvelles installations d´énergies renouvelables > 500 kW (exception faite des éoliennes pilotes) intervient si le prix de gros affiche une valeur négative pendant au moins quatre heures sans interruption. Il s´agit d´un durcissement de la réglementation de 2017 qui reste toutefois en vigueur pour les installations mises en service avant 2021.

Selon le bureau d´études FfE la valeur du marché des prix négatifs est estimée à environ 580 M€ pour la période de 2017 à 2021 (FFE 2022), soit environ 116 M€ par an en moyenne. Ce montant est dérisoire par rapport au montant annuel global d´électricité négocié à la bourse.   

Projets phares du tournant énergétique en 2022 

Les projets phares du tournant énergétique allemand en 2022 étaient :

Adoption d´un ensemble de mesures de presque 300 milliards d´Euros pour atténuer l´impact de la crise énergétique

La forte hausse des prix de l´énergie a conduit à une situation de crise et fut un facteur déterminant de l´inflation, qui a dépassé temporairement les 10% en Allemagne. Le gouvernement a donc été contraint d´adopter un ensemble de mesures urgentes, temporaires et exceptionnelles de nature économique afin de faire face à ses effets insupportables pour les consommateurs et les entreprises (Allemagne Energies 2022g).

Les mesures de l´État allemand représentent presque 300 Mds€. L´objectif : soutenir les citoyens pendant cette période difficile, conséquence de la guerre en Ukraine, et préserver les emplois. Elles les inciteront simultanément à réduire leur consommation.

Pour atténuer la flambée des prix de l´énergie et l´impact de l´inflation, le gouvernement a adopté depuis le printemps 2022 trois trains de mesures, qui représentent des allègements à hauteur totale de 95 Mds€.

De plus, pour limiter l´impact de l´envolée des coûts énergétique pour les ménages et les entreprises, le Parlement (Bundestag) et le Conseil Fédéral (Bundesrat) ont autorisé en octobre 2022 des nouveaux crédits pour un bouclier de défense économique doté de 200 Mds€.

La principale mesure est le plafonnement temporaire des prix du gaz, de la chaleur et de l´électricité. Elle est partiellement financée par le prélèvement sur les bénéfices exceptionnels des producteurs d´électricité et des entreprises des secteurs du pétrole brut, du gaz naturel, du charbon et du raffinage conformément au règlement de l´Union Européenne 2022/1854 du 6 octobre 2022.

Les modalités du bouclier tarifaire pour le gaz, la chaleur et l´électricité sont réglées dans deux lois séparées qui ont reçu le feu vert du Parlement (Bundestag) le 15 décembre 2022 et du Conseil Fédéral (Bundesrat) le 16 décembre 2022.

Adoption d´un paquet législatif visant à accélérer le développement des énergies renouvelables et à renforcer la sécurité d´approvisionnement en énergie

Adoption en juillet 2022 d´un paquet législatif de presque 600 pages visant à accélérer le développement des énergies renouvelables et à renforcer la sécurité d´approvisionnement en énergie. La mesure phare de ce paquet est l´amendement à la Loi sur les Énergies Renouvelables (EEG 2023) du secteur électrique (Allemagne Energie 2022f ; Allemagne Energies 3).

Les objectifs à l´horizon de 2030 ont été fortement rehaussés par rapport au gouvernement sortant, soit 360 GW au total (éolien terrestre : 115 GW, éolien en mer : 30 GW, photovoltaïque : 215 GW).

Mesures en faveur de la sécurité de l´approvisionnement d´électricité

Suite à la menace de pénurie d´énergie, née de la guerre en Ukraine, des mesures en faveur de la sécurité de l´approvisionnement d´électricité ont été prises : prolongation du fonctionnement des 3 dernières centrales nucléaires jusqu´à mi-avril 2023 (Allemagne Energies 2022c) et réactivation temporaire des centrales à houille, lignite et fioul en réserve jusqu´à fin mars 2024, tout en maintenant l´objectif de l´abandon du charbon en 2030 (Allemagne Energies 2022a).

Développement de la politique énergétique et perspectives 2023

En 2022 la gestion de la crise à court terme a déterminé l´agenda politique en faveur de la sécurité énergétique, en partie au détriment des objectifs climatiques.

Les efforts coûteux pour réduire durablement les émissions de CO₂ piétinent actuellement. Les émissions dues à la production d´électricité à partir du charbon sont à la hausse depuis l´arrêt de livraison du gaz russe bon marché.

Le déni de réalité dans la stratégie allemande de transition énergétique a atteint des proportions inquiétantes. En réaction à l´accident de Fukushima, déclenché à la suite d´un séisme et d´un tsunami, le gouvernement allemand avait accéléré la sortie du nucléaire. Et comme le gouvernement, même après l´occupation de la péninsule de Crimée en 2014, a considéré la Russie comme un partenaire fiable, l´Allemagne est devenu fortement dépendante de son gaz.

En vue de la sortie du nucléaire et du charbon, le gouvernement avait initialement prévu, pour suppléer aux aléas des énergies renouvelables intermittentes, la construction de nouvelles centrales à gaz d´ici 2030. Celles-ci seraient exploitées à terme de manière neutre en carbone grâce à l´hydrogène pour atteindre les objectifs climatiques ambitieux. Mais en absence du gaz russe bon marché, la construction de ces centrales n´est pas rentable actuellement (Allemagne Energies 2023a). Jusqu´à maintenant aucune décision n´est prise ni sur leur capacité nécessaire ni sur leur financement.

Après la sortie définitive du nucléaire en avril 2023, il manquera environ 30 TWh supplémentaires de production bas-carbone dans le réseau électrique. Le développement de l´éolien et du photovoltaïque se poursuit trop lentement et n´a pas été en mesure depuis 3 ans de suppléer la perte de production du nucléaire sans parler des jours où le vent et le soleil sont faibles.

La devise du gouvernement semble être la suivante : « Il est plus important de bien choisir ses objectifs que de les atteindre ». Les 360 GW maintenant visés en 2030 pour l´éolien et le photovoltaïque nécessitent un triplement de la puissance installée dans les huit prochaines années, soit un ajout annuel d´au moins 26 GW contre 6 GW/an en moyenne entre 2000 et 2022.

De plus, l´objectif pour 2035 de presque 100% d´énergies renouvelables pour la production d´électricité implique, en une décennie, des paris technologiques lourds comme une bascule vers l´hydrogène et la mise à disposition de moyens suffisants de stockage d´énergie.

Avec la sortie du nucléaire, le gouvernement fait le deuxième pas avant le premier en arrêtant des centrales fiables et bas carbone. Les déclarations publiques des ministres responsables sur la garantie d´un approvisionnement énergétique sûr et abordable misent sur le principe de l´espoir. Les risques et problèmes, comme par exemple la faible résilience du système électrique à des aléas climatiques, ne sont pas pris en compte. Au pied du mur, les prochaines années détermineront si le gouvernement allemand parviendra à entamer la transition vers la neutralité climatique en 2045. Face à la crise climatique qui s´aggrave, déjà les décisions à prendre en 2023 seront d´une grande importance.


1) Le facteur de charge est le rapport entre l’énergie électrique effectivement produite par une unité de production sur une période donnée et l’énergie qu’elle aurait produite si elle avait fonctionné à sa puissance maximale durant la même période 

Références 

AGEB (2023a) AG Energiebilanzen legt Bericht für 2022 vor Kräftiger Rückgang beim Energieverbrauch/Einsparziel bei Erdgas erreicht. Communiqué de Presse du 17.04.2023. AG Energiebilanzen e.V. En ligne : https://ag-energiebilanzen.de/ag-energiebilanzen-legt-bericht-fuer-2022-vor/.

AGEB (2023b) Stromerzeugung nach Energieträgern (Strommix) von 1990 bis 2022 (in TWh) Deutschland insgesamt (Datenstand Februar 2023). AG Energiebilanzen e.V. En ligne : https://ag-energiebilanzen.de/.

Agora Energiewende (2023) Die Energiewende in Deutschland: Stand der Dinge 2022. Agora Energiewende. En ligne : https://www.agora-energiewende.de/projekte/die-energiewende-in-deutschland-stand-der-dinge-2022/.

Allemagne Energies (1) Le tournant énergétique allemand. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/tournant-energetique/.

 Allemagne Energies (2) Historique de la sortie du nucléaire en Allemagne. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/sortie-du-nucleaire/.

Allemagne Energies (3) Énergies renouvelables : de nombreux défis. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/energies-renouvelables/.

Allemagne Energies (2021) Le nouveau gouvernement allemand veut accélérer la transition énergétique. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2021/12/08/le-nouveau-gouvernement-allemand-veut-accelerer-la-transition-energetique/.

Allemagne Energies (2022a) Retour au charbon dans la production électrique pour baisser la consommation de gaz. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/06/11/retour-au-charbon-dans-la-production-electrique-pour-baisser-la-consommation-de-gaz/.

Allemagne Energies (2022b) Allemagne : arrêt définitif de trois centrales nucléaires le 31 décembre 2021. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/01/02/allemagne-arret-definitif-de-trois-centrales-nucleaires-le-31-decembre-2021/.

Allemagne Energies (2022c) Prolongation des trois dernières centrales nucléaires allemandes sur décision du Chancelier – Modification de la Loi Atomique adoptée par le conseil des ministres. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/10/20/prolongation-des-trois-dernieres-centrales-nucleaires-allemandes-sur-decision-du-chancelier-modification-de-la-loi-atomique-adoptee-par-le-conseil-des-ministres/.

Allemagne Energies (2022d) Le développement de l´éolien terrestre ne décolle pas. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/11/03/le-developpement-de-leolien-terrestre-ne-decolle-pas/.

Allemagne Energies (2022e) Forte hausse en 2021 des coûts d´intervention pour éviter la congestion du réseau de transport. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/05/15/les-couts-dinterventions-pour-eviter-la-congestion-du-reseau-de-transport-ont-depasse-les-23-mde-en-2021/.

Allemagne Energies (2022f) L´Allemagne vise un approvisionnement en électricité presque 100% renouvelable d´ici 2035. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/03/07/lallemagne-vise-un-approvisionnement-en-electricite-presque-100-renouvelable-dici-2035/.

Allemagne Energies (2022g) Allemagne : presque 300 milliards d´Euros pour atténuer l´impact de la crise énergétique. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2022/12/19/allemagne-presque-300-milliards-deuros-pour-attenuer-limpact-de-la-crise-energetique/.

Allemagne Energies (2023a) La sortie du charbon nécessite la construction préalable de nouvelles centrales à gaz. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2023/01/05/la-sortie-du-charbon-necessite-la-construction-prealable-de-nouvelles-centrales-a-gaz/.

Allemagne Energies (2023b) Les coûts d’équilibrage du réseau de transport ont dépassé les 4 milliards d’Euro en 2022. Allemagne Energies. En ligne : https://allemagne-energies.com/2023/07/13/les-couts-dequilibrage-du-reseau-de-transport-ont-depasse-les-4-milliards-deuro-en-2022/.

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Windguard (2023) Windenergie-Statistik: Jahr 2022. Deutsche Windguard. En ligne : https://www.windguard.de/jahr-2022.html.

Allemagne : les chiffres clés de l´énergie en 2021

L´édition 2022 est disponible ici

Texte mis à jour le 22.06.2022

Temps de lecture : 4 min (résumé), 30 min (article entier)

La transition énergétique allemande a du plomb dans l´aile mais nonobstant les ambitions politiques augmentent : critiqué par la Cour Constitutionnelle, le gouvernement relève l´objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre à 65% d´ici 2030 par rapport à 1990 et avance la neutralité carbone à 2045.  Or jusqu´à maintenant, au-delà des déclarations de principe, les stratégies efficaces ont souvent fait défaut.

Les émissions allemandes sont en hausse par rapport à 2020 et la part des énergies renouvelables dans le mix électrique baisse pour la première fois de manière significative. La production d´électricité à partir des centrales à charbon atteint à nouveau un niveau record mais le gouvernement maintient son calendrier de sortie du nucléaire.

A l´occasion de la présentation d´un premier bilan le 11 janvier 2022 /22/, Robert Habeck, codirigeant du parti des Verts, Vice-Chancelier et Ministre Fédéral de l´Économie et de la Protection du Climat, constate un retard considérable quant à l´atteinte des objectifs climatiques dans tous les secteurs. Les objectifs climatiques pour 2022 et 2023 sont déjà considérés inatteignables et les mesures actuellement engagées sont largement insuffisantes. Tout sera mis en œuvre pour atteindre les objectifs de 2030 définis dans le contrat de coalition du nouveau gouvernement /20/. C´est pour cela il faut tripler le rythme de réduction des émissions et faire nettement plus en moins de temps. Il est prévu de faire voter des mesures d´urgence courant 2022, afin qu´elles entrent en vigueur début 2023.

Selon les données statistiques, les résultats énergétiques 2021 se résument comme suit :

  • Après une année 2020 atypique du fait de la crise sanitaire, la reprise économique s´est traduite par un rebond de la consommation d´énergie primaire d´environ 3% par rapport à 2020 mais reste inférieure au niveau de 2019. Les énergies fossiles (pétrole, gaz naturel, houille et lignite) représentent plus des trois quarts de la consommation énergétique ;
  • La consommation d´électricité augmente de 3,3% et se rapproche de son niveau d´avant-crise sanitaire. Cette hausse est imputable à la reprise économique et à des températures globalement plus fraîches que l´année précédente ;
  • La production électrique des centrales conventionnelles progresse de presque 10%. Les centrales à charbon (lignite/houille) ont dépassé l´éolien (terrestre et maritime) et sont à nouveau la première source de production électrique ;
  • La production d´électricité renouvelable accuse une baisse de 5,3% par rapport à 2020 notamment en raison d´une forte baisse de la production éolienne. En conséquence, la part des énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité marque un recul à 42,1 % (2020 : 45,9%) ;
  • La lenteur du développement des énergies renouvelables, notamment de l´éolien, met en péril l´objectif du nouveau gouvernement de 80% d´énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité d´ici 2030 ;
  • Le solde exportateur s´élève à environ 19 TWh, soit au même niveau qu´en 2020 ;
  • Les émissions de gaz à effet de serre augmentent d´environ 4,5% (~ 33 MtCO2éq) par rapport à 2020 pour atteindre 762 MtCO2éq. Les émissions ont chuté de 38,7% depuis 1990, mais l´Allemagne s´est éloignée de l´objectif de réduction de 65% d´ici 2030.

Les projets phares du tournant énergétique allemand en 2021 : 

  • Taxe carbone sur les émissions des produits combustibles non couverts par le Système Européen d´Échange de Quotas d´Émissions ;
  • Avenant à la Loi sur les Énergies Renouvelables (EEG 2021) visant une part des énergies renouvelables de 65% à la consommation brute d´électricité d´ici 2030 ;
  • Avenant à la Loi sur la Protection du Climat pour un durcissement de l´objectif climatique (neutralité carbone en 2045) ;
  • Contrat de coalition du nouveau gouvernement visant entre autres une part des énergies renouvelables de 80% à la consommation brute d´électricité et 50% de la chaleur produite de manière climatiquement neutre d´ici 2030 ;
  • Arrêt de 3 centrales nucléaires et 6 centrales à charbon fin 2021Photo BNetzA

Consommation énergétique

Selon AG Energiebilanzen /1/, la consommation d´énergie primaire atteint 3407 TWh (293 Mtep) en 2021, cela correspond à une augmentation de 3,1 % (~ 103 TWh) par rapport à l´année précédente (2020 : 3304 TWh ou 284 Mtep). L´augmentation de la consommation énergétique a été entièrement assurée par des énergies conventionnelles. La contribution des énergies renouvelables a légèrement baissé par rapport à 2020.

La hausse de la consommation énergétique s´explique par la reprise économique et des températures plus fraiches par rapport à 2020. Corrigée de l´aléa météorologique la consommation énergétique augmente seulement de 0,6% selon /1/.

Toutefois, la consommation énergétique est encore inférieure au niveau d´avant la crise sanitaire. Le développement énergétique et économique en Allemagne continue d´être influencé par les effets de la pandémie.

Les énergies fossiles continuent de représenter plus des trois quarts de la consommation énergétique. Le pétrole reste l´énergie fossile la plus importante en 2021 suivi par le gaz naturel.

Néanmoins, la consommation des produits pétroliers a connu une réduction de 3,1% par rapport à 2020. Le recul de la part du pétrole dans la consommation d´énergie primaire à 32,3% (2020 : 34,4 %) s´explique en partie par la crise sanitaire et en partie par des effets de réduction de stocks compte tenu de la hausse du prix du combustible.

La consommation de gaz naturel a augmenté d´environ 5% par rapport à 2020. La part du gaz naturel dans la consommation d´énergie primaire augmente donc légèrement à 26,8% (2020 : 26,4%). Cause principale : les températures globalement plus fraiches au premier semestre et en conséquent une augmentation de la consommation de gaz pour la production de l´électricité et pour le chauffage. La forte hausse du prix du gaz au second semestre a entraîné un basculement vers d´autres sources d´énergie, comme la houille sur le marché de l´électricité. Malgré tout, le gaz naturel reste, après le fioul, la principale source d´énergie pour le chauffage en Allemagne.

Le charbon (couple lignite/houille) atteint une part totale de presque 18% de la consommation d´énergie primaire.

La consommation de lignite a augmenté de 17,7 % par rapport à 2020, mais reste environ 3% inférieure à 2019 et suit donc la tendance baissière à long terme. Le lignite atteint une part de 9,2% (2020 : 8,1%) de la consommation d´énergie primaire.

La consommation de la houille a augmenté de 16,5 % en 2021. L´utilisation de la houille dans les centrales électriques, ce qui représente environ la moitié de sa consommation totale, a augmenté de presque un quart. La demande de houille de l´industrie sidérurgique a augmenté de 12%. Comme pour le lignite, cette évolution a été favorisée par la hausse des prix des autres sources d´énergie ainsi que par la baisse de la production renouvelable. La houille atteint une part de 8,5% (2020 : 7,5%) de la consommation d´énergie primaire.

Soutenue par une consommation d´électricité plus élevée et une baisse de la production renouvelable, la production du nucléaire a augmenté de 7,4% et atteint une part de 6,1% (2020 : 5,9%) de la consommation d´énergie primaire.

Fig 1 Energie primaire 2021
Figure 1 : consommation d´énergie primaire selon /1/

La part des énergies renouvelables à la consommation d´énergie primaire a légèrement diminué à 15,9% (2020 : 16,5%). Cause principale une météo défavorable pour l´éolien et une consommation énergétique plus élevée en 2021 par rapport à 2020.

Consommation et production d´électricité

La consommation d´électricité représente environ un quart de la consommation brute d´énergie finale en Allemagne. Le secteur électrique a été influencé en 2021 par des facteurs assez divers :

  • Restrictions de la vie économique et publique dues à la crise sanitaire de la Covid -19 au début de l´année ;
  • Températures globalement plus froides au premier semestre ;
  • Forte baisse de la production éolienne du fait de conditions météorologiques défavorables ;
  • Reprise de l´activité économique aux 2e et 3e trimestres ;
  • Hausse significative du prix de gros sur le marché de l´électricité et de la tonne de CO2 sur le marché européen au cours du second semestre 2021.

La consommation intérieure brute d´électricité a été marquée à la fois par des températures relativement fraiches au premier semestre et par des effets de rattrapage conjoncturel. En 2021, elle a augmenté de 3,3% pour atteindre environ 565 TWh (2020 : 547 TWh), soit presque le niveau de 2019 (567 TWh). Le plus grand consommateur d´électricité a été l´industrie, avec une part d´environ 45 %, les ménages ont consommé environ un quart.

Sous l´hypothèse que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables serait entièrement consommée en Allemagne, leur part dans la consommation intérieur brute baisse à 42,1 % contre 45,9% en 2020 selon BDEW/4/. Conformément aux prescriptions du gouvernement fédéral, il s´agit du taux déterminant pour la réalisation des objectifs en matière d´énergies renouvelables.

La production brute d´électricité a augmenté de 3,2 % à 586 TWh (2020 : 568 TWh). Le mix de production électrique enregistre en 2021 une hausse des sources conventionnelles de plus de 10%. Leur part dans la production brute est passée à presque 60% en 2021, soit environ 4% de plus par rapport à 2020. Presque 20% de la production nette de l´Allemagne (557 TWh) ont été fournis par des centrales à cogénération (production injectée dans le réseau public, autoconsommation de l´industrie et installations privées), soit environ 108 TWh /3/.

Depuis 1997, la production d´électricité renouvelable n´a cessé d´augmenter /4/. Les années avec des conditions métrologiques défavorables ont été compensées par l´augmentation de leur capacité installée. En revanche, en 2021 la production des énergies renouvelables accuse un recul de 5,3% par rapport à 2020 /3/, /4/. Leur part dans la production brute d´électricité baisse à 40,6% (2020 : 44,2%). En cause notamment la forte baisse de la production éolienne en raison des conditions météorologiques défavorables. En outre, l´ajout de nouvelles capacités a été faible en 2019 et 2020.

Fig 2 Production electricite 2020-2021
Figure 2 : Production brute d´électricité en 2021 /4/ (données entre parenthèses pour 2020)

Le tableau 1 ci-dessous détaille la production brute pour chaque filière en 2021 par rapport à 2020 pour l´ensemble du secteur de l´électricité, y compris la production destinée à l´autoconsommation de l´industrie, individuelle et collective.

En dépassant l´éolien (terrestre et maritime), le charbon (couple lignite/houille) redevient la première source de production électrique en 2021, en hausse de presque 23% par rapport à 2020 malgré l´augmentation du coût des certificats de CO2 sur le marché européen. Le nucléaire a produit environ 7% de plus qu´en 2020. En revanche, la production des centrales à gaz a reculé de plus de 5%. Par l´effet du « merit order » elles se sont positionnées derrière le charbon suite à la forte augmentation du prix du gaz.

Malgré une forte baisse, l´ éolien (terrestre et maritime) a produit presque la moitié de l´électricité renouvelable sur l´ensemble de l´année. Le photovoltaïque a contribué pour environ un cinquième à la production renouvelable totale. Cette quantité d´électricité comprend non seulement les injections dans le réseau public mais aussi l´autoconsommation.

La production des déchets biogènes est en légère baisse par rapport à l´année précédente tandis que celle de la biomasse stagne.

La production de l´hydroélectricité, qui a une importance limitée outre-Rhin, augmente légèrement en 2021 par rapport à 2020.

T 1 Tableau Production_Consommation
Tableau 1 : production et consommation d´électricité 2020 et 2021 selon /4/ (les chiffres de 2021 sont provisoires)

Au cours de la dernière décennie, la production renouvelable a doublé, tandis que la production du couple houille/lignite a reculé de presque 40%. Malgré cela l´année 2021 marque pour la première fois une inversion des tendances : les énergies renouvelables reculent et le charbon (couple houille/lignite) est en hausse (cf. figure 3).

Fig 3 Evolution diferentes filieres
Figure 3 : évolution de la production brute des différentes filières depuis 2010 /4/

L´augmentation de la production renouvelable au cours de la dernière décennie ne cache toutefois pas le fait que la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaire) est en baisse depuis 2020.

Les énergies renouvelables n´ont pas été en mesure de suppléer la perte de production résultant de l´arrêt de la centrale nucléaire de Philippsburg 2 fin 2019. Le bilan devrait encore s´aggraver après l´arrêt des centrales nucléaires de Gundremmingen unité C, Grohnde et Brokdorf fin 2021 /5/. Déjà dans le passé l´arrêt de centrales nucléaires a eu un impact négatif sur l´évolution de la production bas-carbone (figure 4).

Fig 4 co2 frei
Figure 4 : évolution de la production nette totale bas-carbone (énergies renouvelables et nucléaires) selon /1/

Après l´arrêt des trois dernières centrales nucléaires fin 2022 et sans qu´une seule tonne de CO2 supplémentaire soit économisée, une augmentation de 25% de la production renouvelable serait nécessaire pour pallier les 65 TWh nets produits par les six centrales nucléaires en 2021.

Puissance installée

Actuellement l´Allemagne exploite deux parcs de production en parallèle pour une pointe de consommation autour de 82 GW.

Le pays disposait fin 2021 d´un parc de production d´environ 225 GW nets hors systèmes de stockage (STEP, batteries etc.) dont ~ 87 GW de moyens pilotables conventionnels et ~138 GW d´installations renouvelables.

Compte tenu des centrales arrêtées fin 2021 et des centrales en réserve stratégique, environ 73 GW de centrales conventionnelles (y compris les centrales diverses mais hors systèmes de stockage) sont activement sur le marché électrique au début 2022.

Le tableau 2 ci-dessous détaille l´évolution de la puissance totale nette installée du secteur électrique en 2021 et 2020, y compris les centrales de l´industrie servant principalement à l´autoconsommation.

T2 Puissance installee 2021
Tableau 2 : Puissance installée en 2020 et 2021 hors du stockage de l´énergie (stations de transfert d’énergie par pompage (STEP), batteries, etc.) Les chiffres de 2021 sont provisoires

Centrales conventionnelles

Centrales nucléaires

Début 2022 la puissance installée a baissé à 4,055 GW par suite de l´arrêt de trois centrales nucléaires (4,058 GW) le 31.12.2021 /5/.

Centrales à houille

Début 2022 une puissance d´environ 14 GW est activement disponible sur le marché de l´électricité.

Suite aux résultats des deux premiers appels d´offres sur la fermeture anticipée des centrales à houille et centrales à lignite inférieures à 150 MW, environ 5,6 GW ont été fermés ou retirés du marché en 2021 /7/. De plus environ 4,3 GW sont en réserve stratégique en marge du marché de l´électricité. Ces centrales pourraient être activées en cas de besoin.

Centrales à lignite

Début 2022 environ 17 GW sont activement disponibles sur le marché de l´électricité /7/.

Environ 1,8 GW ont été fermés ou retirés du marché en 2021 et environ 1,9 GW sont en marge du marché assurant une réserve ultime pour des situations extrêmes. Ces centrales doivent être opérationnelles dans un délai de 10 jours

Centrales à gaz

Début 2022 environ 27,4 GW sont activement sur le marché de l´électricité /7/. Environ 2,2 GW ont été fermés ou retirés du marché et environ 2,6 GW sont en réserve stratégique ou font partie du mécanisme de capacité.

Centrales au fioul

Début 2022 environ 2,9 GW sont activement sur le marché de l´électricité/7/. Environ 1,6 GW sont actuellement en réserve stratégique et 0,4 GW fermés ou retirés du marché.

Stockage d´énergie

L´Allemagne dispose début 2022 d´une capacité de stockage totale d´environ 10,4 GW/7/.

Les STEP (Stations de Transfert d´Énergie par Pompage) ont une capacité nette totale de 9,8 GW y compris les installations au Luxembourg et en Autriche qui injectent de l´électricité directement dans le réseau allemand et la capacité des batteries est estimée à environ 0,6 GW/7/.

Outre la capacité de stockage (GW), la quantité d´électricité stockée (GWh) est un paramètre important, car la capacité de puissance seule ne fournit pas d´informations sur la durée pendant laquelle cette capacité peut être mobilisée. Il convient de faire la distinction entre la quantité de stockage théorique et la quantité réelle. En effet, de nombreux systèmes de stockage par batterie ne sont pas entièrement déchargeables en mode de fonctionnement normal. Ces données ne sont malheureusement pas suffisamment connues.

La durée de fonctionnement à pleine charge des stations de pompage-turbinage est également limitée dans le temps en fonction du niveau de remplissage lorsqu´elles sont appelées. La quantité d´énergie stockée maximale actuellement disponible des STEP connectées au réseau allemand correspond à environ 40 GWh par cycle de charge.

Il n´est donc guère possible d´en tirer une conclusion étayée sur la disponibilité des capacités de stockage en cas de besoin /2/.

Energies renouvelables

La capacité installée des énergies renouvelables a augmenté de près de 7 GW, soit un peu plus de 5% par rapport à 2020, pour passer à 137,7 GW (cf. tableau 2). Toutefois, la capacité ajoutée en 2019 et 2020 a été faible et le développement doit être fortement redynamisé pour atteindre les objectifs climatiques à l´horizon de 2030 /28/.

Photovoltaïque

Environ 5 GWc (~ 9%) ont été ajoutés, portant la capacité nette totale installée à 58,7 GWc fin 2021. C´est la première fois depuis 2012 que la capacité photovoltaïque ajoutée atteint les 5 GW. Seule la période 2010 – 2012 a connu un ajout annuel plus élevé.

Éolien terrestre

La capacité installée des éoliennes terrestres a augmenté de près de 1,7 GW en 2021, soit environ 3% pour atteindre un total d´environ 56,1 GW. La tendance de développement est certes positive par rapport à 2020 qui a été très faible avec un ajout de seulement 1,2 GW. Mais la construction annuelle de nouvelles éoliennes reste toujours nettement inférieure à celle des années 2014 – 2017.

Éolien en mer

Aucune nouvelle éolienne n´a été ajoutée en 2021. La puissance totale s´élève à 7,8 GW fin 2021.

Hydroélectricité/Biomasse/Déchets biogènes

La capacité installée a peu évolué par rapport à 2020.

Relation entre puissance installée et production réalisée

La puissance nette installée des énergies renouvelables intermittentes (éolien et photovoltaïque) représente plus de la moitié de la puissance totale installée en Allemagne fin 2021. Cependant, la contribution de l´éolien et du photovoltaïque à la production nette d´électricité – lissée sur l´année – a été inférieure à 30% (voir figure 5). Cela correspond à un facteur de charge moyen [1] d´environ 15%, sans toutefois apporter une contribution durable à la sécurité d´approvisionnement car la production est très fluctuante au cours de l´année.

Fig 5 Capacite_production en pourcent 2021
Figure 5 : puissance nette installée et production nette en pourcentage en 2021 (hors STEP) selon /3/

A titre de comparaison, le nucléaire allemand, qui, avec 8,1 GW nets, représente environ 3,6% de la puissance installée en 2021, a produit 11,7 % nets de l´électricité. Cela correspond à un facteur de charge moyen d´environ 92%.

Faits marquants des énergies renouvelables intermittentes en 2021

Les résultats des énergies renouvelables démontrent les limites de la conversion aux sources renouvelables intermittentes.

Outre de nombreux épisodes de faible production éolienne et photovoltaïque au cours de l´année, une forte variabilité inter-saisonnière et interannuelle des sources renouvelables intermittentes a été à nouveau mise en évidence en 2021.

Normalement l´automne et l´hiver sont les périodes les plus venteuses. En revanche, le premier trimestre 2021 a connu une période assez peu venteuse (voir figure 6). La production éolienne terrestre a baissé de 13% par rapport à l´année précédente. La production éolienne en mer a été en baisse de 11% par rapport à 2020. En cause l´absence de tempêtes hivernales.

Fig 6 Jahresverlauf Wind 2021
Figure 6 : fluctuation mensuelle de la production éolienne en 2021 et variation en pourcentage par rapport à 2020 /3/

Le photovoltaïque a produit 4,9 % de plus que l´année précédente. Selon le service météorologique allemand, la durée d´ensoleillement a été avec 1 650 heures au-dessus de la moyenne, mais inférieure aux 1 901 heures de 2020 /12/.

Notamment janvier 2021 a été marqué par la pluie et le manque de soleil (voir figure 7). La production était nettement inférieure par rapport à janvier 2020 (- 42,4 %). En revanche, en juin (+ 28,7%) et en octobre (+ 53,8%) la production photovoltaïque a été la plus élevée jamais enregistrée pendant ces mois-ci.

La production hydroélectrique s´est accrue de 3,7 % par rapport à 2020 en raison de fortes précipitations durant les mois d´été /4/.

Fig 7 Jahresverlauf PV_Hydro 2021
Figure 7 : fluctuation mensuelle de la production photovoltaïque et hydroélectrique en 2021 et variation en pourcentage par rapport à 2020 /3/

Échanges transfrontaliers d´électricité

Le solde des exportations d´électricité de l´Allemagne a baissé au cours des dernières années et s´élève selon /1/ à environ 19,3 TWh en 2021 (figure 8).

Les échanges transfrontaliers dépendent non seulement de l´offre et de la demande, mais aussi des prix de l électricité dans les pays voisins. Les prix de gros sur le marché day-ahead de chaque pays sont le résultat de cette interaction.

Depuis novembre 2020, l´échange transfrontalier direct entre l´Allemagne et la Belgique est possible via l´interconnexion ALEGrO /8/. En avril 2021, l´interconnecteur NordLink /9/, qui relie la Norvège avec l´Allemagne, est pleinement entré en fonction.

Fig 8 export _ import
Figure 8 : solde des échanges transfrontaliers d´électricité en TWh selon /1/ (les chiffres de 2021 sont provisoires)

La structure des échanges physiques entre l´Allemagne et les pays voisins a changé. Les exportations vers la Suisse et la France ont augmenté, les importations ont été plus importantes en provenance de la République tchèque et de l´Autriche. Il convient toutefois de noter qu´en raison de la situation centrale de l´Allemagne en Europe, une certaine partie des flux physiques transfrontaliers sont des flux de transit et des flux en boucle.

Pour un pays donné, le solde total des échanges physiques et contractuels devrait, dans l´idéal, être le même.

Modernisation des réseaux de transport

Le développement des réseaux de transport et de distribution est crucial pour la transition énergétique /10/, /11/.

Les gisements de vent, dans le nord du pays, étant géographiquement distants des grands centres de consommation dans l´ouest et sud industriel, l´épine dorsale est constituée par plusieurs tracés nord – sud en courant continu afin de limiter les congestions.

Le plan actuel du réseau de transport prévoit environ 12.260 km terrestres (nouvelles lignes et renforcement des lignes existantes). Seuls 15,8% (1.934 km) étaient réalisés fin 2021 /10/.

A cela se rajoute la connexion des éoliennes en mer, environ 3650 km à réaliser d´ici 2030.

Le développement des réseaux de distribution est également d´une grande importance pour la mise en œuvre de la transition énergétique. La majorité des installations d´énergies renouvelables décentralisées y est raccordée. De plus, l´électrification des autres secteurs de l´économie conduit à la croissance rapide des nouveaux consommateurs connectés majoritairement au réseau de distribution.

Émissions de gaz à effet de serre

Les émissions de gaz à effet de serre augmentent de 4,5% (~ 33 Mt CO2éq) par rapport à 2020 pour atteindre 762 Mt CO2éq selon Agence Fédérale de l´Environnement /27/. Cela correspond à une réduction de 38,7% versus 1990. L´augmentation des émissions est particulièrement marquée dans le secteur de l´énergie. L´Allemagne prend du retard sur ses ambitions d´une réduction de 65% d´émissions de gaz à effet de serre d´ici 2030 par rapport à 1990.

Le secteur de l´énergie enregistre une hausse des émissions de gaz à effet de serre d´environ 27 Mt CO2éq pour atteindre 247 Mt CO2éq notamment en raison d´une hausse des émissions du secteur électrique.

Les émissions de gaz à effet de serre liées à la production d´électricité sont en 2021 avec ~ 223 Mt CO2éq en forte augmentation par rapport à 2020 (~195 Mt CO2éq), année atypique du fait de la crise sanitaire et des faibles niveaux de consommation. Les causes sont la hausse de consommation d´électricité, la baisse de la production renouvelable et le recours accru aux centrales à charbon en raison de la forte augmentation du prix du gaz. Pour l´année 2021, l´intensité carbone est estimé à 428g CO2éq /kWh /29/.

Pour le secteur de l´énergie n´existent que des objectifs sectoriels pour 2020 et 2022. Malgré la forte augmentation des émissions, ce secteur pourrait encore atteindre son objectif de 2022, soit 257 Mt CO2éq, compte tenu du fait qu´en 2020 les émissions ont été avec 220 Mt CO2éq bien en-dessous de la valeur cible de 280 Mt CO2éq.

Dans le secteur de l´industrie, les émissions ont augmenté d´environ 9 Mt CO2éq, soit 5,5 % par rapport à l´année précédente. Avec environ 181 Mt CO2éq, le secteur se situe juste en dessous de la limite fixée par la loi fédérale sur la protection du climat (182 Mt CO2éq).

En revanche, les objectifs sectoriels fixés pour 2021 n´ont pas été atteints dans les secteurs du bâtiment et des transports.

Pour le secteur du bâtiment c´est la deuxième fois consécutive. Bien que les émissions dans ce secteur aient baissé à 115 Mt CO2éq, soit environ -3,3% par rapport à l´année précédente, l´objectif sectoriel de 113 Mt CO2éq pour 2021 a été légèrement dépassé. La principale raison a été un effet spécial, la nette diminution de l´achat de fioul. Les stocks de fioul ont déjà été largement augmentés en 2019 et 2020 en raison des prix avantageux.

Pour le secteur des transports, malgré des activités économiques encore réduites en 2021 en raison de la crise sanitaire, l´objectif de 145 Mt CO2éq a été avec 148 Mt CO2éq réalisés également manqué de justesse.

L´avenant à la Loi sur la Protection du Climat fixe des objectifs juridiquement contraignants en matière d´émissions de gaz à effet de serre pour chaque année et pour chaque secteur économique.

En cas de non-respect des objectifs climatiques, les ministères compétents doivent présenter un programme d´urgence afin de s´engager le plus rapidement possible sur une voie de réduction pour atteindre les objectifs annuels. Le gouvernement fédéral travaille sur un programme d´urgence pour le climat qui devrait répondre à ces exigences.

La figure 9 montre l´évolution entre 2010 et 2021 des émissions allemandes de gaz à effet de serre contenues dans le « panier de Kyoto » en millions de tonnes de CO2éq par an et les objectifs de 2030 selon l´avenant à la Loi sur la Protection du Climat (source des valeurs est l´Agence Fédérale de l´Environnement /26/, /27/).

Fig 9 emission 2021
Figure 9 : évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2 éq par an (hors secteur des terres et forêts – UTCATF) et objectifs

Pour atteindre les objectifs de 2030, il faut désormais réduire les émissions de 6% par an. Depuis 2010, la réduction moyenne n´a même pas atteint 2% par an /27/.

En l´absence de nouvelles mesures de protection du climat, conjuguée à l´arrêt de trois centrales nucléaires (environ 4 GW de capacité bas carbone) fin 2021 (voir plus loin), l´espérance d´une réduction des émissions en 2022 s´amenuise.

Evolution des prix de gros de l´électricité 

La forte hausse des prix des énergies fossiles a secoué les marchés de l´énergie en 2021 /2/.

Le gaz naturel a connu un tel renchérissement que le charbon est devenu plus avantageux, bien que le prix de la tonne de CO2 sur le marché européen ait battu de nouveaux records.

Si 2020 avait été marqué par une moyenne annuelle du prix du marché journalier de l´électricité de 30,47 €/MWh dans la zone Allemagne/Luxembourg, celle-ci a triplé en 2021 (voir tableau 3) en passant à 96,85 €/MWh /12/, /13/. Le prix de gros a marqué un record depuis 2000, date du début des échanges boursiers d´électricité en Allemagne.

T3 prix spot
Tableau 3 : sélection des prix de gros day-ahead pour la zone de marché Allemagne/Luxembourg /12/

Le prix de gros le plus élevé de l´année a été enregistré le mardi 21 décembre entre 17h et 18h avec 620,00 €/MWh. Une consommation d´électricité élevée de 66,5 GW a coïncidé avec une production renouvelable de seulement 8,8 GW.

Le prix de gros le plus bas a été enregistré le samedi 22 mai entre 14h et 15h avec – 69,00 €/MWh. Dans cette plage horaire, la production renouvelable a été très élevée, couvrant presque 98% de la consommation totale.

Pendant environ 30% des jours de l´année, le prix de gros sur le marché day-ahead a été négocié à plus de 100 €/MWh.

Bien que le volume négocié sur les bourses ne représente qu´une fraction du volume total des échanges commerciaux, les marchés day-ahead de l´EPEX SPOT pour une livraison d´électricité le jour suivant sont considérés comme un indicateur des prix. Une fourchette de prix de -500 €/MWh à 3 000 €/MWh est définie pour le négoce day-ahead /14 /.

La figure 10 montre la moyenne du prix day-ahead par mois calculée à partir des 24 prix horaires d´une journée pour la zone de marché Allemagne/Luxembourg.

fig 10 Prix spot 2019_2021
Figure 10 : prix sur le marché day-ahead de l´EPEX SPOT (moyenne par mois de 2019 à 2021) pour la zone de marché Allemagne/Luxembourg /15/

L´année 2021 a été marquée par une évolution des prix de gros sans précédent. Le prix de gros sur le marché day-ahead a plus que quadruplé en passant de 52,81 €/MWh en janvier à 221,06 €/MWh en décembre. La raison en était l´augmentation du prix du gaz naturel et l´utilisation accrue de centrales à charbon. Cela a entrainé un accroissement de la demande de certificats d´émission de CO2 suivi d´une forte hausse du prix de la tonne de CO2 sur le marché européen.

Toutefois les résultats des échanges sur le marché à terme qui donnent une indication de l´évolution future des prix de gros laissent présumer une baisse des prix à partir d´avril 2022.

Episodes de prix négatifs au marché spot

Depuis plusieurs années le marché de gros en Allemagne est confronté à des épisodes de prix négatifs. Dans ces situations, les vendeurs payent les acheteurs, ce qui constitue une situation de marché singulière. Ces situations apparaissent en particulier en cas d´abondance de production d´électricité d´origine renouvelable mais de faible demande, situations au cours desquelles certains moyens de production classiques ne peuvent pas fonctionner en deçà d´un minimum technique.

Depuis 2015 les épisodes de prix négatifs sont bien plus fréquents et marqués. En 2020 le nombre de pas horaires de prix négatifs a battu un record avec 298. En revanche en 2021 le nombre de pas horaires a diminué de plus de la moitié à 139 /12/, /13/. La figure 11 montre les pas horaires mensuels avec des prix négatifs négociés sur le marché day-ahead.

Fig 11 Nombre heures prix negatif 2019_2021
Figure 11 : pas horaires par mois avec des prix négatifs sur le marché de gros /10/, /13/

La réglementation en vigueur depuis 2017 prévoit la suspension de la rémunération si le prix de gros affiche une valeur négative pendant au moins six heures sans interruption pour les éoliennes > 3 MW et les autres installations d´énergies renouvelables > 500 kW mises en service à partir de 2016. Dans ce cas les exploitants ne recevront plus le complément de rémunération rétroactivement à partir de la première heure de prix négatif.

La règle des 6 heures s´est appliquée pour 80 pas horaires avec des prix négatifs en 2021 contre 192 pas horaires en 2020.

Dans le cadre de l´avenant à la Loi sur les Énergies Renouvelables, entré en vigueur début 2021 (EEG 2021, voir plus bas), la suspension de la rémunération des nouvelles installations d´énergies renouvelables > 500 kW intervient si le prix de gros affiche une valeur négative pendant au moins quatre heures sans interruption. Il s´agit d´un durcissement de la réglementation de 2017 qui reste toutefois en vigueur pour les installations mises en service avant 2021. En 2021, la règle des 4 heures s´est appliquée pour 117 pas horaires avec des prix de gros négatifs.

Selon le bureau d´études FfE (Forschungsgesellschaft für Energiewirtschaft mbH) la valeur du marché des prix négatifs est évaluée à environ 504 M€ pour la période de 2017 à 2020 /16/ soit environ 126 M€ par an. Ce montant est dérisoire par rapport au montant annuel global d´électricité négocié à la bourse. 

Projets phares du tournant énergétique en 2021 

Les projets phares du tournant énergétique allemand en 2021 étaient :

Taxe carbone

La taxe carbone sur les émissions des produits combustibles non couverts par le Système Européen d´Échange de Quotas d´Émissions est entrée en vigueur début 2021 /17/. Le prix initial à partir de 2021 a été fixé à 25 Euros par tonne de CO2. La taxe est censée augmenter régulièrement pour donner un signal prix, incitant à réduire l´usage des énergies fossiles.  En 2026, les certificats seront mis aux enchères dans une fourchette de 55 à 65 Euros par tonne de CO2.

Les recettes de la taxe carbone seront réinvesties dans des mesures de protection du climat ou restituées aux citoyens à titre de compensation (par exemple allègement de la charge de soutien des énergies renouvelables).

Avenant à la Loi sur les Énergies Renouvelables (EEG 2021)

L´avenant, entré en vigueur début 2021 /18/ vise l´objectif d´une part des énergies renouvelables de 65% à la consommation brute d´électricité d´ici 2030 en tablant sur une consommation brute de 580 TWh. La loi prévoit une trajectoire de développement de la puissance installée jusqu´en 2030, soit 71 GW pour l´éolien terrestre, 20 GW pour l éolien en mer, 100 GW pour le photovoltaïque et 8,4 GW pour la biomasse. Dans ce contexte, la loi fixe, de manière contraignante, la feuille de route pour y parvenir.

Avenant à la Loi sur la Protection du Climat

Critiquée par sa Cour Constitutionnelle, le gouvernement sortant a durci considérablement ses objectifs climatiques. Le gouvernement compte atteindre la neutralité carbone en 2045, soit cinq ans plus tôt que prévu par l´Union européenne. L´avenant à la Loi sur la Protection du Climat est entré en vigueur fin août 2021 /19/.

Comme étape intermédiaire une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 65% d´ici 2030 par rapport à 1990 est visée, contre 55% auparavant. Jusqu´à 2030, la Loi fixe des objectifs juridiquement contraignants en matière d´émissions de gaz à effet de serre pour chaque année et pour chaque secteur économique. La part la plus importante des réductions supplémentaires sera supportée par le secteur énergétique et celui de l´industrie.

La définition de mesures concrètes a été laissée au nouveau gouvernement formé après les élections fédérales en septembre 2021.

Contrat de coalition du nouveau gouvernement

Le nouveau gouvernement allemand, formé par les Sociaux-démocrates, les Verts et les Libéraux a pris ses fonctions le 8 décembre 2021. Le contrat de coalition de 177 pages décrit les grandes lignes de la politique commune en matière de climat et énergie /20/.

Le nouveau gouvernement plaide pour une « économie socio-écologique de marché » et fait la part belle à la lutte contre le changement climatique. Il est prévu de créer un ensemble de règles pour mettre l´Allemagne sur la voie de +1,5 °C, selon le préambule du contrat de coalition.

En supprimant les obstacles au développement des énergies renouvelables, un nouveau rythme sera apporté à la transition énergétique. Une part de 80% d´énergies renouvelables dans la consommation brute d´électricité est maintenant visée d´ici 2030 contre 65% par le gouvernement sortant (voir EEG 2021 plus haut). Suite à l´électrification accrue des autres secteurs de l´économie, le nouveau gouvernement table sur une consommation brute de 680 à 750 TWh d´ici 2030. Le gouvernement sortant visait encore sur une consommation brute d´électricité de 580 TWh en 2030 (voir plus haut).

D´ici 2030, il est prévu d´augmenter la capacité du photovoltaïque à 200 GW avec obligation d´installation solaire pour les nouveaux bâtiments professionnels et celle des éoliennes en mer à 30 GW. Le nouveau gouvernement vise 40 GW d´ici 2035 et au moins 70 GW d´éoliennes en mer d´ici 2045. Aucune valeur cible n´est fixée pour les éoliennes terrestres dans le contrat de coalition. Une surface totale de l´Allemagne de 2 % sera requise pour les éoliennes terrestres. Sur cette base, il est possible de déterminer un corridor qui se situe entre 100 et 130 GW de puissance installée en 2030.

Confirmant l´arrêt des dernières centrales nucléaires d´ici 2022, le nouveau gouvernement souhaite aussi accélérer la sortie du charbon, actuellement prévue pour 2038, et l´avancer à 2030 « dans l´idéal ».

Dans le secteur de la chaleur un objectif de 50% de chaleur produite de manière climatiquement neutre est visé d´ici 2030. Pour avancer la décarbonation des transports le contrat de coalition prévoit 15 millions de voitures électriques et un million de bornes de recharge publiques à l´horizon 2030. Seuls les véhicules dits “zéro émission” seront autorisés à la vente à partir de 2035.

Les mesures actuellement engagées sont largement insuffisantes. Le nouveau gouvernement a l´intention de mettre en place un programme d´urgence pour la protection du climat avec des lois et mesures concrètes en 2022.

Arrêt de 3 centrales nucléaires et 6 centrales à charbon fin 2021

Conformément à la loi de sortie du nucléaire de 2011 trois centrales nucléaires ont été arrêtées définitivement le 31 décembre 2021 /21/. Il s´agit des centrales de Gundremmingen unité C, Grohnde et Brokdorf. L´Allemagne perd ainsi 4058 MW nets de moyens pilotables bas carbone. Les trois dernières centrales nucléaires (Emsland, Neckarwestheim unité 2 et Isar unité 2) d´une puissance totale nette de 4055 MW seront arrêtées fin 2022.

Dans le cadre de la loi sur l´arrêt définitif du charbon, six centrales ont été arrêtées en décembre 2021. Trois centrales à lignite d´une puissance totale de 910 MW sont concernées. Il s´agit des centrales Niederaußem unité C (295 MW), Neurath unité B (294 MW) et Weisweiler unité E (321 MW). Ces trois unités ont chacune fonctionné pendant plus de 49 ans /6/.

Suite aux résultats du deuxième appel d´offres sur la fermeture anticipée des centrales à houille et centrales à lignite inférieures à 150 MW, trois offres ont été retenues pour un volume de 1514 MW /24/. Il s´agit des centrales Mehrum (690 MW), Wilhelmshaven (757 MW) et Deuben (67 MW). Ces centrales ne seront plus autorisées à brûler de la houille ou du lignite à partir du 8 décembre 2021. Les centrales de Mehrum et de Wilhelmshaven sont en service depuis 1979 et 1976. La centrale de Deuben a été connectée au réseau en 1936.

La centrale de Mehrum a été mise en réserve stratégique suite à son classement « importance systémique » /12/.

Début 2021 le premier appel d´offres a entrainé l´arrêt ou retrait du marché d´environ 4,8 GW /23/. Les gestionnaires avaient identifié une « importance systémique » aux centrales Heyden unité 4 de l´exploitant Uniper (puissance électrique 875 MW), Walsum unité 9 de l´exploitant Steag (puissance électrique 370 MW) et Westfalen unité E de l´exploitant RWE (puissance électrique 764 MW).

L´Agence Fédérale des Réseaux a accepté le classement en « importance systémique » des centrales Heyden 4 et Westfalen E /25/. Les deux centrales seront converties en déphaseur rotatif et pourront ainsi contribuer à la stabilité du réseau à l´avenir par la fourniture ou absorption de puissance réactive. Le fonctionnement en tant que déphaseur ne nécessite plus de bruler du charbon dans la centrale.

Tandis que la conversion de la centrale de Westfalen E doit se faire rapidement, la conversion de la centrale de Heyden 4 ne pourra avoir lieu qu´à partir d´octobre 2022 pour des raisons de planification. D´ici là elle a été mise en réserve stratégique afin de suppléer en cas de besoin à la perte de puissance réactive suite à la fermeture de la centrale nucléaire de Grohnde et ainsi éviter des états critiques sur le réseau au début des périodes prolongées de vent faible au printemps 2022.


1) Le facteur de charge est le rapport entre l’énergie électrique effectivement produite par une unité de production sur une période donnée et l’énergie qu’elle aurait produite si elle avait fonctionné à sa puissance maximale durant la même période.

Références 

/1/ AGEB (2022) Energiebilanzen, en ligne :  https://ag-energiebilanzen.de/

/2/AGORA Energiewende (2022) Die Energiewende in Deutschland: Stand der Dinge 2021. Rückblick auf die wesentlichen Entwicklungen sowie Ausblick auf 2022, en ligne :https://www.agora-energiewende.de/veroeffentlichungen/die-energiewende-in-deutschland-stand-der-dinge-2021/

/3/ BDEW (2022) Die Energieversorgung 2021 – aktualisierter Jahresbericht, 14.06.2022, Bundesverband der Energie- und Wasserwirtschaft (BDEW), en ligne : https://www.bdew.de/service/anwendungshilfen/die-energieversorgung-2021/

/4/ BDEW (2022) Stromerzeugung und -verbrauch in Deutschland. Bundesverband der Energie- und Wasserwirtschaft (BDEW). En ligne : https://www.bdew.de/energie/stromerzeugung-und-verbrauch-deutschland/.

/5/ Allemagne-Energie (2022), Allemagne : arrêt définitif de trois centrales nucléaires le 31 décembre 202, en ligne : https://allemagne-energies.com/2022/01/02/allemagne-arret-definitif-de-trois-centrales-nucleaires-le-31-decembre-2021/

/6/RWE Power (2021) Stilllegungen zum Jahresende: RWE setzt gesetzlich festgelegten Ausstieg aus Kohle und Kernkraft um, Communiqué de presse du 30 décembre 2021, en ligne : https://www.rwe.com/presse/rwe-power/2021-12-30-rwe-setzt-gesetzlich-festgelegten-ausstieg-aus-kohle-und-kernkraft-um

/7/ Bundesnetzagentur (2022) Kraftwerksliste, En ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/DE/Sachgebiete/ElektrizitaetundGas/Unternehmen_Institutionen/Versorgungssicherheit/Erzeugungskapazitaeten/Kraftwerksliste/kraftwerksliste-node.html

/8/ Allemagne-Energie (2018) Aix-la-Chapelle : Inauguration du chantier pour la première interconnexion électrique entre la Belgique et l´Allemagne ce mardi 30 octobre 2018, en ligne : https://allemagne-energies.com/2018/11/01/aix-la-chapelle-inauguration-du-chantier-pour-la-premiere-interconnexion-electrique-entre-la-belgique-et-lallemagne-ce-mardi-30-octobre-2018/

/9/ TenneT (2020) TenneT starts Trial Operation of NordLink. Communiqué de presse du 9 décembre 2020. TenneT TSO GmbH. En ligne : https://www.tennet.eu/fileadmin/user_upload/Company/News/German/Fischer/2020/20201209_PM_TenneT_NordLink_Probephase_Markteintritt_EN.pdf.

/10/ Bundesnetzagentur (2022), Netzausbau, Monitoringbericht, en ligne : https://www.netzausbau.de/Vorhaben/uebersicht/report/de.html

/11/ Allemagne-Energie (2021) La modernisation des réseaux électriques – talon d´Achille de l´Energiewende, en ligne : https://allemagne-energies.com/2021/11/02/la-modernisation-des-reseaux-electriques-talon-dachille-de-lenergiewende/

/12/ Bundesnetzagentur (2022) smard Der Strommarkt im Jahr 2021 en ligne : https://www.smard.de/page/home/topic-article/444/206664

/13/ Bundesnetzagentur (2022) Bundesnetzagentur veröffentlicht Daten zum Strommarkt 2021, Communiqué de presse du 7 janvier 2022, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Downloads/DE/Allgemeines/Presse/Pressemitteilungen/2022/20220107_smard.pdf?__blob=publicationFile&v=3

/14/ EPEX SPOT (2021) Trading at EPEX SPOT 2021. EPEX SPOT. En ligne : https://www.epexspot.com/sites/default/files/2021-05/21-03-15_Trading%20Brochure.pdf

/15/ Bundesnetzagentur (2022), smard – Strommarktdaten, en ligne : https://www.smard.de/en

/16/ FfE (2021) Deutsche Strompreise an der Börse EPEX Spot in 2020. FfE Forschungsgesellschaft für Energiewirtschaft mbH. En ligne : https://www.ffegmbh.de/kompetenzen/wissenschaftliche-analysen-system-und-energiemaerkte/strommarkt/1040-deutsche-strompreise-an-der-boerse-epex-spot-in-2020

 /17/Allemagne-Energies (2020)  L´Allemagne instaure la « taxe carbone » à partir de 2021 dans les secteurs non couverts par le système européen d´échange de quotas d´émission, en ligne https://allemagne-energies.com/2020/10/10/lallemagne-instaure-la-taxe-carbone-a-partir-de-2021-dans-les-secteurs-non-couverts-par-le-systeme-europeen-dechange-de-quotas-demission/

/18/ OFATE (2021) Mémo sur la loi allemande sur les énergies renouvelables 2021. 22 janvier 2021. Office franco-allemand pour la transition énergétique. En ligne : https://energie-fr-de.eu/fr/systemes-marches/actualites/lecteur/memo-sur-la-loi-allemande-sur-les-energies-renouvelables-2021.html

/19/ Allemagne-Energies (2021) Le Conseil des Ministres allemand adopte le 12 mai 2021 le projet révisé de la Loi Fédérale sur la Protection du Climat (Bundes-Klimaschutzgesetz) suite au jugement de la Cour Constitutionnelle Fédérale, en ligne : https://allemagne-energies.com/2021/05/13/le-conseil-des-ministres-allemand-adopte-le-12-mai-2021-le-projet-revise-de-la-loi-federale-sur-la-protection-du-climat-bundes-klimaschutzgesetz-suite-au-jugement-de-la-cour-constitutionnelle-feder/

/20/ Allemagne-Energies (2021) Le nouveau gouvernement allemand veut accélérer la transition énergétique, en ligne : https://allemagne-energies.com/2021/12/08/le-nouveau-gouvernement-allemand-veut-accelerer-la-transition-energetique/

/21/ Allemagne-Energies (2022) Allemagne : arrêt définitif de trois centrales nucléaires le 31 décembre 2021, en ligne : https://allemagne-energies.com/2022/01/02/allemagne-arret-definitif-de-trois-centrales-nucleaires-le-31-decembre-2021/

/22/ OFATE (2022) Bilan d’ouverture du ministre fédéral de l’Économie et du climat, 11 janvier 2022, en ligne : https://energie-fr-de.eu/fr/societe-environnement-economie/actualites/lecteur/bilan-douverture-du-ministre-federal-de-leconomie-et-du-climat.html

/23/ Allemagne-Energies (2021) Résultat du premier appel d´offres sur la sortie des centrales à houille et petites centrales à lignite inférieures à 150 MW – presque 4,8 GW de centrales à charbon seront arrêtées, en ligne https://allemagne-energies.com/2020/12/03/resultat-du-premier-appel-doffres-sur-la-sortie-des-centrales-a-houille-et-petites-centrales-a-lignite-inferieures-a-150-mw-presque-48-gw-de-centrales-a-charbon-seront-arretees-fin-2020/

/24/ Allemagne-Energies (2021) Évolutions récentes de la sortie progressive du charbon en Allemagne, en ligne : https://allemagne-energies.com/2021/04/17/evolutions-recentes-de-la-sortie-progressive-du-charbon-en-allemagne/

/25/ Bundesnetzagentur (2021) Bundesnetzagentur gibt grünes Licht für Umbau stillzulegender Steinkohlekraftwerke zur Netzsicherheit, Communiqué de presse du 1er juin 2021, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Pressemitteilungen/DE/2021/20210601_SystemRel.html?nn=265778

/26/ UBA (2022) Finale Klimabilanz 2020: Emissionen sanken um 41 Prozent gegenüber 1990, Communiqué de presse n° 5/2022 du 20 janvier 2022, Umweltbundesamt, en ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/finale-klimabilanz-2020-emissionen-sanken-um-41

/27/ UBA (2022) Treibhausgasemissionen stiegen 2021 um 4,5 Prozent, Communiqué de presse n° 15/2022 du 14 mars 2022, Umweltbundesamt, en ligne : https://www.umweltbundesamt.de/presse/pressemitteilungen/treibhausgasemissionen-stiegen-2021-um-45-prozent

/28/ BMWi (2022) Zeitreihen zur Entwicklung der erneuerbaren Energien in Deutschland, Stand 2/2022, Bundesministerium für Wirtschaft und Klimaschutz. En ligne : https://www.erneuerbare-energien.de/EE/Navigation/DE/Service/Erneuerbare_Energien_in_Zahlen/Zeitreihen/zeitreihen.html.

/29/ UBA (2022) Entwicklung der spezifischen Treibhausgas-Emissionen des deutschen Strommix in den Jahren 1990 – 2021, CLIMATE CHANGE 15/2022, Avril 2022, en ligne : https://www.umweltbundesamt.de/publikationen/entwicklung-der-spezifischen-kohlendioxid-8

Allemagne – l´essentiel des résultats énergétiques 2019

(Texte mis à jour le 30.10.2020)

L´édition 2020 est disponible ici

Temps de lecture 15 min

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Selon les données statistiques, les résultats énergétiques 2019 se résument comme suit :

  • La consommation énergétique (énergie primaire) baisse de 2,1 % par rapport à 2018 et de 2,4 % corrigée des aléas climatiques
  • la production brute d´électricité s´élève à ~ 604 TWh, environ 5% inférieure par rapport à 2018 (~ 636 TWh), la consommation nationale brute d´électricité recule à 569 TWh (2018 : 584 TWh)
  • la part des filières renouvelables passe à 40% (~ 242 TWh) de la production brute, leur capacité totale installée atteint les 124 GW
  • la part des énergies fossiles (houille, lignite, gaz, pétrole et divers) dans la production brute s´élève à ~ 48% (~ 287 TWh), soit moins 15% par rapport à 2018 (~ 336TWh)
  • la production du nucléaire se maintient avec ~ 75 TWh presque au niveau de 2018 La tranche 2 (puissance électrique nette de 1402 MW) de la centrale nucléaire de Philippsburg a été arrêtée définitivement fin 2019 conformément à la loi atomique
  • Le solde exportateur est avec ~ 35 TWh en fort recul par rapport à 2018 (~ 51 TWh)
  • les émissions de gaz à effet de serre baissent de 6,3 % par rapport à 2018 à environ 805 Mt CO2éq, ce qui correspond à une baisse de 35,7% par rapport à 1990

Consommation énergétique

Selon AG Energiebilanzen /1/, la consommation d´énergie primaire recule à 12.832 PJ (306 Mtep), soit moins 2,1 % par rapport à l´année précédente (2018 : 13.102 PJ). La baisse de la consommation énergétique corrigée des aléas climatiques s´élève à 2,4 %. L´objectif de 2020 s´élève à 11 504 PJ (275 Mtep).

La baisse de la consommation est entre autres due à des améliorations de l’efficacité, une réorientation du mix énergétique et à une baisse conjoncturelle de la consommation d’énergie dans l’industrie. La consommation a été stimulée par les conditions météorologiques un peu plus fraîches et l’augmentation de la population. Toutefois, les facteurs d’augmentation étaient globalement nettement plus faibles que les facteurs de réduction de la consommation.

Les parts des différentes sources d’énergie dans le mix énergétique national ont évolué en 2019 par rapport à l’année précédente en faveur des énergies renouvelables et du gaz naturel. Les produits pétroliers ont également augmenté leur part. En revanche, des baisses importantes ont été enregistrées pour la houille et le lignite. Néanmoins plus de 78% de la consommation d’énergie primaire sont couverts par des combustibles fossiles. Les énergies renouvelables ont augmenté leur contribution à presque 15% et l’énergie nucléaire reste presque constante à 6,4 %.

Fig 1_Energie primaire
Figure 1 : Consommation d´énergie primaire /1/

Production et consommation d´électricité

Selon BDEW /3/ la production brute d’électricité est avec ~ 604 TWh, moins 5% par rapport à 2018 (~ 636 TWh). La production nette s´élève à ~ 574 TWh en 2019.

La consommation intérieure brute recule à 568,8 TWh, moins 2,7% par rapport à 2018 (584,4 TWh).

Fig 2_ Production electricite 2019
Figure 2 : Production brute d´électricité en 2019 (données entre parenthèses pour 2018)

Le tableau ci-dessous détaille l´évolution de la production brute d´électricité pour chaque filière en 2019 par rapport à 2018.

Fig Tableau 2018_2019
Tableau : Production et consommation d´électricité 2018 et 2019 selon /3/

La production des centrales au lignite a sensiblement diminué en raison de la sortie du marché et mise en « réserve de sécurité » des unités supplémentaires, de la réduction de la production dans la mine à ciel ouvert de Hambach, d’un nombre plus élevé d´arrêts de tranche par rapport à l’année précédente et de l’augmentation de la production d’électricité à partir d’énergies renouvelables selon /1/.

La production d’électricité à partir de la houille a diminué de presque un tiers. L’augmentation du prix de la tonne de CO2 dans le système européen d’échange de quotas d’émission a affecté les coûts marginaux des centrales à charbon/lignite. De plus le faible prix du gaz naturel a fait en sorte que les centrales au charbon ont été de plus en plus remplacées par des centrales au gaz moins émettrices en CO2. La production d’électricité à partir de gaz naturel a augmenté d´environ 10 points.

L’énergie nucléaire a enregistré un léger recul de la production d’environ 1 point par rapport à l’année précédente.

La part des énergies renouvelables à la production brute a dépassé les 40% notamment grâce à la progression de l’énergie éolienne. Sous  l´hypothèse que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables est entièrement consommée en Allemagne et seule l´électricité produite à base de centrales conventionnelles est exportée, la part des énergies renouvelables à la consommation brute d´électricité a atteint 42,5 %. La part élevée des énergies renouvelables a également été favorisée par une réduction significative de la consommation d’électricité. La consommation nationale était en 2019 au plus bas niveau des 20 dernières années. Les raisons ont été déjà évoquées plus haut au paragraphe « Consommation énergétique ».

Pour la première fois, la part des énergies bas carbone (énergies renouvelable et nucléaire) a dépassé les 50% dans le mix d´électricité en Allemagne. Mais ce ne sera pas pour longtemps, car la sortie définitive du nucléaire est programmée d´ici fin 2022. Même si d´ici là on arrivait à  suppléer par des renouvelables à la production d´environ 75 TWh nucléaire bas carbone restante, on ne serait pas plus avancé au niveau de la réduction des émissions CO2 dans le secteur électrique.

Contrairement aux idées reçues, la production à base de charbon et lignite est en baisse continue depuis 2015 et a été dépassée largement par les énergies renouvelables en 2019 (voir figure 3).

Fig 3 Evolution part
Figure 3 : Evolution de la production brute des différentes filières depuis 2009 /3/

Puissance installée

L’Allemagne exploite deux parcs de production en parallèle pour une pointe de consommation autour de 82 GW.

L’Allemagne disposait fin 2019 d´un parc de production d´environ 224 GW dont 100 GW de centrales conventionnelles et 124 GW d´énergies renouvelables selon /4/ et /6/.

Selon /4/ et/17/, la puissance installée des énergies renouvelables a augmenté d´environ 6 GW à 124 GW en 2019. Le parc d´énergies renouvelables intermittentes atteint maintenant les 110 GW (voir figure 4). L´augmentation de la capacité d´éolien terrestre est avec environ 1 GW en 2019 une des plus faibles de l’histoire du développement de l’énergie éolienne terrestre. A titre de comparaison, entre 2009 et 2018 l’augmentation annuelle moyenne de la capacité a été de 3,1 GW. Pour plus d´information voir /14/ et /17/.

Le parc conventionnel est en recul d´environ 3 GW /6/ en raison de l´arrêt des centrales thermiques à flamme (1,1 GW houille et 0,5 GW gaz) et de la tranche 2 de Philippsburg (1,4 GW) qui a été arrêtée le soir du 31.12.2019.

Fig 4 Puissance installee 2018_2019
Figure 4 : Puissance installée en 2018 et 2019 selon /4/, /6/ et /17/

Il faut toutefois noter qu´environ 86 GW (STEP inclus) du parc conventionnel opèrent actuellement sur le marché de l’électricité /6/. Environ 4,6 GW (centrales à houille, au gaz et au fioul) sont provisoirement fermés et environ 9,6 GW (centrales à lignite, à houille et au gaz) constituent une réserve stratégique appelée soit « réserve de sécurité » soit  « réserve de soutien du réseau », fonctionnant uniquement en situation exceptionnelle. La figure 5 montre les capacités du parc conventionnel hors marché.

L’agence fédérale des réseaux fixe chaque année le besoin de réserve de soutien du réseau pour des situations d´approvisionnement difficile en hiver. Au cours de l´hiver 2020/2021, la capacité des centrales de réserve sera de 6,6 GW minimum et restera au même niveau que les dernières années /21/. Le facteur décisif pour la demande d´une réserve est la trop lente modernisation des réseaux et notamment des tracés nord – sud en courant continu.

De plus, 8 tranches au lignite d´une capacité totale de 2,7 GW constituent une réserve de sécurité jusqu´à leur déclassement définitif, prévu en 2023. Ces centrales assurent une réserve ultime. En cas de besoin, les centrales doivent être opérationnelles dans un délai de 10 jours.

Fig 5_KW hors reseau_1
Figure 5 : Parc conventionnel hors marché au 1er avril 2020 /6/

Échanges transfrontaliers d’électricité

En 2019, le solde exportateur est avec ~ 35 TWh en baisse (2018 : ~ 51 TWh). Au total l´Allemagne a exporté 74,5 TWh et importé 39,6 TWh /2/, /3/.  Pour un pays donné, le solde total des échanges physiques et contractuels devrait être le même dans l’idéal.

Cette baisse du solde exportateur s’explique notamment par la réduction de la compétitivité des centrales à charbon et lignite allemandes par rapport aux centrales à gaz en Allemagne et à l’étranger en raison de la hausse du prix de la tonne de CO2 et de la baisse du prix de gaz en Europe.

Fig 6 _Solde export
Figure 6 : Solde des échanges commerciaux en TWh

Au niveau des échanges physiques, le solde exportateur est en 2019 avec 13,1 TWh en faveur de la France selon /22/. Cela s´explique entre autres par le fait qu´une partie de l´électricité exportée par la France vers la Suisse et l´Italie transite par l´Allemagne.

Au niveau des échanges commerciaux, la France importe toujours plus (14,0 TWh) qu´elle n´exporte (11,5 TWh) vers l´Allemagne, soit un solde exportateur de 2,5 TWh en faveur de l´Allemagne selon /22/.

La figure 7 montre les échanges commerciaux mensuels de l´Allemagne avec les pays voisins ainsi qu´entre la France et l´Allemagne en 2019. L´Allemagne importe plus d´électricité de la France qu´elle n´en exporte entre mai et septembre, et exporte plus vers la France qu´elle importe le reste du temps.

Fig 6a flux commerciaux
Figure 7 : échanges commerciaux mensuels de l´Allemagne avec les pays voisins ainsi qu´entre la France et l´Allemagne en 2019 (source : SMARD.de, Agence fédérale des Réseaux)

Émissions de gaz à effet de serre

Selon l´agence fédérale de l´environnement (UBA – Umweltbundesamt) /19/, les émissions de gaz à effet de serre sont en recul d´environ 53 Mt CO2éq par rapport à 2018.

La réduction est presque exclusivement attribuable au secteur électrique (- 50 Mt CO2éq selon /9/) suite à l´augmentation de la production d’électricité à partir des énergies renouvelables et au recul simultané de la production à base de charbon/lignite en faveur des centrales à gaz moins émettrices en CO2. La raison est, outre la baisse du prix du gaz sur le marché mondial, l’augmentation du prix de la tonne de CO2 dans le système d’échange de quotas d’émission de l’UE. De plus l’augmentation de la production d’électricité à partir des énergies renouvelables et la diminution de la consommation d’électricité ont contribué à une baisse de production des centrales à combustible fossile dans la logique du « merit order ». Avec les émissions de 219 Mt CO2 on obtient un contenu carbone moyen du secteur électrique allemand d´environ 0,4 kg CO2/kWh en 2019 selon /9/.

En revanche aucune baisse des émissions n’est observée dans les secteurs des transports et du bâtiment. Les émissions dans le secteur du bâtiment ont même augmenté de 5 Mt CO2éq (plus 4,4 %) par rapport à l’année précédente.

La figure 8 montre l´évolution des émissions allemandes de gaz à effet de serre contenus dans le «panier de Kyoto» en millions de tonnes de CO2éq par an (données 1990 à 2019 selon /19/, estimation des émissions de la production d´électricité selon /9/). Le «panier de Kyoto» comprend les gaz à effet de serre suivants: le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), l’oxyde nitreux (N2O) et les gaz dits fluorés (hydrofluorocarbones, hydrocarbures perfluorés, triflourure d’azote (NF3) et hexafluorure de soufre – SF6).

Fig 7_Emissions
Figure 8 : Évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2éq par an

Les émissions de gaz à effet de serre étaient en 2019 donc de 35,7 % inférieures au niveau de 1990. Malgré cela, l´objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici 2020 par rapport à 1990 nécessiterait en 2020 encore une baisse de 56 Mt CO2éq par rapport à 2019.

D’après des informations du think tank Agora Energiewende, cet objectif pourrait être atteint et même dépassé sous l’effet de la crise sanitaire du Coronavirus et de l’hiver particulièrement doux et venteux /20/.

Evolution des prix de l´électricité 

La hausse du prix du CO2 européen a également influencé l’évolution des prix spot pour les années suivantes. Fin 2019, l’électricité a été négociée à 43 €/MWh pour l´année 2020 et jusqu’à 50 €/MWh pour les livraisons d’électricité pour les années suivantes /4/.

La hausse des prix de gros de l’électricité sera renforcée par une nouvelle augmentation de la charge de soutien aux énergies renouvelables électriques (EEG-Umlage) de 5,5% à 67,56 €/MWh en 2020 (2019 : 64,05 €/MWh), voir /7 /.

Le prix du KWh payé par les ménages allemands est le plus élevé d’Europe.  Les taxes et prélèvements représentent 53 % du prix  /15/. Au premier semestre 2019, le ménage allemand « moyen » avec une consommation située entre 2500 kWh et 5000 kWh a payé 30,88 €ct/kWh contre 17,65 €ct/kWh en France selon Eurostat /8/.

Les prix de l’électricité pour les ménages augmenteront d’environ 3% en 2020 en raison de l’évolution du prix décrite ci-dessus, et dépasseront en moyenne sensiblement la barre des 31 €/MWh selon /4/.

Avec l´introduction d´un prix carbone en 2021 dans les secteurs transports et chaleur/refroidissement, le gouvernement a promis une baisse de la taxe de soutien aux énergies renouvelables (EEG-Umlage).  Le principe : si les recettes provenant du prix carbone augmentent, le prix de l’électricité sera davantage réduit /11/.

Evolution des prix négatifs au marché spot

Depuis leur introduction à la bourse EPEX Spot en 2008, on observe des prix négatifs au marché spot. En Allemagne des prix négatifs sont principalement observés lorsque les énergies renouvelables fatales (éolien et solaire) couvrent une part importante de la consommation. Le nombre de pas horaires avec des prix négatifs en Allemagne a fortement augmenté en 2019 (voir figure 9). Sur le marché EPEX-Spot-Day-Ahead, un total de 211 heures a été enregistré avec des prix négatifs, ce qui représente environ 2,4% de toutes les heures négociées en 2019 selon /18/. La plupart des prix négatifs ont été observés sur une période d’au moins six heures consécutives (123 sur 211 heures au total).

Fig 8_Prix negatifs1
Figure 9 : Bilan des heures avec prix de l’électricité négatifs 2012 à 2019 /4/, /18/

La valeur moyenne des prix négatifs de l’électricité s´élevait à -17,3 €/MWh et la valeur record à – 90 €/MWh en 2019. Bien que le nombre d’heures ait augmenté par rapport à l’année précédente, les prix négatifs ne représentent toujours qu’une faible part du total des transactions d’électricité à la bourse.

La hausse du nombre d’heures avec des prix négatifs montre que le réseau électrique entre, avec une part d’énergie renouvelable de plus de 40 %, dans une phase où la flexibilité du système électrique devient de plus en plus nécessaire.

Pour que les prix négatifs soient moins fréquents à l’avenir, la production (par exemple grâce à des centrales conventionnelles plus flexibles ou en découplant la production d’électricité de la production de chaleur dans les centrales de cogénération) et la demande (par exemple grâce aux options de power-to-heat et au développement des capacités de stockage de l’électricité) doivent s’adapter encore mieux aux fluctuations des énergies renouvelables.

Modernisation des réseaux de transport

L´actuelle programmation fédérale de développement des réseaux de transport  estime que 7644 km sont prioritaires /10/. L´épine dorsale est constituée par des tracés nord – sud en courant continu d´une longueur totale d´environ 2100 km.

Or la construction des lignes est lente. Outre les contraintes administratives, l’installation de nouvelles lignes se heurte aux refus des riverains et des associations de protection de la nature. Les autorités ont pris la décision de la mise en souterrain du réseau électrique pour une grande partie, sans parvenir à calmer toutes les résistances. Environ 16% (1242 km) des lignes THT sont réalisés à la fin du troisième trimestre 2019 /10/.

Faits marquants en 2019 

Commission Charbon – Recommandations d´une sortie progressive du charbon d´ici 2038 

Une commission gouvernementale, appelée « Commission Charbon » a émis en janvier 2019 un rapport avec des propositions pour atteindre les objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre d´ici 2030 /5/.

Elle préconise entre autres une sortie progressive des centrales à charbon et au lignite d´ici 2038, avec deux étapes intermédiaires : réduire d´ici 2022 la capacité des centrales sur le réseau à 30 GW (15 GW de lignite et 15 GW de houille), à 17 GW en 2030 (9 GW de lignite et 8 GW de houille) et à zéro GW au plus tard à la fin 2038.

L’objectif du gouvernement fédéral était de mettre en œuvre par voie législative les recommandations de la Commission Charbon d’ici fin 2019. Mais l´adoption de la loi sur la sortie du charbon (Kohleausstiegsgesetz) a été reportée à 2020. Le calendrier initial n´a pas pu être respecté en raison de la grande complexité de la loi et des négociations en cours avec les exploitants sur les dédommagements pour l’arrêt de leurs centrales à charbon/lignite.

Adoption du programme de protection du climat 2030 (Klimaschutzprogramm 2030) et de la loi fédérale de protection du climat (Bundes – Klimaschutzgesetz)

Le gouvernement allemand a adopté en octobre 2019 le programme de protection du climat 2030 (Klimaschutzprogramm 2030) et le projet de loi fédérale de protection du climat (Bundes-Klimaschutzgesetz).

Après examen par le Parlement et le Bundesrat, la chambre haute du Parlement, la loi fédérale de protection du climat a été adopté définitivement juste avant Noël 2019. Elle est entrée en vigueur le 18.12.2019 /11 /.

La nouvelle loi a pour objectif d´atteindre la neutralité carbone de l’Allemagne d’ici 2050 et une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990 comme étape intermédiaire. Pour y arriver la loi fixe des objectifs juridiquement contraignants en matière d’émissions de gaz à effet de serre pour chaque année et pour chaque secteur économique à l´horizon de 2030. 

Adoption d´un prix carbone dans les secteurs des transports et de chauffage/refroidissement

Un compromis a été également trouvé au sujet de la loi sur l’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (Brennstoffemissionshandelsgesetz) entrée en vigueur en décembre 2019 /11/. Il s´agit de l´instauration d´un système national de certificats d’émissions, c´est à dire un « prix carbone » pour les émissions de CO2 dans les secteurs des transports et de chauffage/refroidissement non couverts par le système européen d’échange de quotas d’émission.

Initialement prévu à 10 Euros par tonne, ce prix de l’émission de CO2 sera finalement fixé à 25 Euros à partir du 1er janvier 2021. Il s´agit du principal changement demandé par le Bundesrat. Le prix de ces émissions de CO2 augmentera ensuite de 5 Euros par an en 2022 et 2023 puis de 10 Euros par an et passera donc à 55 Euros en 2025. En 2026, les certificats seront mis aux enchères dans une fourchette de 55 Euros à 65 Euros par tonne de CO2. Le gouvernement fédéral lancera une modification de la loi au printemps 2020.

Arrêt définitif de la tranche 2 de la centrale nucléaire de Phillipsburg 

Selon les dispositions de la loi atomique de 2011, la deuxième tranche (réacteur à eau sous pression d’une puissance électrique nette de 1402 MW) de la centrale nucléaire de Philippsburg, en Bade-Wurtemberg, a été définitivement arrêtée fin 2019 après 35 ans de fonctionnement /12/. Six tranches d´une puissance électrique totale nette de 8107 MW sont encore en service. Selon la loi atomique, 3 tranches d´une puissance électrique totale nette de 4058 MW seront arrêtées définitivement fin 2021 et les 3 tranches restantes au plus tard fin 2022.

Compte tenu du retard sur le développement du réseau, cette situation sera un challenge pour la sécurité du réseau, notamment du Sud de l´Allemagne, où réside une partie importante de l’industrie et donc de la consommation électrique.

L´agence fédérale des réseaux a approuvé la construction de 1200 MW de capacité de soutien de réseau répartie sur 4 régions en Allemagne du sud /16/ afin d´assurer la sécurité du système électrique dans la période allant de l´arrêt du nucléaire à la mise à disposition des nouvelles lignes. Les appels d’offres sont mis en œuvre par les gestionnaires de réseaux de transport et sont « technologiquement neutres ». Il est possible de faire appel à des installations conventionnelles de production, telles que des centrales à gaz, qu´à des charges interruptibles et à des installations de stockage. La mise en service des installations est prévue à partir d´octobre 2022. Elles seront maintenues en fonctionnement pendant dix ans et financées par le tarif d´utilisation du réseau.

Selon une étude du centre allemand pour l’aéronautique et l’astronautique et de l´université de Stuttgart /13/, l’approvisionnement en électricité en Allemagne serait assuré jusqu´en 2025. Mais pour les situations critiques, le sud de l’Allemagne sera tributaire de la fourniture d´électricité par le nord de l’Allemagne ou par les pays voisins. Cette étude n’a toutefois pas vérifié si les pays voisins pourraient fournir à l’Allemagne du sud l´électricité manquante.

Références 

/1/ AG Energiebilanzen (2020, Energieverbrauch in Deutschland im Jahr 2019,  en ligne : https://www.ag-energiebilanzen.de/

/2/ AG Energiebilanzen (2019), Bruttostromerzeugung in Deutschland nach Energieträgern, en ligne : https://www.ag-energiebilanzen.de/

/3/ BDEW (2020) Stromerzeugung und – verbrauch in Deutschland, en ligne : https://www.bdew.de/media/documents/20200914_D_Stromerzeugung1991-2019.pdf

 /4/ AGORA-Energiewende (2020) Die Energiewende im Stromsektor: Stand der Dinge 2019, en ligne : https://www.agora-energiewende.de/fileadmin2/Projekte/2019/Jahresauswertung_2019/171_A-EW_Jahresauswertung_2019_WEB.pdf

 /5/ Allemagne-Energies (2019) : Allemagne : Une sortie du charbon préconisée d’ici 2038, en ligne : https://allemagne-energies.com/2019/01/27/allemagne-une-sortie-du-charbon-preconisee-dici-2038/

/6/ BNetzA (2020) Kraftwerksliste, En ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/DE/Sachgebiete/ElektrizitaetundGas/Unternehmen_Institutionen/Versorgungssicherheit/Erzeugungskapazitaeten/Kraftwerksliste/kraftwerksliste-node.html

/7/ Allemagne-Energies (2019) : Allemagne : La charge de soutien aux énergies renouvelables électriques augmente de 5,5% en 2020, en ligne : https://allemagne-energies.com/2019/10/18/allemagne-la-charge-de-soutien-aux-energies-renouvelables-electriques-augmente-de-55-en-2020/

/8/ Eurostat Base des données. Commission européennes. En ligne : https://ec.europa.eu/eurostat/data/database.

/9/ UBA (2020) : „ Entwicklung der spezifischen Kohlendioxid-Emissionen des deutschen Strommix in den Jahren 1990 – 2019“, en ligne : https://www.umweltbundesamt.de/sites/default/files/medien/1410/publikationen/2020-04-01_climate-change_13-2020_strommix_2020_fin.pdf

/10/ Bundesnetzagentur (2019) Leitungsvorhaben, en ligne : https://www.netzausbau.de/leitungsvorhaben/de.html

/11/ Allemagne-Energies (2019) : Le parlement allemand adopte le programme de protection du climat 2030, en ligne : https://allemagne-energies.com/2019/12/29/le-parlement-allemand-adopte-le-programme-de-protection-du-climat-2030

/12/ Allemagne-Energies (2019) : Arrêt définitif de la tranche 2 de la centrale nucléaire de Philippsburg après 35 ans, en ligne : https://allemagne-energies.com/2019/12/29/arret-definitif-de-la-tranche-2-de-la-centrale-nucleaire-de-philippsburg-apres-35-ans/

 /13/ IER, IFK, DLR (2018) Versorgungssicherheit in Süddeutschland bis 2025 –sichere Nachfragedeckung auch in Extremsituationen? En ligne:  https://um.baden-wuerttemberg.de/fileadmin/redaktion/m-um/intern/Dateien/Dokumente/2_Presse_und_Service/Publikationen/Energie/181218_Studie_Versorgungssicherheit-Sueddeutschland-2025.pdf

/14/ Allemagne-Energies (2020) Retour d´expérience des appels d´offres de 2017 à 2019 selon la loi sur les énergies renouvelables de 2017 (EEG 2017), en ligne :  https://allemagne-energies.com/2020/01/11/retour-dexperience-des-appels-doffres-de-2017-a-2019-selon-la-loi-sur-les-energies-renouvelables-de-2017-eeg-2017/

/15/ Allemagne-Energies Bilans énergétiques : Comparaison Allemagne et France, en ligne : https://allemagne-energies.com/bilans-energetiques/

/16/ BNetzA (2017) Bericht zur Ermittlung des Bedarfs an Netzstabilitätsanlagen. gemäß §13k EnWG. Bundesnetzagentur. En ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Downloads/DE/Sachgebiete/Energie/Unternehmen_Institutionen/Versorgungssicherheit/Berichte_Fallanalysen/BNetzA_Netzstabilitaetsanlagen13k.pdf?__blob=publicationFile&v=3.

/17/ Deutsche WindGuard (2020), Windenergiestatistik: Windenergie-Ausbau in Deutschland, en ligne : https://www.windguard.de/windenergiestatistik.html

/18/ Bundesnetzagentur (2020) , SMARD , Negative Strompreise, en ligne : https://www.smard.de/home/topic-article/444/15412

/19/ UBA (2020), communiqué de presse du 16.03.2020 „Treibhausgasemissionen gingen 2019 um 6,3 Prozent zurück“, en ligne : https://www.umweltbundesamt.de/dokument/trendtabelle-sektoren-vorlaeufige-thg-daten-2019

/20/ Allemagne-Energies (2020), L´Allemagne atteindra-t-elle son objectif climatique 2020 grâce à l´hiver doux et l´épidémie de coronavirus ? En ligne : https://allemagne-energies.com/2020/03/22/lallemagne-atteindra-t-elle-son-objectif-climatique-2020-grace-a-lhiver-doux-et-lepidemie-de-coronavirus/

/21/ BnetzA (2020), Netzreservebedarf Strom für 2020/2021 und 2024/2025, communiqué de presse du 04 05 2020, Bundesnetzagentur, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Pressemitteilungen/DE/2020/20200504_Reservebedarf.html?nn=265778

/22/ SMARD Strommarktdaten. Bundesnetzagentur. En ligne : https://www.smard.de/blueprint/servlet/page/home/46.

Allemagne : turbulences de l’équilibrage du système électrique en juin 2019

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(Texte mis à jour le 07.09.2020)

Temps de lecture : 4 min

En juin 2019, pendant trois jours, il y a eu des désordres considérables dans le système électrique allemand. Selon les gestionnaires des réseaux de transport, la situation était très tendue et n’a pu être maîtrisée qu’avec le soutien des voisins européens. Selon l’Agence Fédérale des Réseaux, il n’y a cependant pas eu de risque de blackout. L´événement a eu un large écho dans la presse allemande /1/, /2/, /3/. 

L’analyse des événements par les GRT /4/ a montré que des incertitudes de pronostic de la production des énergies renouvelables intermittentes ne pouvaient à elles seules expliquer l’étendue et l’ampleur du déséquilibre observé.  Les soupçons se sont confirmés que les désordres ont été causés en grande partie par un disfonctionnement de certains opérateurs.

L’Agence fédérale des réseaux a engagé en septembre 2020 des procédures d’amende contre trois opérateurs soupçonnés de manipulation du marché /10/.

Les 6, 12 et les 25/26 juin, il y a eu des écarts considérables entre la quantité d’électricité injectée sur le réseau et la quantité d’électricité soutirée. Le déficit a atteint plus de 6 000 MW les 6 et 25 juin et près de 10 000 MW le 12 juin. Des déséquilibres considérables ont existé pendant plusieurs heures ces jours-là /4/.

Les gestionnaires de réseaux de transport (GRT) allemands ont dû non seulement activer pleinement les réserves de puissance disponibles et le dispositif d’interruptibilité des grands consommateurs industriels, mais aussi mettre en œuvre des mesures supplémentaires, notamment des approvisionnements en électricité à la bourse et le recours aux réserves de puissance auprès des GRT à l’étranger.

Le déficit n’a pas seulement entraîné une campagne d’aide de la part des voisins européens, qui ont injecté de l’électricité sur le marché allemand mais les prix sur le marché des réserves d’équilibrage ont également grimpé en flèche à la bourse. Le coût d´un mégawatt de puissance de réserve tertiaire s’élevait à plusieurs milliers d’euros à son apogée.

Suite aux problèmes rencontrés, les GRT ont augmenté leur capacité de réserve secondaire et tertiaire /4/.

Disfonctionnement de certains responsables d´équilibre

Le 6 et le 12 juin les pronostics concernant la production à partir des énergies renouvelables intermittentes ont été soumis à des incertitudes accrues. En outre, en cours de journée, des réactions (opérations de vente d´électricité en bourse) des gestionnaires des périmètres d’équilibre suite aux prix spot élevés ont été enregistrées. En revanche le 25 juin, aucun écart significatif par rapport aux pronostics en matière de production d’énergies renouvelables n’était connu, mais à nouveau des opérations de vente en bourse des gestionnaires des périmètres d’équilibre suite aux prix spot élevés étaient mises en évidence.

Pour ces trois jours, les faibles prix de rémunération des services systèmes (< 100 €/MWh) et de l’énergie d’équilibrage uniforme (reBAP) n´ont guère incité au maintien d’équilibre. C’est l’une des principales raisons de l’ampleur du déséquilibre du système et dans certains périmètres d’équilibrage  – mis à part les écarts de pronostics dus à des situations météorologiques difficiles le 6 et en partie le 12 juin.

En conclusion, l’analyse des événements par les GRT /4/ a montré que des incertitudes de pronostic de la production des énergies renouvelables intermittentes ne pouvaient à elles seules expliquer l’étendue et l’ampleur du déséquilibre observé. La cause du déficit important de l´électricité entre l’électricité injectée et consommée dans plusieurs périmètres d’équilibre n´a pas été un manque de capacité de production mais le fait que la quantité d´électricité nécessaire pour couvrir la demande n´a pas été achetée au marché day-ahead par certains opérateurs.

La poursuite de l’enquête a mis en évidence d’éventuels manquements aux obligations par certains responsables d´équilibre : suspicion de vente à découvert «short selling» d´électricité en bourse aux prix spot élevés sans disposer de la quantité d´injection nécessaire pour l´équilibrage. La raison était le manque d´incitations financières pour assurer l´équilibrage dans leurs périmètres.

La réponse du gouvernement aux questions du Parlement en août 2019 /5/ confirme que la cause principale était un disfonctionnement de certains responsables d´équilibre ce qui a provoqué des écarts importants entre les injections et les soutirages au sein des périmètres d’équilibre.

Les responsables d’équilibre sont des opérateurs qui se sont engagés auprès des GRT à maintenir, contre rémunération, l’équilibre entre l’offre et la demande. Le périmètre d’équilibre est constitué par des injections (sites physiques de production, achats en bourse ou à d’autres acteurs, importations) et des soutirages (sites physiques consommateurs, ventes en bourse ou à d’autres acteurs).

L´Agence Fédérale des Réseaux a ouvert en octobre 2019 une enquête contre des opérateurs en vue d’éventuels manquements à leurs obligations contractuelles de maintien d´équilibre /6/.

De plus, l´Agence fédérale des Réseaux a défini fin 2019 des mesures complémentaires pour renforcer la fiabilité des responsables d´équilibre dans le secteur de l´électricité /7/. L´objectif est de les inciter à mieux gérer leurs périmètres d´équilibre. Outre l´ajustement de l´incitation financière pour équilibrage, ils ont l´obligation à partir de janvier 2020, lors des situations critiques sur le réseau, d´équilibrer leur périmètre 15 minutes avant l´accomplissement physique.  De plus ils doivent transmettre tous les quarts d´heure les informations sur la situation d´équilibrage au GRT responsable afin qu´il puisse intervenir si nécessaire /8/.

L´Agence Fédérale des Réseaux confirme par communiqué de presse du 30 avril 2020 /9/ le manquement de plusieurs opérateurs à leurs obligations contractuelles. Ils ont provoqué dans leurs périmètres d’équilibrage un équilibre insuffisant entre l’alimentation et le soutirage. Ce fait a été en grande partie responsable pour les importants désordres dans le système électrique en juin 2019.

Après une évaluation approfondie de plus de cent millions de données relatives aux périmètres d’équilibrage, 21 cas lors des trois jours de juin 2019 semblent indiquer que des acteurs du marché ont délibérément vendu de l’électricité sur le marché intraday à des prix très élevés sans avoir l’intention de se procurer ou de produire le volume d’électricité nécessaire. Des procédures d’amende ont été engagées en septembre 2020 contre trois opérateurs pour manipulations du marché /10/.

Références

/1/ Energate Messenger (2019), « Turbulenzen im Regelenergiemarkt », en ligne: https://www.energate-messenger.de/news/192785/turbulenzen-im-regelenergiemarkt

/2/ Die Welt (2019), « An mehreren Tagen im Juni wurde in Deutschland der Strom knapp », en ligne : https://www.welt.de/wirtschaft/article196229401/Chaos-im-deutschen-Stromnetz-An-mehreren-Tagen-im-Juni-wurde-in-Deutschland-der-Strom-knapp.html

/3/ Spiegel Online (2019), « Blackout-Gefahr,  Deutsche Netzbetreiber kämpfen mit akuter Stromnot », en ligne :  https://www.spiegel.de/wirtschaft/unternehmen/stromnetz-deutsche-netzbetreiber-kaempften-mit-akuter-stromnot-a-1275323.html

/4/ GRT allemands (2019) Investigation on system imbalances in Germany in June 2019, Report from November 19th, 2019 (analysis from August 2019), Study balancing state June 2019

/5/ Deutscher Bundestag (2019), Drucksache 19/12392, Antwort der Bundesregierung auf Kleine Anfrage „Gefährdung der Versorgungssicherheit durch Engpässe in der Stromerzeugung“, en ligne : https://dip21.bundestag.de/dip21/btd/19/123/1912392.pdf

/6/ Bundesnetzagentur (2019), communiqué de presse du 22.10.2019, „Bundesnetzagentur eröffnet Aufsichtsverfahren gegen sechs Bilanzkreisverantwortliche, Reaktion auf Bilanzungleichgewichte im Juni 2019“, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Pressemitteilungen/DE/2019/20191022_BK6.html?nn=265778

/7/ Bundesnetzagentur (2019), communiqué de presse du 5.12.2019, „Bundesnetzagentur legt Maßnahmen zur Stärkung der Bilanzkreistreue im Strombereich fest“, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Pressemitteilungen/DE/2019/20191211_Bilanzkreistreue.html?nn=265778

/8/ FfE (2020) Die deutschen Strompreise an der Börse EPEX Spot in 2019 – Analyse des Preisniveaus und der Preisschwankungen (Preisspreads), Forschungsgesellschaft für Energiewirtschaft mbH, en ligne : https://www.ffegmbh.de/kompetenzen/wissenschaftliche-analysen-system-und-energiemaerkte/strommarkt/932-die-deutschen-strompreise-an-der-boerse-epex-spot-in-2019-analyse-des-preisniveaus-und-der-preisschwankungen-preisspreads

/9/ Bundesnetzagentur (2020), communiqué de presse du 30.04.2020, Bundesnetzagentur veröffentlicht Jahresbericht 2019, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Downloads/DE/Allgemeines/Presse/Pressemitteilungen/2020/20200430_Jahresbericht.pdf?__blob=publicationFile&v=2

/10/ Bundesnetzagentur (2020), communiqué de presse du 7.9.2020, Marktmanipulationen am Energiegroßhandelsmarkt im Zusammenhang mit Bilanzungleichgewichten im Juni 2019 – Bundesnetzagentur eröffnet Bußgeldverfahren gegen drei Marktteilnehmer, en ligne : https://www.bundesnetzagentur.de/SharedDocs/Downloads/DE/Allgemeines/Presse/Pressemitteilungen/2020/20200907_Marktmanipulation.pdf?__blob=publicationFile&v=3

Allemagne : la part des énergies renouvelables à la consommation d’électricité atteint 44% au premier semestre de 2019

Temps de lecture : 2 min

La part des énergies renouvelables à la consommation intérieure brute d’électricité au premier semestre de 2019 (~ 290 TWh) a atteint 44%, sous réserve que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables soit entièrement affectée à la consommation intérieure et seule l´électricité produite à base de centrales conventionnelles soit exportée. A titre de comparaison : au premier semestre 2018, la part des énergies renouvelables dans la consommation d’électricité s´élevait à  39%.

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Figure 1 : Consommation intérieure brute d’électricité au premier semestre de 2019 (source BDEW)

Ceci est le résultat des calculs préliminaires du centre de recherche sur l’énergie solaire et l’hydrogène de Bade-Wurtemberg (ZSW) et de la fédération des industries de l’énergie et de l’eau (BDEW) /1/.

Avec 55,8 TWh, l´éolien terrestre a été le plus grand producteur d´électricité renouvelable. Cela correspond à une augmentation de 18% par rapport au 1er semestre 2018 (47,3 TWh). Le photovoltaïque a  fourni 24 TWh  (1er semestre 2018: 23 TWh). Le taux de croissance le plus élevé a été atteint par l´éolien offshore avec une production de 12 TWh, soit  une augmentation de 30% par rapport au premier semestre 2018 (9,2 TWh). La production des autres énergies renouvelables (biomasse et hydraulique) est avec 36,7 TWh pratiquement restée constante (premier semestre de 2018: 37,2 TWh).

L´augmentation de la production des énergies renouvelables au premier semestre 2019 est principalement attribuée aux conditions météorologiques exceptionnelles.  Un nouveau record de production d´éolien a été enregistré en mars, mais dans les autres mois aussi le facteur de charge des éoliennes a été toujours supérieur aux valeurs moyennes de référence. A titre d´exemple, le facteur de charge d´éolien offshore a été d´environ 43% au premier semestre 2019.

Références

/1/ BDEW : Communiqué de presse du 26.6.2019 « Zahl der Woche / Halbjahres-Rekord: Erneuerbare Energien decken 44 % des Stromverbrauchs in Deutschland » https://www.bdew.de/presse/presseinformationen/zahl-der-woche-halbjahres-rekord-erneuerbare-energien-decken-44/

Le paysage énergétique allemand en 2018 (mise à jour du 27.08.2019)

L´édition 2021 est disponible ici

L´édition 2020 est disponible ici

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Temps de lecture 15 min

Selon les dernières données statistiques, l’évolution énergétique en Allemagne sur 2018 se caractérise comme suit :

  • La consommation énergétique (énergie primaire) a baissé de 3,5% par rapport à 2017 et de 2,4% corrigée des aléas climatiques
  • la production brute d´électricité s´élève à ~ 647 TWh, légèrement inférieure par rapport à 2017 (~ 654 TWh), la consommation d´électricité recule à 596 TWh (2017 : 599 TWh)
  • la part des filières renouvelables augmente de deux pourcents à 35% (226 TWh) de la production brute, leur capacité installée atteint 120 GW
  • la part de production à partir des énergies fossiles (fioul, gaz, charbon et lignite) s´élève à ~ 48% moins trois pourcents par rapport à 2017 (~ 51% de la production brut)
  • la production du nucléaire se maintient au niveau de 2017 (~ 76 TWh ) malgré l´arrêt définitif de la tranche B (1344 MWe) de la centrale nucléaire de Gundremmingen fin 2017
  • Le solde exportateur (échanges physiques) est avec 51 TWh en léger recul par rapport à 2017 (55 TWh)
  • Selon les données provisoires, les émissions de gaz à effet de serre baissent de 4,5%

Consommation énergétique

Selon le rapport pour l´année 2018 de AG Energiebilanzen (AGEB 2019b), la consommation d´énergie primaire a reculé à 12.963 PJ, moins 3,5 % par rapport à l´année précédente (2017 : 13.440 PJ). La baisse de la consommation d´énergie primaire s’explique notamment par les températures particulièrement douces observées durant toute l’année. Avec 12,3%,  l’écart à la température moyenne a été important en 2018. La baisse de la consommation énergétique corrigée des aléas climatiques s´élève à 2,4%. D’autres effets sont l´ amélioration de l’efficacité énergétique et la hausse des prix de l’énergie.

Malgré un léger recul des énergies fossiles en 2018 (charbon, lignite et pétrole), elles couvrent presque 80 % de la consommation d´énergie primaire du pays, l’énergie nucléaire représente 6,4 % et les énergies renouvelables 14,0 % (voir figure 1).

Fig 1Energie primaire
Figure 1 : Consommation d´énergie primaire

Néanmoins, l´objectif de la transition énergétique de réduire la consommation d´énergie primaire de 20% d´ici 2020 par rapport à 2008 ne sera très vraisemblablement pas atteint. Selon (BMWi 2018), une réduction d´environ 11% d´ici 2020 parait encore vraisemblable.

Production et consommation d´électricité

Selon le rapport pour l´année 2018 de l´AG Energiebilanzen (AGEB 2019a) la production brute d’électricité allemande, 646,8 TWh, est en léger recul par rapport à 2017 (653,6 TWh). La production nette s´élève à 613,1 TWh en 2018 (BDEW 2019).

La consommation intérieure brute recule à 595,6 TWh, moins 0,5% par rapport à 2017 (598,7 TWh)

Fig 2 production electricite 2018
Figure 2 : Production brute d´électricité en 2018 (données entre parenthèses pour 2017)

Le tableau ci-dessous détaille l´évolution de la production brute d´électricité pour chaque filière en 2018 par rapport à 2017 (AGEB 2019a).

tableau 3_2019
Tableau : Production brute d´électricité 2017 et 2018

La production à partir du lignite recule légèrement, en revanche le charbon marque une forte baisse (-10,4%)  notamment à cause de l´arrêt d´une capacité de 879 MW, c´est-à dire environ 3% de la capacité totale installée.

Le nucléaire se maintient au même niveau qu´en 2017 grâce à une disponibilité accrue ayant compensé l´arrêt définitif de la tranche B (1344 MWe) de la centrale nucléaire de Gundremmingen fin 2017.

La production à base de gaz est en léger recul notamment à cause de l´augmentation de la part de production des énergies renouvelables.

Les filières renouvelables progressent de 4,7 % à 226,4 TWh (2017 : 216,2 TWh) pour représenter 35,0 % (2017 : 33,1 %) de la production brute. Les sources intermittentes (éolien et photovoltaïque) sont de loin le plus grand contributeur.  Le photovoltaïque connait la croissance la plus forte par rapport à 2017, suivi de l´éolien offshore. Seule l´hydroélectricité est en forte baisse pour cause de sécheresse persistante en 2018.

L’électricité allemande reste malgré tout très dépendante des combustibles fossiles (lignite, charbon, gaz et fioul) dont la part s´élève à ~ 48% de la production brute en recul de 3% par rapport à 2017 (~ 51%).

Mais malgré la dominance des énergies fossiles, la production à base de charbon et lignite est – contrairement aux idées reçues – en baisse continue depuis plusieurs années (voir figure 3) et a été presque rattrapée par les énergies renouvelables en 2018 (AGEB 2019b, 2019a).

Fig 3 evolution production electricite 2009-2018
Figure 3 : Evolution de la production brute des différentes filières depuis 2009

Surévaluation systématique de la part des énergies renouvelables  

Selon Fraunhofer ISE (Fraunhofer ISE 2019), la part des énergies renouvelables aurait dépassé les 40 % en 2018. En effet, si l´on utilise comme base de calcul la part de production nette injectée dans le réseau public (542,5 TWh), au lieu de la production nette totale de 613,1 TWh (BDEW 2019), tout en supprimant l´autoproduction de l´industrie on arrive à ce résultat.

Le gouvernement allemand utilise comme objectif la part des énergies renouvelables à la consommation brute nationale. Ce faisant, on utilise l´hypothèse que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables est entièrement consommée en Allemagne et seule l´électricité produite à base de centrales conventionnelles est exportée.

De facto, ces calculs ne correspondent pas à la réalité et reviennent à surévaluer systématiquement la part des énergies renouvelables (FAZ 2019).

Sous l´hypothèse du gouvernement allemand que l´électricité produite à partir des énergies renouvelables est entièrement affectée à la consommation intérieure brute (~ 596 TWh), leur part arrive à 38 % (2017 : 36,1%).  L´objectif 2020 du gouvernement d´une part de 35% à la consommation brute étant déjà dépassé, le nouvel objectif est maintenant une part de 65 % d´ici 2030, ce qui nécessiterait encore une accélération du développement des énergies renouvelables (BDEW et ZSW 2018).

L´objectif de réduction de la consommation de l´électricité hors de portée

Selon l’objectif de la transition énergétique, les allemands devraient réduire leur consommation d’électricité de 10 % d’ici 2020 par rapport à 2008. Après une baisse considérable lors de la crise économique en 2008/2009, la consommation a dépassé à nouveau les 600 TWh et stagne depuis autour de cette valeur. Avec seulement – 4 % réalisé fin 2018, l’objectif de 2020 est bien loin (voir figure 4). Selon (BMWi 2018), une réduction autour de 5% pourrait être atteinte d´ici 2020.

Le léger recul de la consommation d’électricité en 2018 est dû à la  concomitance  d’une météo clémente et d’un fléchissement conjoncturel dans l´industrie.

Fig 4 evolution conso electricite 2009-2018
Figure 4 : Evolution de la consommation brute d´électricité depuis 2008

Puissance installée

Selon (Agora Energiewende 2019; BNetzA 2019; BMWi 2019b), la puissance installée des énergies renouvelables a augmenté d´environ 7 GW à 120 GW en 2018, dont 3,3 GW éolien et 3 GW photovoltaïque. Le parc d´énergies renouvelables intermittentes dépasse maintenant les 104 GW (voir figure 5).

Le parc conventionnel est en léger recul d´environ 2 GW en raison de l´arrêt définitif de la tranche nucléaire B (1,3 GW) de Gundremmingen et de l´arrêt d´une capacité de 0,9 GW à base de charbon (AGEB 2019b; BNetzA 2019; BMWi 2019b).

Il faut toutefois noter que 81 GW (hors STEP) du parc conventionnel opèrent sur le marché de l’électricité. Environ 8,8 GW constituent une « réserve de sécurité » ou une « réserve des réseaux » donc ne fonctionnent qu´en situation exceptionnelle et environ 2,7 GW sont provisoirement fermés. Les 11,5 GW « hors réseau » sont répartis comme suit :  5,1 GW centrales à gaz, 4,6 GW centrales au lignite et au charbon et 1,8 GW centrales au fioul (BNetzA 2019).

Fig 5 Puissance installee 2017_2018_1
Figure 5: Puissance installée en 2017 et 2018

Échanges transfrontaliers d’électricité

En 2018, le solde exportateur est avec ~ 51 TWh en légère baisse (2017 : 55 TWh). Au total l´Allemagne a exporté 82,7 TWh et importé 31,5 TWh (AGEB 2019b). Il s´agit des échanges physiques et non pas des échanges commerciaux. Le solde est calculé par la différence entre l’énergie exportée et l’énergie importée aux frontières entre le réseau allemand et les pays frontaliers. Pour la plus grande part ce sont des flux en transit vers d´autres pays que les pays limitrophes et des flux en boucle résultant du déficit des lignes de transport en Allemagne.

Fig 6 solde echanges
Figure 6 : Export et import (échanges physiques) en TWh

Evolution des prix spot et des prix négatifs

La hausse du prix du CO2 européen et l´augmentation du coût de combustible ont conduit en 2018 à une augmentation significative d´environ 30% du prix spot sur le marché par rapport à 2017. La figure 7 montre l´évolution des prix (baseload) sur le marché spot (EEX) pour 2011-2017 selon (BNetzA 2018) et (Agora Energiewende 2019) pour 2018.

fig 7 prix spot 2011_2018
Figure 7 : Evolution des prix sur le marché spot (EEX)

Malgré l´augmentation du prix du CO2 (~ 22 €/t CO2  fin 2018) les centrales à lignite restent de loin la forme la plus avantageuse de production d´électricité à base de combustible fossile.

Depuis leur introduction à la bourse EPEX Spot en 2008, on observe des prix négatifs au marché spot. Il s´agit d’épisodes rares qui peuvent notamment survenir lors des creux de consommation en raison de capacités de production intermittentes (éolien, solaire). En Allemagne des prix négatifs sont principalement observés lorsque les énergies renouvelables fatales (éolien et solaire) couvrent une part importante de la consommation. Le nombre de pas horaires avec des prix négatifs en Allemagne a fortement augmenté depuis 2015 et reste élevé en 2018.  La figure 8 montre le nombre de pas horaires (marché Day Ahead) et quarts d´heures (marché Intraday) à la bourse EPEX spot selon (Agora Energiewende 2019).

fig 8 prix negatif
Figure 8 : nombre de pas horaires (marché Day Ahead) et quarts d´heures (marché Intraday) à la bourse EPEX Spot

Émissions de gaz à effet de serre

Selon les premières estimations de l´agence fédérale de l´environnement (BMU 2019), les émissions de gaz à effet de serre sont en recul d´environ 41 Mt CO2éq  par rapport à 2017, principalement grâce à la baisse de la consommation énergétique (voir plus haut). Les réductions les plus importantes ont été enregistrées dans le secteur de l´énergie et pour les ménages, seul un léger recul dans le secteur des transports.

Les émissions de la production d´électricité ont baissé d´environ 12,5 Mt CO2éq  (AGEB 2019b; BDEW 2018).  La raison principale est la baisse de la production totale déjà mentionnée plus haut.

La figure 9 montre l´évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2 éq par an (données 1990 à 2017 selon (UBA 2018), estimations pour 2018 selon (BMU 2019). En 2018 l´Allemagne a baissé ses émissions de 30,8 % par rapport à 1990.

Fig 9 emission 2018
Figure 9 : Évolution des émissions allemandes en millions de tonnes de CO2 éq par an

Le mix électrique est néanmoins encore très carboné, le contenu carbone moyen du secteur électrique allemand atteignait 472 gCO2/kWh en 2018 (Agora Energiewende 2019) soit une combustion du combustible dans des centrales presque 12 fois plus émettrice qu’en France (40 gCO2/kWh en 2018 selon (OIE 2019)).

L’Allemagne prévoit de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici 2020 par rapport à 1990. Cet objectif est hors de portée. Au mieux, une réduction de 32% pourrait être atteinte d´ici 2020 (Allemagne-Energies 2019a). Le problème est que les émissions des autres secteurs (chaleur et refroidissement, transports) ne baissent pas suffisamment.

Partant de la constatation qu’il n´est plus possible d’atteindre l´objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, il est prévu de combler l´écart au mieux. Une commission gouvernementale, appelée « Commission Charbon », a émis fin janvier 2019 un rapport avec des propositions pour réduire l´écart par rapport à l´objectif 2020 et pour atteindre les objectifs en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre d´ici 2030 (Allemagne-Energies 2019b). Elle préconise une sortie progressive des centrales à charbon et au lignite d´ici 2038 et la fermeture d’ici 2022 d’une capacité de 12,5 GW.

Des risques en matière de sécurité d’approvisionnement dans l´avenir ?

L’Allemagne a décidé de sortir du nucléaire d´ici 2022; soit une perte sèche de 9,5 GW équivalent à 12 % de sa production d´électricité. A cela s´ajoutera – si le gouvernement allemand suit les recommandations de la Commission Charbon – la mise hors service de 12,5 GW de centrales à charbon et lignite. L´Allemagne perdrait donc d´un coup 22 GW de moyens pilotables d´ici fin 2022.

Les quatre grands gestionnaires de réseaux de transport allemands – les GRT – ont publié en  janvier 2019 les bilans prévisionnels de l’équilibre offre – demande 2017 à 2021 (GRT 2019).     En situation de pointe, le pays pourrait faire face à un déficit d’approvisionnement en électricité de 5,5 GW dès 2021, hors importation.

Le niveau de l’aide apportée par des pays voisins lors des situations de pointe dépend de leur propre situation d’équilibre offre-demande. Or on constate une même tendance dans de nombreux pays européens à réduire les capacités de moyens pilotables concomitamment au développement massif des énergies renouvelables intermittentes. En cas de défaut de moyens de production à l’échelle européenne, un pays en limite de sa capacité de production acceptera-t-il d´aider un autre qui serait plus touché ?

Ce n’est donc pas sans raison que 10 associations professionnelles du secteur de l’électricité ont lancé en octobre 2018 un appel commun pour que la politique s´occupe de la sécurité d´approvisionnement en Europe (Allemagne-Energies 2018). Si les gouvernements n’apportent pas de corrections, la solidarité actuelle entre les pays pour se secourir en situation de pointe extrême serait en péril d’ici quelques années.

En revanche, selon le dernier rapport « monitoring » du Ministère Fédéral de l’Économie et de l´Energie, publié en juillet 2019 (BMWi 2019a), la sécurité d´approvisionnement ne serait pas en péril à l´horizon 2030.

Le rapport « monitoring » qui est publié à intervalles réguliers (au moins tous les deux ans) confirme que l´Allemagne continue de bénéficier d’un très haut niveau de sécurité d’approvisionnement au niveau international.

Pour le marché de l’électricité, certains indicateurs se sont établis en Europe pour évaluer la sécurité d’approvisionnement. Elle est assurée si les indicateurs respectent certaines valeurs.

Pour l´Allemagne, une expertise détaillée  a conclu qu’il existe une « probabilité d’équilibrage de la charge » de 99,94% : c´est-à-dire que la demande du marché de l’électricité est couverte par l’offre disponible. L´expertise tient compte de divers scénarios, tels que les différentes conditions météorologiques ou les effets des arrêts imprévus de centrales électriques, y compris la sortie progressive des centrales à charbon/lignite préconisée par la Commission Charbon.

L´expertise montre que les importations temporaires nécessaires seraient disponibles en toute sécurité jusqu’en 2030 malgré une réduction significative des moyens pilotables classiques (environ 90 à 100 GW) dans les pays voisins. L’intégration du marché européen de l’électricité se poursuivra, notamment par l’extension des interconnexions.

Tout cela signifie qu’en 2030, le marché européen de l’électricité continuera à garantir un degré élevé de sécurité d’approvisionnement et que les consommateurs allemands peuvent être approvisionnés de manière fiable à tout moment.

Bibliographie

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Agora Energiewende (2019) Die Energiewende im Stromsektor: Stand der Dinge 2018. Rückblick auf die wesentlichen Entwicklungen sowie Ausblick auf 2019. Agora Energiewende. En ligne : https://www.agora-energiewende.de/fileadmin2/Projekte/2018/Jahresauswertung_2018/125_Agora-JAW-2018_WEB.pdf.

Allemagne-Energies (2018) Dix associations professionnelles du secteur de l’électricité signent un appel commun pour assurer la sécurité d´approvisionnement en Europe. En ligne : https://allemagne-energies.com/2018/10/10/dix-associations-professionnelles-du-secteur-de-lelectricite-signent-un-appel-commun-pour-assurer-la-securite-dapprovisionnement-en-europe/.

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